Près de quarante ans après ses débuts, le groupe antillais est toujours victime de clichés…
— Par Benjamin Chapon —
« Ka sa yé misyé bobo !! Hahaha… »
« Hé ben après la Compagnie Créole, le zouk c’est ta nouvelle passion ! »
« Après David Bowie et Prince, c’est l’année des nécros pour toi. »
Les réactions de certains (tous) collègues à l’annonce de la préparation d’un article sur Kassav’ ont immédiatement validé l’angle suivant : l’œuvre du groupe Kassav’ est tristement méconnue en France métropolitaine. Le groupe antillais donne une série de trois concerts au Zénith de Paris du 27 au 29 mai 2016 . Kassav’ y détient le record du nombre de passage (60 depuis 1985) et de spectateurs (400.000).
Groupe super star des années 1980, Kassav’ est, en métropole, souvent confondu avec Zouk Machine (« Ka sa yé misyé bobo !! » par exemple, c’est dans Maldon…) ou la Compagnie Créole, et a été unanimement soldé comme « groupe ringard » en même temps qu’explosait la bulle spéculative des musiques exotiques exploitée à outrance par TF1 au tournant des années 1980-1990.
Et pourtant, les trois concerts de Kassav’ affichent complet. Et pourtant, le groupe termine là une énième tournée mondiale qui l’a conduit du Japon aux Etats-Unis. Et pourtant, aux Antilles, Kassav’ est un groupe légendaire.
Zouk = Antilles = Rhum = Blancs bourrés qui dansent mal
« Tout le monde écoute et respecte Kassav’ aux Antilles, confirme Jaj, chanteur martiniquais installé à Paris depuis 2005. C’est sûr qu’ici en métropole, on connaît mal. » Pire, d’après Tibo, ancien organisateur de concerts et soirées zouk à Paris, « Kassav’ a subi une forme de double racisme. Dans les années 1980, il y a eu une soif de musiques africaines. Tout ce qui venait du Mali, du Sénégal… ça marchait fort. Mais les musiques noires antillaises, on les a aussitôt assimilés à des musiques bas de gamme, pour faire la fête. On a reporté sur les Antilles le racisme qui s’exprimait moins sur l’Afrique, grâce aux mouvements antiracistes. Tout ça n’a pas empêché un certain succès mais aujourd’hui, ce qu’il en reste, c’est une vision déformée de ce qu’est vraiment Kassav’. » Tibo affronte encore aujourd’hui des sourires narquois quand il annonce sa passion du zouk…
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