La constitutionnalisation de l’Etat d’urgence votée dans une Assemblée aux trois quarts vide

etat_d_urgence-3Les députés français ont adopté lundi soir par 103 voix contre 26 l’article premier du projet de loi qui inscrit dans la Constitution l’état d’urgence. Ils s’attaquent ce mardi à l’examen de l’article 2 qui étend la déchéance de la nationalité française…

Ce premier volet du projet de loi constitutionnelle prévoit que l’état d’urgence sera « décrété en Conseil des ministres » soit « en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public », soit en cas de « calamité publique » (événements naturels).
Comme actuellement, seul le Parlement pourra proroger l’état d’urgence au-delà des douze jours initiaux, par une loi en fixant la durée.
Les amendements votés

Avec l’avis favorable du gouvernement, les députés ont voté peu avant un amendement de l’UDI pour restreindre la durée de prorogation à une période maximale de quatre mois, renouvelable après un vote du Parlement. Le Premier ministre, selon lequel cette durée « ne repose pas sur des éléments précis », a jugé que cette borne de quatre mois « ne modifie pas fondamentalement l’équilibre par rapport à ce qui a été voté de trois mois (pour l’état d’urgence en vigueur ndlr) et donne un peu plus de marge ».
Les députés ont aussi ajouté dans le texte de révision constitutionnelle le principe du contrôle parlementaire de la mise en oeuvre de l’état d’urgence, souhaité par plusieurs groupes politiques, mais jugé superflu par certains députés LR. Contre l’avis du gouvernement et de la droite, les députés ont aussi voté un amendement socialiste prévoyant que l’Assemblée nationale se réunit de plein droit et ne peut être dissoute pendant l’état d’urgence. Mais ils ont rejeté l’inscription de la compétence du juge administratif quant aux mesures de police administrative, le gouvernement considérant que c’est sa compétence naturelle. Les parlementaires ont aussi refusé qu’une loi organique fixe les mesures de police administrative autorisées.
Les élus Front de gauche, mais aussi des écologistes, des socialistes « frondeurs », ainsi que quelques députés Les Républicains tels Pierre Lellouche et Bernard Debré ont en vain cherché à supprimer cet article 1er, synonyme de « recul de nos libertés », selon les mots de Noël Mamère (groupe écologiste).
Vers la déchéance de nationalité

Les députés ont ensuite engagé l’examen de l’article 2 qui étend la déchéance de la nationalité française des personnes condamnées pour terrorisme et qui est beaucoup plus contesté, à la fois dans la majorité et dans l’opposition. Cet article, dont l’examen se poursuivra mardi, est accompagné d’un projet de loi ordinaire qui sera débattu ultérieurement pour préciser sa portée.
A la demande du groupe PS, ce projet de loi ordinaire supprimera toute référence à l’interdiction de l’apatridie — ce qui signifie un retour « à la déchéance pour tous », binationaux et mononationaux — et précisera que cette déchéance sera une peine « complémentaire » prononcée le cas échéant par un juge antiterroriste ou pénal et non par l’autorité administrative.
Les députés se prononceront mercredi après-midi par un vote solennel sur l’ensemble du projet de loi que le Sénat examinera à son tour vers la mi-mars.
Pour être définitivement adoptée, toute révision constitutionnelle doit être d’abord votée dans les mêmes termes par les deux assemblées puis soumise au Parlement réuni en Congrès à Versailles où la majorité nécessaire est des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Analyse du scrutin n° 1224
Deuxième séance du 08/02/2016

Scrutin public sur l’ensemble de l’article Premier du projet de loi constitutionnelle de protection de la Nation (première lecture).

Pour l’adoption : 103Contre : 26Abstention : 7

Synthèse du vote

Nombre de votants : 136

Nombre de suffrages exprimés : 129

Majorité absolue : 65

Pour l’adoption : 103

Contre : 26

L’Assemblée nationale a adopté.

Groupe socialiste, républicain et citoyen (287 membres)

Pour: 96

  • Ibrahim Aboubacar
  • François André
  • Christian Assaf
  • Jean-Marc Ayrault
  • Guillaume Bachelay
  • Dominique Baert
  • Guy Bailliart
  • Gérard Bapt
  • Frédéric Barbier
  • Delphine Batho
  • Laurent Baumel
  • Jean-Marie Beffara
  • Karine Berger
  • Gisèle Biémouret
  • Erwann Binet
  • Patrick Bloche
  • Christophe Borgel
  • Florent Boudié
  • Brigitte Bourguignon
  • Émeric Bréhier
  • Gwenegan Bui
  • Jean-Claude Buisine
  • Alain Calmette
  • Christophe Caresche
  • Marie-Arlette Carlotti
  • Jean-Yves Caullet
  • Marie-Anne Chapdelaine
  • Valérie Corre
  • Pascale Crozon
  • Seybah Dagoma
  • Guy Delcourt
  • Pascal Demarthe
  • Françoise Descamps-Crosnier
  • Fanny Dombre-Coste
  • Sandrine Doucet
  • Françoise Dubois
  • Anne-Lise Dufour-Tonini
  • Françoise Dumas
  • Laurence Dumont
  • Yves Durand
  • Sophie Errante
  • Marie-Hélène Fabre
  • Olivier Faure
  • Hugues Fourage
  • Valérie Fourneyron
  • Jean-Louis Gagnaire
  • Hélène Geoffroy
  • Geneviève Gosselin-Fleury
  • Estelle Grelier
  • Élisabeth Guigou
  • Mathieu Hanotin
  • Joëlle Huillier
  • Françoise Imbert
  • Michel Issindou
  • Serge Janquin
  • Henri Jibrayel
  • Régis Juanico
  • Philippe Kemel
  • Chaynesse Khirouni
  • Bernadette Laclais
  • Anne-Christine Lang
  • Colette Langlade
  • Jean Launay
  • Jean-Luc Laurent
  • Jean-Yves Le Bouillonnec
  • Gilbert Le Bris
  • Anne-Yvonne Le Dain
  • Dominique Lefebvre
  • Christophe Léonard
  • Bruno Le Roux
  • Martine Lignières-Cassou
  • Audrey Linkenheld
  • Lucette Lousteau
  • Marie-Lou Marcel
  • Philippe Martin
  • Martine Martinel
  • Frédérique Massat
  • Patrick Mennucci
  • Hervé Pellois
  • Sébastien Pietrasanta
  • Élisabeth Pochon
  • Pascal Popelin
  • Michel Pouzol
  • Régine Povéda
  • Joaquim Pueyo
  • François Pupponi
  • Valérie Rabault
  • Dominique Raimbourg
  • Marie-Line Reynaud
  • Denys Robiliard
  • Gilles Savary
  • Sylvie Tolmont
  • Jean-Louis Touraine
  • Cécile Untermaier
  • Jean Jacques Vlody
  • Paola Zanetti

Contre: 8

  • Sylviane Alaux
  • Jean-Pierre Blazy
  • Fanélie Carrey-Conte
  • Geneviève Gaillard
  • Benoît Hamon
  • Barbara Romagnan
  • Gérard Sebaoun
  • Suzanne Tallard

Abstention: 3

  • Kheira Bouziane-Laroussi
  • Catherine Coutelle
  • Pierre-Yves Le Borgn’

Non-votants: 3

    MM. Claude

Bartolone

     (Président de l’Assemblée nationale), David

Habib

     (Président de séance) et Jean-Jacques

Urvoas

     (Membre du gouvernement).

Groupe Les Républicains (196 membres)

Pour: 1

  • Jean-Claude Bouchet

Contre: 6

  • Bernard Debré
  • Serge Grouard
  • Pierre Lellouche
  • Gilles Lurton
  • Philippe Armand Martin
  • Guy Teissier

Abstention: 3

  • Éric Ciotti
  • Georges Fenech
  • Guillaume Larrivé

Groupe de l’union des démocrates et indépendants (29 membres)

Contre: 2

  • Meyer Habib
  • Philippe Vigier

Groupe écologiste (18 membres)

Pour: 3

  • Denis Baupin
  • Barbara Pompili
  • François de Rugy

Contre: 6

  • Laurence Abeille
  • Brigitte Allain
  • Isabelle Attard
  • Danielle Auroi
  • Cécile Duflot
  • Jean-Louis Roumégas

Abstention: 1

  • Véronique Massonneau

Groupe radical, républicain, démocrate et progressiste (18 membres)

Pour: 3

  • Gérard Charasse
  • Paul Giacobbi
  • Roger-Gérard Schwartzenberg

Groupe de la gauche démocrate et républicaine (15 membres)

Contre: 3

  • Jean-Jacques Candelier
  • André Chassaigne
  • Nicolas Sansu

Non inscrits (11 membres)

Contre: 1

  • Philippe Noguès