DECRYPTAGE – Promesse de campagne puis mesure inscrite dans le plan pour la Bretagne, la ratification par la France de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, en souffrance depuis des années, pourrait bientôt se concrétiser, comme l’a précisé vendredi Jean-Marc Ayrault.
Vendredi, à l’occasion de la signature définitive du pacte d’avenir pour la Bretagne, Jean-Marc Ayrault a apporté une précision d’importance quant à la préservation de la langue bretonne promise dans ce plan : le Parlement va examiner, au plus vite, la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Selon le député PS du Finistère Jean-Jacques Urvoas, également président de la Commission des Lois, une proposition de loi pourrait être examinée à cet effet « le 20 janvier prochain sans doute ».
Qu’est-ce que cette charte?
Il s’agit d’une convention initiée par le Conseil de l’Europe, la principale organisation de défense des droits de l’Homme sur le continent (à ne pas confondre avec le Conseil européen qui réunit les chefs d’Etat de l’Union européenne). Adopté par les premiers signataires en 1992, ce texte vise à favoriser l’emploi des langues régionales ou minoritaires dans toute l’Europe (et pas seulement l’UE). Une partie non négligeable du continent ne l’a pas signé (la Belgique, les pays baltes, la Grèce, la Bulgarie ou encore le Portugal). Certains dirigeants l’ont toutefois signé mais leur Parlement ne l’a pas ratifié. C’est le cas de la Russie ou de la France, dont le gouvernement Jospin a paraphé la Charte en 1999 sans ne l’avoir jamais présenté à l’Assemblée nationale.
Pourquoi n’est-elle toujours pas ratifiée?
La France doit donc ratifier cette chartre depuis quinze ans mais fait face à un problème juridique. En effet, le Conseil constitutionnel a expliqué en 1999 qu’une ratification de la Charte était contraire à son article 2 affirmant que « la langue de la République est le français ». Si aucune réforme constitutionnelle n’a été enclenchée, c’est aussi à cause d’une véritable opposition politique à ce projet. Pendant sa campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy a ainsi clairement écarté tout projet de ratification : « Chacun peut, s’il le veut, pratiquer librement la langue de sa région en France, et c’est très bien. Alors quel besoin de mêler la Constitution à cette affaire? »
En 2008, dans le cadre de sa réforme constitutionnelle, Nicolas Sarkozy a tout de même accepté d’inclure à l’article 75-1 l’appartenance des langues régionales « au patrimoine de la France ». Mais il a redit, quatre ans plus tard lors de sa seconde campagne présidentielle, son opposition à tout projet de ratification : « La Charte des langues régionales a pour but (…) de reconnaître des droits linguistiques à toutes les minorités et de les placer sous le contrôle d’une Cour européenne qui jugera sans tenir compte de notre histoire nationale et de notre tradition républicaine. » Une fois n’est pas coutume, Jean-Luc Mélenchon était d’accord avec lui : la charte « nuit à l’unité et à l’indivisibilité de la République en ce sens qu’ils créent des droits particuliers pour des locuteurs d’une langue particulière », expliquait en 2012 celui qui était candidat du Front de gauche.
Pourquoi Hollande ne l’a pas ratifié dès 2012?
Le 56e engagement du candidat François Hollande promettait la ratification de cette convention.
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