— Par Jean-Marie Nol, économiste —
Depuis le dernier congrès, le débat sur la fusion du département et de la région en Guadeloupe fait tâche au sein de la société civile et des sphères politiques. Cette proposition, loin de faire l’unanimité, suscite des inquiétudes quant à ses conséquences sur l’efficacité des politiques publiques et sur l’économie de l’archipel.L’un des principaux arguments avancés contre cette fusion réside dans l’absence manifeste d’économies d’échelle. D’ailleurs, plusieurs responsables politiques mettent en avant l’échec de cette fusion en Martinique et en Guyane qui selon eux n’a résolu aucun problème. La perception selon laquelle la fusion du département et de la région en Martinique pour former la collectivité territoriale unique est un échec découle de plusieurs facteurs:
1-Difficultés de gouvernance : La mise en place d’une nouvelle structure administrative complexe a été confrontée à des difficultés de gouvernance. La gestion des compétences et des ressources entre l’ancien département et la région fusionnés peut être source de tensions et de conflits internes.
2-Problèmes financiers : La fusion n’a pas nécessairement entraîné les économies d’échelle escomptées. Au contraire, certains estiment que les coûts de fonctionnement de la collectivité territoriale unique ont augmenté, notamment en raison de la nécessité de mettre en place de nouvelles structures administratives et de s’adapter à un cadre législatif différent.
3-Défis d’intégration : L’intégration des politiques publiques et des services entre l’ancien département et la région peut se révéler complexe et nécessiter du temps. Des difficultés peuvent survenir lors de la coordination des actions dans des domaines tels que l’éducation, la santé, ou le développement économique.
4-Attentes non satisfaites : Les attentes initiales en termes d’amélioration de la gouvernance, de la gestion des ressources, et du développement économique n’ont pas été pleinement satisfaites. Certains citoyens peuvent donc percevoir la fusion comme un échec si elle n’a pas permis d’apporter les changements positifs espérés.Cependant, il est important de noter que cette perception peut varier selon les points de vue et que certains peuvent considérer la fusion comme un processus en cours qui nécessite plus de temps pour produire ses effets positifs , mais d’autres considérent que le fait même de demander maintenant à l’État un statut d’autonomie spécifique à la Martinique est un aveu d’impuissance et que les leçons de l’échec sont patents. En effet, selon de nombreux experts, la consolidation des deux entités administratives ne garantirait pas une réduction significative des dépenses publiques, contrairement à ce qui est avancé par ses partisans. Au contraire, certains craignent que cette fusion n’entraîne une bureaucratisation accrue et une dilution des responsabilités, engendrant ainsi des coûts supplémentaires pour les contribuables guadeloupéens.
Par ailleurs, l’impossibilité d’une réelle synergie entre les politiques publiques départementales et régionales constitue un autre motif d’inquiétude notamment pour ce qui concerne la gestion des dépenses sociales en voie d’augmentation dans les prochaines années et donc qui nécessite une gestion spécialisée et spécifique au sein d’une seule entité dédié uniquement au social . En effet, les spécificités des compétences attribuées à chacune de ces entités pourraient entraver la mise en œuvre d’une stratégie cohérente et efficace de la lutte contre les inégalités et le développement territorial. Les partisans de la fusion affirment que celle-ci permettrait de rationaliser les actions publiques et de coordonner plus efficacement les politiques économiques, sociales et environnementales. Cependant, de nombreux observateurs doutent de la capacité de la nouvelle gouvernance fusionnée à concilier les intérêts divergents des différentes parties prenantes.En outre, la question de l’identité culturelle et politique de la Guadeloupe se pose avec acuité dans ce débat. Certains défenseurs de l’autonomie départementale redoutent que la fusion avec la région ne dilue la spécificité guadeloupéenne au sein d’une entité administrative plus vaste, où les intérêts des autres entités administratives tels les EPCI pourraient primer. Cette crainte alimente les tensions entre partisans de l’autonomie locale et partisans d’une intégration régionale plus poussée dans le cadre du droit commun de l’article 73 de la constitution avec en sus par rapport à la situation actuelle une habilitation générale pour permettre de voter des lois pays. A noter que le dispositif d’adaptation et d’habilitation particulière existe déjà dans la législation actuelle mais est inopérante car trop lourde dans son application. .En somme, la fusion du département et de la région en Guadeloupe soulève de nombreuses interrogations quant à son efficacité économique, à sa cohérence politique et à son impact sur l’identité guadeloupéenne. Si certains y voient une opportunité de modernisation et de rationalisation de l’administration publique, d’autres redoutent les conséquences néfastes d’une telle réforme. Dans ce contexte, le débat reste ouvert et promet d’animer la scène politique guadeloupéenne pour les mois à venir lors du prochain congrès des élus prévu en juin. En l’occurrence,en l’état actuel de l’opinion publique Guadeloupéenne l’assemblée unique s’avère être une très mauvaise idée.
« A pa ba pinèz an ké jeté payas an-mwen ».
Traduction : Ce n’est pas pour des punaises que je vais jeter ma paillasse.
Moralité : Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain…
Jean marie Nol économiste