Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde, des militants d’associations de défense des droits des homosexuels saluent l’autorisation donnée par le Vatican des bénédictions des couples homosexuels, mais disent s’inquiéter de la manière dont le clergé s’en saisira, faute d’avancée sur la doctrine concernant l’homosexualité. La déclaration, quelque peu conservatrice, c’est le moins que l’on puisse dire, des évêques et des vicaires généraux de la Province Ecclésiastique des Antilles et de la Guyane, que l’on pourra lire dans son entier ci-après, participe de ce courant rétrograde. ( Illustration de Jeune Afrique)
Bénédiction des couples homosexuels : « Si ce changement est bienvenu, cela ne rassurera pas les catholiques qui se voient sans cesse rappelés à leur état de péché »
« {…]Ce n’est pas la moindre des réalisations de François que d’avoir donné espoir aux personnes et couples LGBTQIA +, qui expriment la flamme de leur foi comme de leur amour. Le second enjeu, plus fondamental, est la nécessité d’un réel travail théologique ouvrant la voie à un changement doctrinal, et non plus seulement pastoral.
Un nécessaire renouveau de la théologie morale
L’argumentaire catholique, fondé sur la notion de « loi naturelle », ne pourra évoluer que par davantage de dialogue avec les sciences sociales, et par une vraie liberté d’innovation théologique. Or, en matière de morale sexuelle, la parole des théologiennes ou théologiens dans les institutions catholiques est souvent bridée, et ne peut entrer en contradiction directe avec les énoncés du Vatican.
Sans renouveau de la théologie morale, il est impossible d’espérer des avancées. La place des personnes LGBTQIA+, des couples et des familles « irrégulières » selon le Vatican restera soumise à l’épée de Damoclès d’une condamnation morale, et l’Eglise catholique ne pourra prétendre à un vrai visage d’inclusion. »
Déclaration : – Orientation pastorale des évêques et des vicaires généraux de la Province Ecclésiastique des Antilles et de la Guyane concernant la Déclaration : Fiducia supplicans, sur la signification pastorale des bénédictions.
« Bénir, c’est encourager à faire le bien »
En raison des nombreuses questions du grand public, des fidèles et des pasteurs de notre Eglise, suscitées par les articles de presse et les gros titres parus à la suite de la Déclaration « Fiducia Supplicans » de la Congrégation de la Doctrine de la foi, les évêques et les vicaires généraux de la Province Ecclésiastique des Antilles et de la Guyane veulent clarifier les incompréhensions et donner des pistes claires d’application pour nos Eglises locales. Nous invitons, cependant, tout un chacun à une lecture complète et dépassionnée du document.
Tous les catholiques qui se confessent connaissent bien cette formule rituelle et antique par laquelle le pénitent demande au prêtre de l’entendre en confession : « Bénissez-moi mon Père parce que j’ai péché ». Il est évident pour tous que ces bénédictions ne viennent pas bénir les péchés du fidèle, mais au contraire lui donner la force de faire le bien et de se rapprocher de Jésus. Une bénédiction est donc un outil dont dispose l’Eglise pour aider l’Homme à se détourner du mal et à progresser toujours vers le Christ, qui est le Chemin, la Vérité, et la Vie.
A l’instar de nombreuses assemblées d’évêques, nous évêques et vicaires généraux de la Province des Antilles et de la Guyane, déclarons conformément aux principes fondamentaux de Fiducia Supplicans et afin d’éviter toute confusion, que :
– Les ministres de l’Eglise se doivent de bénir, sans condition préalable, toute personne qui demande individuellement une bénédiction spontanée, mais ils ne peuvent conférer de bénédiction à des couples en situation irrégulière ou de même sexe.
– Fidèles à l’Evangile, les pasteurs et les fidèles de l’Eglise s’interdisent de rejeter, de juger ou de discriminer des personnes pour quelque raison que ce soit.
Pour rappel, la déclaration Fiducia Supplicans sur la signification pastorale des bénédictions affirme que « les bénédictions sont un message positif de réconfort, de sollicitude et d’encouragement » (n°19) (…) « pour ceux qui, se reconnaissant indigents et ayant besoin de l’aide (de Dieu), ne revendiquent pas la légitimité de leur propre statut, mais demandent que tout ce qui est vrai, bon et humainement valable dans leur vie et dans leurs relations soit investi, guéri et élevé par la présence de l’Esprit Saint » (n°31). Tout homme, toute femme a droit à la bénédiction de Dieu.
L’Eglise (et aucun chrétien) ne peut se soustraire à cette obligation de Romains 12,14 : « Bénissez, ne maudissez pas. » C’est-à-dire, dites du bien, arrêtez de « malparler ».
La même déclaration de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi déclare aussi explicitement que «sont inadmissibles les rites et les prières qui pourraient créer une confusion entre ce qui est constitutif du mariage, à savoir : une union exclusive, stable et indissoluble entre un homme et une femme, naturellement ouverte à la génération d’enfants, et ce qui le contredit » (n°4) ou encore : « l’Église qui ne reconnait comme légitime que l’union sexuelle dans le mariage n’a pas le pouvoir de donner des bénédictions aux unions entre personnes du même sexe » (n°5).
De même, ladite déclaration interdit formellement de « promouvoir ou de prévoir un rituel de bénédiction des couples en situation irrégulière » (n°38).
+ Mgr David MACAIRE, Archevêque de Fort-de-France et Saint-Pierre
+ Mgr Alain RANSAY, Evêque de Cayenne
+ Mgr Philippe GUIOUGOU, Evêque de Basse-Terre et Pointe-à-Pitre
M. l’abbé Fortuné GIBON, Vicaire Général de Martinique
M. l’abbé Mesmin GAYA, Vicaire Général de Guyane
M. l’abbé Gérard FOUCAN, Vicaire Général de Guadeloupe
Le 19 janvier 2024