— Par Jean-Marie Nol, économiste —–
La crise de la dette concomitante à celle de l’identité française peut être annonciatrice de grands bouleversements politiques dans la société française pour plusieurs raisons. Tout d’abord, l’identité nationale est un élément fondamental de la cohésion sociale, et lorsque celle-ci est remise en question, cela peut engendrer des tensions et des divisions au sein de la société. De plus, les questions liées à l’identité, telles que l’immigration, la diversité culturelle et religieuse, ou encore les tensions socio-économiques, sont souvent au cœur des débats politiques et sociaux en France, et leur résolution peut avoir un impact significatif sur l’avenir du pays. Enfin, les changements budgétaires et financiers, démographiques, les évolutions économiques et les défis liés à la démondialisation contribuent également à façonner l’identité française et peuvent donc entraîner des transformations importantes dans la société.
C’est dans ce contexte sociétal troublé par l’insécurité grandissante que le président Emmanuel Macron joue la carte de la provocation pour attiser le vote d’extrême droite dans le cadre d’une stratégie pernicieuse avec l’affaire de l’annonce abrupte de la possibilité de faire chanter une chanson d’Edith Piaf par Aya Nakamura à l’ouverture des jeux olympiques de Paris. Nous en voulons pour preuve la levée de bouclier chez une majorité des français déjà très en colère contre le pouvoir. En fait, nous approchons de l’heure fatidique d’une motion de censure suivie d’une dissolution de l’Assemblée nationale. C’est là un boulevard ouvert au rassemblement national. Sur le front économique les mauvaises nouvelles s’accumulent. Après l’annonce du déficit de 5,5% sur l’année 2023, l’agence de notation Moody’s juge « improbable » que la France tienne son objectif de réduction du déficit d’ici à 2027. Et les autres grandes agences de notations ne seront pas en reste avec de fortes chances de dégradation de la note AA de la France avec à la clé un alourdissement considérable de la charge de la dette pouvant dépasser les 80 milliards d’euros prévue en 2027. Mais dans ces circonstances qui va payer la note de la crise de la dette ? C’est selon moi et en toute vraisemblance de mon analyse prospective personnelle le rassemblement national. Car pour corser le tout les républicains sont vent debout contre la politique du gouvernement et de leur côté, les syndicats des travailleurs ne comptent pas se laisser faire, aussi pour Emmanuel Macron qui est conscient de l’extrême difficulté à réformer la France, il est hors de question de mettre les français dans la rue, avec une politique d’austérité à la Grecque et des réformes douloureuses.
En somme, il faut bien envisager un scénario machiavélique de crise ouverte au niveau de la politique pour nettoyer les écuries d’Augias. Les journalistes, et les hommes politiques sous estiment gravement Emmanuel Macron et comme quasiment tous les français ne comprennent rien de ce qui se trame à l’Elysée…. cf : la stratégie de Emmanuel Macron dont j’ai fait état récemment, à savoir motion de censure et puis dissolution de l’assemblée avec pour conséquence la majorité au rassemblement national pour les laisser gérer les difficultés et faire le sale boulot avec les conséquences sociales de la remontée du chômage et les effets délétères de la crise de la dette…. Pa konet mové !
On l’aura compris, le sujet de la dette mais aussi de l’immigration devrait animer les débats jusqu’à l’élection européenne puis avec un acmé à la rentrée. Pour Emmanuel Macron, il faut donner au rassemblement national le pouvoir exécutif pour conduire la politique gouvernementale de la France pour le mettre au pied du mur et l’obliger à accomplir les réformes indispensables mais impopulaires et l’user à l’aune de ses propres convictions jusqu’à l’horizon 2027. C’est là une façon d’éliminer virtuellement Marine le Pen de la prochaine élection présidentielle. Et le chemin de Damas du rassemblement national sera la route chaotique de la dette, des déficits budgétaires, de la réforme du modèle social français, de l’immigration et de l’insécurité. Mais pour mieux comprendre la suite des événements, il faut camper le décor de la situation actuelle de la France.
La crise des finances publiques qui marque la fin du mandat d’Emmanuel Macron n’est pas un phénomène inconnu en France. Le dernier budget en équilibre voté en France date de l’année 1974. La dette publique, devenue le principal problème du gouvernement et des prétendants à la prochaine élection présidentielle, pèse lourdement sur le pays, endetté à hauteur de plus de 3 100 milliards d’euros, soit 110 % de la richesse nationale. Comme si le retour de l’inflation n’avait pas eu assez de conséquences fâcheuses sur le pouvoir d’achat, celle-ci est responsable de la remontée des taux, elle-même responsable de la paralysie du marché de l’immobilier, elle-même en partie responsable… de la dégradation du déficit public. En conséquence, l’on table sur des annonces concrètes après les JO. Mais comment faire des économies budgétaires sans affecter le service à la population ? On peut toujours avoir moins de personnels dans nos écoles, moins d’entretien de voirie, moins d’employés municipaux… C’est possible mais pas souhaitable ». Le levier fiscal semble donc être l’unique solution. Pourtant le panel des audits est large – aides aux entreprises, collectivités locales, soutien à la jeunesse, etc. – et beaucoup concernent la sphère sociale – arrêts de travail, absentéisme des fonctionnaires, formation professionnelle, dispositifs médicaux. Il faut dire que les prestations sociales pèsent près de la moitié des 1 600 milliards de dépenses publiques. Et la France y consacre plus d’argent que ses voisins : 32,9% du PIB contre 27,2% en moyenne en Europe, avec des écarts significatifs en matière de retraites, de santé et d’assurance-chômage.
Des domaines au cœur des pistes d’économies envisagées lors de la loi de finances pour 2025.
Cette situation soulève des inquiétudes quant à l’avenir des politiques sociales, notamment en Guadeloupe. Les collectivités locales peuvent craindre légitimement d’être mises à contribution pour combler le déficit du budget de l’État. Cela pourrait signifier une baisse des dépenses et de la qualité des services publics ou une hausse des impôts locaux. Les impôts locaux des Guadeloupéens vont-ils augmenter à cause du déficit de l’État ?
Les collectivités locales craignent d’être mises à contribution pour combler le déficit du budget de l’État. Cela pourrait signifier une baisse des dépenses et de la qualité des services publics ou une hausse des impôts locaux.
Les collectivités locales devront contribuer au « redressement des comptes publics », a déclaré Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, le 6 mars dernier, en exposant aux parlementaires ses pistes pour réduire le déficit public. Ces propos ont déclenché une levée de boucliers chez les responsables territoriaux. « On connaît la règle du jeu : lorsque l’État a des difficultés budgétaires, il fait porter une partie de l’effort nécessaire sur les collectivités locales ».
La mise à contribution des collectivités pourrait prendre plusieurs formes. Il pourrait s’agir d’une baisse des aides à l’investissement, qui porterait atteinte à l’économie et au développement, puisque 70 % des dépenses d’investissement sont réalisées par les collectivités locales. Les économies pourraient aussi se faire par une réduction des dotations globales de fonctionnement des collectivités. Depuis 2014, la baisse cumulée de cette dotation, en euros constants, représenterait un effort de 70 milliards d’euros.
Déjà présente à la fin des mandats présidentiels précédents, la crise des finances publiques a été accentuée par la pandémie, la baisse de la croissance et la remontée des taux d’intérêt. Si le gouvernement actuel et les partis d’opposition prennent conscience de l’urgence de maîtriser les dépenses publiques, cette prise de conscience tarde à se traduire en actions concrètes en Guadeloupe. En effet, les dépenses sociales absorbent aujourd’hui plus de la moitié des dépenses publiques, et plus de 70 % de leur montant vont aux personnes âgées.
Ce modèle semble difficilement soutenable, mais qui ose en discuter en Guadeloupe ?….En un demi-siècle, l’Etat s’est transformé en une gigantesque pompe aspirante et refoulante, la France dépense plus que tous les autres pays et taxe plus que tous les autres pays. Mais cette situation convient en réalité à beaucoup de guadeloupéens, le pays se plaît dans son addiction à la subvention.La seule chose sur laquelle je suis complètement d’accord avec les partisans de l’autonomie, c’est sur la nécessité d’organiser un immense débat sur la manière dont on financera la société avec les nouvelles compétences, ce que l’on paye, ce que l’on ne paye pas, ce qui relève de la juste solidarité et ce qui relève de la responsabilité individuelle et personnelle. Mais le réalisme nous impose de penser que dans ce contexte délétère de crise multiples, un changement vers un statut d’autonomie pour la Guadeloupe ne garantit pas automatiquement que les élus locaux auront les moyens financiers nécessaires pour assumer les nouvelles compétences. Des facteurs tels que la dépendance financière, les ressources propres limitées, des recettes fiscales mouvantes et pas dynamiques, les besoins sociaux spécifiques et les contraintes budgétaires peuvent tous contribuer à créer des défis financiers pour les autorités locales.
Un changement de statut inconsidéré pourrait impliquer une réduction de ces transferts publics laissant ainsi les élus locaux avec moins de ressources pour assumer de nouvelles compétences. Pourquoi cela est-il préoccupant ?
* – Faiblesse des ressources propres : Les régions d’outre-mer, y compris la Guadeloupe ont souvent des économies moins diversifiées et des ressources propres limitées. Elles peuvent donc avoir du mal à générer suffisamment de revenus fiscaux pour financer de manière autonome de nouvelles compétences.
*- Besoins spécifiques : La Guadeloupe fait face à des défis socio-économiques particuliers, tels que le chômage élevé, la pauvreté et les inégalités. Assumer de nouvelles compétences pourrait nécessiter des investissements importants dans des domaines tels que l’éducation, la santé ou les infrastructures vieillissantes, ce qui pourrait dépasser les capacités financières des élus locaux.
*- Contraintes budgétaires : Même avec un changement de statut accompagné du levier de la fiscalité actuelle, les élus locaux pourraient être confrontés à des contraintes budgétaires strictes imposées par les organismes financiers nationaux comme la caisse des dépôts et l’agence française de développement ( AFD) ou les institutions européennes. Cela pourrait limiter leur capacité à emprunter ou à dépenser librement pour financer de nouveaux programmes ou projets.
Pourtant, même en France hexagonale, les promesses politiques passées n’ont pas résolu le problème de l’endettement et de l’insuffisance du financement du modèle social. Alors que les tensions politiques s’intensifient et que les partis dits « de gouvernement » perdent en crédibilité au profit des extrêmes, des voix se lèvent pour exiger une réforme profonde et transparente des finances publiques. Toutefois, cela risquerait bien de se faire au détriment des régions d’outre-mer notamment en raison de la nécessité de financer les transitions écologique et énergétique et de faire face aux conséquences de l’accélération de l’intelligence artificielle et de la robotisation.
La Guadeloupe pourrait également faire face à une destruction massive d’emplois avec l’avènement de l’intelligence artificielle (IA) et la crise de la dette. L’automatisation, qui offre des avantages en termes d’efficacité et de réduction des coûts, pose également des défis majeurs en matière d’emploi et de répartition des richesses. La Guadeloupe doit donc repenser son modèle économique pour faire face à ces défis.Face à ces enjeux, il est impératif de repenser les politiques sociales et économiques en Guadeloupe. Plutôt que d’attendre une croissance hypothétique pour résoudre les problèmes budgétaires, il est nécessaire de mettre en place des réformes visant à rendre les dépenses publiques plus efficaces et la fiscalité moins destructrice pour l’activité économique. En fait, la Guadeloupe se trouve à un moment crucial de son histoire, confrontée à des défis économiques et sociaux majeurs.
Ainsi une réduction des dépenses sociales dans le cadre d’une politique de rigueur budgétaire pourrait avoir des conséquences néfastes sur le plan social, économique et politique, en compromettant le succès d’un éventuel changement institutionnel pouvant aller à l’encontre du bien-être de la population et surtout des publics les plus vulnérables. Il est impératif que les autorités locales et nationales travaillent ensemble pour trouver des solutions durables et équitables, comme l’émergence d’un nouveau modèle économique et social avec une habilitation générale dans le cadre de l’article 73 de la constitution, afin de garantir un avenir économique et financier moins contraignant pour tous les Guadeloupéens.Il s’agit de produire mieux, par le progrès technologique et la science, de réaliser des percées dans les domaines de pointe et de produire plus pour porter l’économie.Le temps de la mondialisation heureuse pour certains privilégiés est fini . Il faut désormais «montrer les dents » aux puissances monopolistiques et oligopolistiques et se battre pieds à pieds pour protéger les intérêts économiques et sociaux de la Guadeloupe.
» Pousyè paka lévé san van «
Il n’y a pas de fumée sans feu….
Jean-Marie Nol, économiste