— Par Max Dorléans (GRS) —
S’il est effectif que l’émission KTKZ (Kolé Tèt, Kolé Zépol, réalisée entre RCI et Pôle emploi) a permis depuis son existence, à quelques individus (jeunes souvent) en galère depuis un certain temps, de décrocher un emploi sur ce marché non officiel des offres d’emplois, il reste cependant que cette émission n’est rien d’autre qu’une forme de loterie, où le gagnant principal est le patronat.
Qu’y a-t-il d’autre à cette émission que deux catégories de joueurs. D’un côté le patronat, les employeurs potentiels. De l’autre, l’immense majorité de jeunes et moins jeunes, à la recherche d’un emploi, avec peu de chance d’en obtenir un, malgré pour bon nombre d’entre eux/elles, des diplômes et des compétences bien affirmées.
Sauf que ici, dans cette loterie, dans ce jeu et comme dans tous les jeux d’argent de notre société (Loto, PMU, millionnaire…), les vrais gagnants ne sont pas le ou les quelques heureux élus, mais ceux que l’on ne voit pas, les grands actionnaires des sociétés de jeux de hasard ( ?) et d’argent. En l’occurrence ici, le patronat qui trouve, en piochant dans le panier des demandeurs d’emploi en concurrence les uns avec les autres, le salarié qui lui semble le mieux convenir à sa demande. Et symétriquement, les perdants sont l’immense majorité des joueurs – ici la masse des demandeurs d’emploi – qui vont continuer d’être dans l’insatisfaction, la galère et l’amertume.
Ne nous trompons pas. Avec ou sans Pole Emploi, avec sous sans KTKZ, c’est le système lui-même qui, en plus d’être inhumain, est par nature injuste, car il ne garantit pas à tous et toutes un travail ! A ce stade, KTKZ ne fait qu’apporter à la démonstration de l’inhumanité du système.
En effet, que dire d’une société qui prétend offrir « liberté, égalité et fraternité » à l’ensemble de ses membres, alors qu’elle n’est en réalité qu’un jeu de dupes, une société où de façon permanente, on a d’un côté une minorité d’éternels gagnants, le patronat, et de l’autre, une immense majorité de perdants, à savoir tous ceux et toutes celles qui attendent le bon vouloir de ce dernier pour avoir un emploi, et donc pour être légalement exploités !
Car, sans l’immense majorité d’éternels perdants, source de la richesse des gagnants (patronat), cette société capitaliste ne fonctionnerait pas. Et c’est la raison pour laquelle, des centaines de milliards sont distribués par Macron et cie au patronat pour maintenir le système, pour éviter les faillites d’entreprises en cascade, les transports doivent fonctionner et permettre ainsi (même entassés les uns contre les autres) que les gens aillent travailler, les écoles doivent rester ouvertes, permettant aux parents de rejoindre leur poste de travail ! Le capitaliste a donc besoin du salarié pour créer de la valeur qu’il accapare en quasi-totalité, et le salarié/e est condamné, dans ce système, à vendre sa force de travail pour en retirer un (médiocre) salaire, base de l’origine du profit de son patron.
Alors, cessons d’être les éternels dupes, les sacrifié/es de cette société, pour en devenir les maîtres et les décideurs, ceux qui ne vont pas attendre que leur numéro sorte pour avoir un emploi, et une vie souvent peu satisfaisante. Etre enfin celles et ceux qui devront décider des productions utiles, et celles inutiles et nuisibles.
Il est plus que temps, en cette période de crise de notre société qui voit le cumul d’une série de crises (sociale, économique, écologique, politique, démocratique, sanitaire…) non seulement de fustiger ce système et cette société capitaliste inhumaine et injuste, mais de chercher, non pas l’amender, mais à la transformer sur la base de son bilan en tous points catastrophique, et lui opposer un autre modèle de société.
Soyons lucides. Si l’épidémie de Covid 19 a effectivement mis en relief la nuisance du système, elle n’en est pas à l’origine. Elle l’a effectivement accéléré. Il suffit de voir que depuis quelques temps, que l’économie tourne au ralenti, que nombre de petites et moyennes entreprises sont en difficulté, que les licenciements ont commencé à se multiplier, – même si on est encore loin de leur pic ! – que les CDD constituent depuis quelques temps, avec l’Interim, la forme dominante des embauches, que les départs à la retraite ne sont pas remplacés, que les plans de sauvegarde de l’emploi augmentent sans même parler des sociaux …Toutes choses qui n’ont rien à voir avec un Covid qui n’existait pas. Mais par contre, des indices montrant que tous les ingrédients d’une nouvelle et majeure crise (après celle de 2008-2009) étaient déjà là, et que celle-ci menaçait d’éclater à plus ou moins brève échéance avec une ampleur décuplée (fin 2020, 2021,2022 ?).
Le bilan catastrophique du système capitaliste – avec sa logique du profit comme valeur suprême – est sous nos yeux. A nous par contre d’en tirer les seules conclusions qui vaillent, à savoir, qu’il faut l’éradiquer, ne pas chercher à l’aménager (ce qu’ont indiqué vouloir faire les différents gouvernements socialistes), et lui substituer un modèle de société pensé par nous-mêmes, et pour nous-mêmes. Pour l’immense majorité.
Max Dorléans (GRS)