— Par Géraldine de Thoré, membre de Culture Égalité
Mercredi soir 9 juillet, dans le cadre du festival culturel de Fort de France un débat était organisé par le Cénacle. Son thème : « La prostitution est-elle un mal nécessaire ? » Un intitulé déjà tendancieux car qui songerait à organiser un débat ayant pour sujet « la violence est-elle un mal nécessaire ? »
Deux sociologues sont venus nous expliquer que la prostitution est un « métier » nécessitant « des compétences » et que ce « métier » remplit une fonction économique pour celles et ceux qui l’exercent – c’est une source de revenu – et une fonction sociale car les hommes peuvent, grâce à cela, soulager leur frustration sexuelle. Après cette véritable « fiche de poste » qui tenait plus de la réunion d’orientation professionnelle que du débat sur la prostitution, les deux intervenants ont vilipendé les féministes, des pudibondes méprisantes qui dénient aux prostituées la possibilité d’exercer librement et par choix « le plus vieux métier du monde ».
Les femmes, membres de l’association féministe martiniquaise « Culture Egalité », tiennent à rappeler à ces défenseurs d’une prostitution « libre » et exercée par des femmes « libérées », que dans leur écrasante majorité ces femmes ne sont ni « libres », ni « libérées ».
D’après les chiffres du ministère de l’Intérieur, 80 à 90 % des prostituées en France exercent sous la contrainte de réseaux mafieux. Entrées illégalement, elles sont sans papiers, donc sans existence, sans protection légale et effectuent entre 15 et 30 « passes » par jour. Les prostituées souffrent également de lésions vaginales graves et de maladies gynécologiques diverses directement liées à leur pratique, les muqueuses vaginales n’ayant pas été conçues pour un usage aussi intensif, d’où le désir est absent. Quant à constituer une source de revenu, la prostitution rapporte en effet des milliards, mais malheureusement pas à celles qui l’exercent.
En d’autres termes, il aurait été plus juste d’intituler le débat : « A t-on le droit de jouir au détriment d’autrui ? ». En effet, là est le vrai visage de la prostitution, à savoir l’exploitation la plus abjecte des femmes pour le plaisir des hommes. Tant que les hommes qui vont voir des prostituées ne comprendront pas qu’en se faisant ils tirent, 8 fois sur 10, leur jouissance d’une traite ignoble; tant que la propagande à laquelle nous venons d’assister à Fort-de-France sera honteusement qualifiée de « débat », alors la prostitution continuera à être « un mal » qui gangrène nos sociétés. Mais est-il nécessaire ? Sûrement pas. Comme tout « mal », il faut le combattre.
Géraldine de Thoré, membre de l’association « Culture Egalité »
12 juillet 2014