—Par Karl Paolo —
Les vociférations qui ont émaillées la venue des jeunes du lycée Schœlcher à la simple évocation du nom de Serge LETCHIMY ont mis au devant de la scène, un des aspects majeurs du comportement comme des pratiques d’Alfred MARIE-JEANNE que certains avaient sans doute oublié.
Pourtant et contrairement à ce que certains journalistes ont prétendu, il ne s’agit pas d’une perte de contrôle qui aurait été provoquée lors d’un échange un peu vif avec d’autres interlocuteurs. Même dans ce cas, un élu, un « décideur », un responsable politique, l’exécutif d’une des deux principales assemblées locale, se doit de garder son self contrôle et de tenir, en toute circonstance, un langage et des propos exempts d’agressivité.
Il ne s’agit pas davantage d’un brusque coup de fièvre qui aurait été provoqué par la question d’un professeur, dont le seul objet était de débloquer la situation : « Ne pourriez pas rencontrer Monsieur LETCHIMY pour débloquer la situation ? »
Il s’agit d’un dérapage calculé, volontaire, destiné à impressionner son auditoire, à jouer des muscles comme le ferait un major de quartier devant une table de « serbi », dérapage d’une agressivité incroyable et totalement inqualifiable de la part d’un élu, qui, de surcroit, occupe les fonctions de président du conseil régional et de parlementaire.
Il s’agit d’un dérapage tellement volontaire que son auteur le revendique devant ses troupes réunies le28 novembre au Robert en disant : « Un homme venu d’ailleurs, militant du PPM, m’a posé une question. MWEN VOYEW AILLE CHIE »
Ce n’est pas la première fois qu’Alfred MARIE-JEANNE se livre à ce type d’outrances, on l’oublie trop facilement. Daniel ROBIN, conseiller régional de la liste des Progressistes et des démocrates a eu à subir, en pleine séance plénière, les sarcasmes et les vociférations du président de l’assemblée régionale, parce qu’il s’était permis d’émettre quelques critiques sur la politique suivie. N’est-ce pas là pourtant le rôle de l’opposition dans un pays démocratique ?
Plus près de nous, Christiane DORLEANS, toujours de l’opposition, à l’occasion du décès de laquelle Alfred MARIE-JEANNE a cru devoir chanter les louanges, s’était heurtée au même comportement parce qu’elle réclamait d’être simplement informée sur la destination de fonds publics alloués, par la Région Martinique a des tiers, au titre de l’aide sociale. Chacun se souvient des hurlements du président de la collectivité qui, en pleine réunion, ont d’ailleurs tenu lieu de réponse.
Mais revenons sur le dossier du lycée Schœlcher.
Pour des raisons qui lui sont propres, le Conseil Régional a décidé de reconstruire cet établissement et pour ce faire, a lancé les études nécessaires. Il est proclamé que le lycée Schœlcher est un établissement dangereux car ne respectant pas, et pour cause, les règles parasismiques d’aujourd’hui. Sans doute ! Mais c’est aussi le cas de bien d’autres établissements que la Région n’a nulle intention de reconstruire et notamment le lycée de Bellevue et le lycée Joseph Gaillard, celui là même qui doit accueillir les secondes à déplacer du lycée Schœlcher.
L’option du renforcement des structures porteuses du lycée Schœlcher a-t-elle été sérieusement étudiée ? J’ai des doutes à ce propos ! En effet, lors d’un mouvement de grève des professeurs de l’établissement au début des années 2000, le président de la Région avait déjà indiqué qu’il était partisan de sa démolition.
L’autre argument concerne l’accès des personnes à mobilité réduite qui est extrêmement difficile à concevoir et à réaliser dans un établissement construits sur plusieurs niveaux. Mais il n’est pas le seul : les deux autres lycées de Fort-de-France, Bellevue et Joseph Gaillard sont exactement dans la même situation.
On peut se demander ce qui gène réellement dans ce dossier qui n’a rien de spécifique! En effet, à l’issue du séisme de 2007, d’autres établissements ont souffert, notamment le lycée professionnel Raymond NERIS, situé au Marin, et plusieurs bâtiments ont du être désaffectés sans qu’il ne soit question, à ce jour, 2 ans après, de reconstruction. Cela n’a pas été le cas du lycée Schœlcher !!!
Alors, qu’en penser ? Ne serait-ce pas précisément parce que ce lycée Schœlcher porte ce nom qu’il est au centre d’une affaire dans laquelle la communauté éducative est prise en otage ? Le collège Ernest RENAN a été démoli sans entrainer de polémique ni de récriminations.
Ne serait-ce pas parce que la majorité MIM-CNCP du conseil régional a tenté de supprimer le nom de Schœlcher de frontispice de l’établissement pour lui donner celui d’Aimé CESAIRE que ce débat existe ? Chacun sait en effet que pour les « patriotes autoproclamés », Schœlcher n’est qu’un imposteur et que la fin de l’esclavage a été le fruit de la lutte des seuls esclaves !!!!
D’ailleurs, ne prête-t-on pas à ce courant politique, partisan de l’article 74, le projet de vouloir débaptiser toutes les rues, les places, les édifices qui portent le nom de Schœlcher, jusqu’à la ville bien connue qui retrouverait son nom de Case-Navire !!! Belle victoire posthume pour Bisette !!!!!
Démolir le Lycée Schœlcher pour le reconstruire ? Soit ! L’actuelle majorité du conseil régional en a le pouvoir. C’est d’ailleurs à ce titre qu’un concours d’architecture a été organisé et qu’un projet a été retenu, il y déjà plusieurs années. Cout de l’opération : 60 millions d’euros soit deux fois plus que le lycée ACAJOU II, deux fois plus que le lycée J. ZOBEL qui, eux, sont des lycées industriels et dont les spécialités nécessitent des ateliers extrêmement vastes, disposant d’équipements spéciaux. Pour chacun de ces établissements, des mouvements de terrain d’environ 100 000m3 ont été nécessaires et leur construction, en 16 mois (au lieu de 7 ans comme pour le lycée de Bellefontaine), a pesé sur leur cout !
Qu’est-ce donc qui justifie une opération de reconstruction du lycée Schœlcher estimée, au stade des études, à 60 millions d’euros, 400 millions de francs alors que tant d’autres lycées ne peuvent accueillir leurs élèves que dans des containeurs améliorés, que tant d’écoles primaires méritent des travaux que les communes n’ont évidemment pas les moyens de financer ? A combien en sera-t-on à l’issue des consultations des entreprises et en fin d’opération ?
Telle que prévu initialement, l’une des contraintes qui pesait sur le projet de reconstruction du lycée Schœlcher est qu’il devait être réalisé en présence d’élèves. Il ne pouvait échapper au Conseil Régional que cette exigence ne pouvait que rendre cette opération particulièrement délicate. La perspective de déplacer l’ensemble de la communauté éducative dans un établissement de transit a-t-elle été sérieusement envisagée? Il semble bien que la Ville de Fort-de-France ait adressé à la Région plusieurs propositions de terrain mais aucune n’a été retenue.
C’est donc au moment où le permis de construire est refusé par la Ville de Fort-de-France que la réduction de la population scolaire fréquentant le lycée Schœlcher est posée par le président du Conseil Régional, officiellement pour des raisons de sécurité, sans qu’on ne sache quels sont les bâtiments qui, pour ce motif, ne peuvent plus accueillir d’élèves. Et c’est pour protester contre ce qu’il faut bien qualifier de démantèlement que les élèves du Lycée Schœlcher sont venus, le 26 novembre dernier au Conseil Régional.
Le refus de délivrer un permis de construire n’est quand même pas un drame. En pareil cas, le maitre d’ouvrage modifie son projet pour le rendre compatible avec les exigences fixées par les règles d’urbanisme. Il peut aussi tenter de plaider sa cause auprès des services chargés de l’étude du dossier de permis de construire et donc de le rencontrer. Que les services du Conseil Régional, assisté par ceux de la SODEM et par les concepteurs rencontrent les services d’urbanisme de la Ville de Fort-de-France parait bien être la moindre des choses. Que compte tenu de l’importance du projet, le président du Conseil Régional par ailleurs parlementaire rencontre le Maire de Fort-de-France, lui aussi parlementaire devrait relever d’une démarche sans enjeu particulier. C’est ce que le professeur de sciences économiques et sociales suggérait et c’est cette suggestion qui lui a valu ces mots : » Monsieur, je n’ai aucun ordre à recevoir de vous, mais aucun, Mais aucun… Aucun monsieur ». » Je ne vous connais pas, je ne connais pas Letchimy, je vais traiter avec lui pour quoi faire?… Occupez vous de vos affaires!
Drôle de conception dont témoigne Alfred MARIE-JEANNE ! Soit la Ville de Fort-de-France et son maire obéissent, le petit doigt sur la couture du pantalon et dans ce cas tout va bien, soit ils sont des ennemis et deviennent infréquentables. Elle marque la volonté de ne pas traiter avec des partenaires, ce qui suppose la reconnaissance d’une certaine égalité et d’un comportement respectueux, mais avec des subordonnés à qui on donne des ordres. Telle semble être la conception que le MIM-CNCP depuis qu’ils dirigent la collectivité régionale.
Le 28 novembre, devant ses troupes réunies au Robert, Alfred MARIE-JEANNE s’est félicité de cet éclat au motif que la question lui avait été posée par un homme « venu d’ailleurs », qui plus est selon lui militant PPM.
Cette qualité de militant PPM prêtée au professeur contre lequel le président du Conseil Régional a vociféré est naturellement fausse. Mais quand cela serait, quel problème cela poserait-il ? Faut-il être encarté au MIM ou au CNCP pour venir à la Région ou poser une question sur un ton plus que courtois à son président ?
Autre chose est qu’Alfred MARIE-JEANNE n’hésite pas à justifier son attitude par le fait que selon lui, ce professeur soit « venu d’ailleurs », formule elliptique qui rappelle la référence de Daniel MARIE-SAINTE à ceux qui débarquent en Martinique par Boeing entier et auquel nous devrions nos 25% de chômeurs. Disons-le nettement ! Il s’agit de propos racistes qui sont honteux de la part d’un homme assis sur les bancs de l’assemblée nationale française !
Quant au divorce sans pension alimentaire que le président du Conseil Régional entend prononcer contre le Maire de la Ville de Fort-de-France, cela relève du comportement puéril d’un personnage qui est persuadé être propriétaire du Conseil Régional et des fonds publics qui lui sont attribués, qui croit pouvoir tout régenter, tout contrôler et tout décider en lieu et place des Martiniquais.
Que pensent les élus Martiniquais de ce comportement qui sont encore nombreux à soutenir officiellement le passage à l’article 74 et l’élection d’une assemblée unique à la proportionnelle intégrale ?
Que pensent les maires, traités par les 74zistes comme des élus de seconde zone, tout juste dignes de s’occuper des nids de poule et des ordures ménagères et imaginent-ils leur mairie être le théâtre d’une pareille situation ?
Qu’en pensent les conseillers « cantonaux » à qui ont refuse la capacité de voir plus loin que le bout de leur nez, jugés incapables de prendre en compte l’intérêt général et appelés à disparaitre au profit des « Elus sans Electeurs Propres, ainsi les a nommé Edouard DELEPINE, et qui n’auront de compte à rendre qu’à la seule tête de liste. Que pense le RDM dont de nombreux responsables sont maires et conseillers généraux d’une alliance avec un personnage aussi imprévisible et encombrant qu’Alfred MARIE-JEANNE qui n’admet ni question, ni critique !
Le 29 novembre 2009
Karl PAOLO