Le premier ministre Jean Castex parle d’«une publication révoltante». Le journal répond qu’il s’agit «d’une fiction» et s’excuse.
Représentation «abjecte et inacceptable», «apologie du racisme» : la «politique fiction» du magazine conservateur Valeurs Actuelles sur la députée LFI Danièle Obono, dépeinte en esclave, a suscité samedi 29 août une vague de condamnations, jusqu’à Emmanuel Macron.
Dans ce récit de sept pages publié cette semaine, la députée de Paris «expérimente la responsabilité des Africains dans les horreurs de l’esclavage» au XVIIIe siècle, selon la présentation qu’en fait le magazine. Des dessins de Danièle Obono, collier en fer au cou, accompagnent ce «roman de l’été».
Selon les services de l’Elysée cités par BFMTV, le chef de l’État a appelé la député pour condamner la publication du journal.
«Cette publication révoltante appelle une condamnation sans ambiguïté», a tweeté plus tôt Jean Castex, qui «partage l’indignation de la députée» et «l’assure du soutien de l’ensemble du gouvernement». «La lutte contre le racisme transcendera, toujours, tous nos clivages», a ajouté le chef du gouvernement.
«On est libre d’écrire un roman nauséabond, dans les limites fixées par la loi. On est libre aussi de le détester. Moi je le déteste et suis (aux) côtés» de la parlementaire, a écrit pour sa part le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti.
«Le racisme est un mal nocif. Il détruit. Il est un délit», a aussi rappelé la ministre déléguée à la Ville Nadia Hai sur le réseau social. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a lui écrit vouloir défendre «les valeurs de la République française qui doivent rester au coeur de notre vie politique».
Réprouvant vivement un «cortège de haines, comme l’ont déjà expérimenté beaucoup de responsables politiques noirs ou d’origine maghrébine ces dernières années», l’association SOS Racisme a indiqué dans un communiqué étudier «les suites judiciaires envisageables».
Dès vendredi, Danièle Obono avait évoqué sur Twitter une «merde raciste dans un torchon». «L’extrême-droite, odieuse, bête et cruelle. Bref, égale à elle-même», avait-elle ajouté.
Le leader de LFI Jean-Luc Mélenchon s’était élevé contre un «harcèlement nauséabond» envers la députée. Mais, a répondu le magazine d’opinion par le même canal, «il s’agit d’une fiction mettant en scène les horreurs de l’esclavage organisé par des Africains au XVIIIe siècle», «terrible vérité que les indigénistes ne veulent pas voir».Sur BFMTV, Tugdual Denis, le directeur-adjoint de la rédaction du journal, est allé plus loin : «On est anti-conformiste, on est pétris de bonne volonté, nous n’avons aucun problème avec elle en tant que personne (…) on s’excuse à titre personnel, je regrette qu’on ait pu penser qu’on soit raciste». «Si je l’avais en face de moi aujourd’hui, je lui dirais ‘pardon, je suis désolé de vous avoir blessée’», a-t-il ajouté
Le président de l’Assemblée nationale Richard Ferrand a dit être aux cotés de l’élue. «Tout mon soutien personnel et celui de l’Assemblée nationale face à ces abjections», a-t-il twitté, suivi par de nombreux députés de tous bords :
Un responsable du Rassemblement national, Wallerand de Saint-Just, a condamné sur Twitter la publication, «d’un mauvais goût absolu»: «le combat politique ne justifie pas ce type de représentation humiliante et blessante d’une élue de la République», selon lui.
La députée européenne Fabienne Keller dénonce «une publication dégoûtante et indique d’un journal d’opinions, qui va à l’encontre des valeurs et principes de la République» :Depuis Malo-les Bains (Nord) lors de la journée d’été du PCF, son numéro un Fabien Roussel a ainsi épinglé un écrit «particulièrement scandaleux».
Source : Le Figaro avec AFP