Une nouvelle réalisation majestueuse de Caruge & Cauquil est visible sous le pont de la RN1 à Case Navire sur la commune de Schœlcher. Ces deux-là sont en train de réaliser une œuvre urbaine qui a toutes les chances de faire date. Il suffit de voir le respect dont leurs réalisations sont l’objet, épargnées par les graffitis, les tags, les affiches électorales et autres réclames publicitaires pour constater qu’elles sont accueillies et intégrées par les populations comme étant partie prenante d’une culture partagée. Nous l’avions déjà remarqué. Voilà un nouveau lieu de promenade, de visite. Pour la beauté offerte : merci.
Ils ont bien voulu répondre à quelques questions de Madinin’Art .
Quelle est l’origine de cette réalisation?
C’est le service développement de la ville de Schœlcher qui a conçu le projet « Art dans la ville ». Pour cela un appel à projet à été lancé et un certain nombre d’artistes sélectionnés pour la conception et la réalisation de pièces artistiques dans l’espace public.
Quelle thématique choisie et pourquoi?
Un village d’indiens caraïbes se situait autrefois le long de la rivière à l’emplacement de Case Navire. C’est ce qui a décidé les commanditaires de demander aux artistes en charge des emplacements du mur du stade de la ville et du pont de Case Navire de travailler sur ce thème de façon à rappeler au passant quelle fut la vie de ce lieu avant la colonisation.
Pourquoi trois couleurs, jaune rouge et bleu et des nuances de gris?
Le fond , couleur dominante de la réalisation, est un ocre rouge évoquant la terre, l’argile rouge , matériau de base des poteries que les amérindiens utilisaient également pour enduire leur corps. Cette teinte évoque également le roucou dont le fruit aux graines rouges était utilisé en cuisine ainsi que pour le soin de la peau.
La gamme principale est constituée de rouge, noir et blanc, cette trilogie chromatique est culturellement celle de la théâtralisation. Notre choix était de présenter des personnages immobiles , dignes , fixant le spectateur, géants verticaux, gardiens de mémoire.
Le bleu des adornos et le jaune des éléments graphiques servent de tonique en venant exalter le rouge par un contraste maximal.
Quel type de peinture?
Ce type de réalisation implique l’utilisation de peintures et de produits adaptés à l’extérieur et aux intempéries . Nous utilisons donc des produits spécifiques pour les façades exposées.
Quel partage du travail entre vous?
Nous travaillons de concert, de la conception à la réalisation comme une équipe de scénariste sur un film. L’important est le projet et non pas de se souvenir de qui est à l’origine de quoi. Même si nous portons un soin particulier à la forme de nos projets qui prennent place dans la rue, le plus important pour nous en reste le fond.
Combien de temps pour la conception? la réalisation?
Nous avons commencé à travailler sur ce projet au mois de janvier dernier. Après une première maquette nous avons dû retravailler le projet à la demande des commanditaires pour l’adapter aux contraintes de l’espace public et ne choquer personne par la nudité des amérindiens.
Le pont servant de support à la réalisation étant à proximité des écoles, il nous a été demandé d’apporter une dimension pédagogique au projet en évoquant le mode de vie et le type d’activité des populations ayant vécu sur le site.Pour cela nous avons choisi d’insérer des dessins et croquis de chroniqueurs de l’époque que nous avons traités sous forme de filigranes jaunes.
La réalisation proprement dite, entre la préparation des supports, la pose des personnages et des motifs, les produits de protection, c’est étalée sur huit semaines.
Au total six mois auront été nécessaires pour aller de l’idée au résultat final.