— Texte par : Sonia Dridi—
Karine Jean-Pierre est porte-parole adjointe de la Maison Blanche. Elle a marqué l’histoire en mai 2021, en devenant la première femme ouvertement homosexuelle – et la deuxième femme noire – à prendre place, face aux journalistes, sur l’estrade de la salle de presse officielle de la présidence. Elle revient sur son enfance, la crise des migrants haïtiens aux États-Unis et la récente crise diplomatique avec la France dans une interview exclusive accordée à France 24.
Elle briefe régulièrement les journalistes à bord d’Air Force One ou depuis le podium de la Maison Blanche. Karine-Jean Pierre, 44 ans, est la porte-parole adjointe de l’administration Biden, la « numéro 2 » de Jen Psaki. Première femme ouvertement homosexuelle – et deuxième femme noire – à prendre place sur l’estrade de la salle de presse « James S. Brady », elle incarne la diversité mise en avant par l’administration Biden.
En 2016, alors porte-parole nationale de l’organisation MoveOn, elle avait déclaré : « Je suis tout ce que Donald Trump déteste : femme, noire, gay et maman. »
Karine Jean-Pierre est née à Fort-de-France, en Martinique, de parents originaires d’Haïti qui ont fui la dictature Duvalier. Elle a passé quelques années à Paris, puis est arrivée avec sa famille aux États-Unis à l’âge de 5 ans. Fille d’un chauffeur de taxi et d’une aide-soignante à domicile, elle a grandi dans le Queens, à New York.
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Dans ses Mémoires « Moving Forward : A Story of Hope, Hard Work, and the Promise of America » (2019), elle se confie sur son adolescence difficile. Abusée sexuellement, elle a longtemps souffert de dépression et a fait une tentative de suicide. Elle revient également sur son engagement politique, des élections locales new-yorkaises à la campagne de Barack Obama.
Dans un entretien exclusif accordé à France 24, elle revient sur son parcours, sur la récente crise des migrants haïtiens entre le Mexique et les États-Unis, ainsi que sur la crise diplomatique avec la France.
France 24 : Votre histoire reflète le rêve américain, qu’est-ce que cela vous inspire ?
Karine Jean-Pierre : Je pense que c’est ce que représentent les États-Unis : la possibilité d’arriver ici comme immigrée et de réaliser le rêve américain. Cela fait partie de l’ADN de ce pays. Mes parents sont nés à Haïti, je suis née en Martinique. Ils sont arrivés ici sans rien. Donc, de voir où je suis, trente ans après, de pouvoir se dire « Wow, notre enfant a réussi ! », c’est vraiment quelque chose de particulier. C’est quelque chose auquel je pense tous les jours à la Maison Blanche.
Dans « Moving forward », vous parlez de vos problèmes psychologiques, du fait que vous avez été abusée sexuellement dans votre enfance, que vous avez fait une tentative de suicide et vous mentionnez aussi votre homosexualité. Pourquoi était-ce important pour vous d’aborder ces sujets-là ?
J’ai écrit ce livre à un moment où les choses étaient vraiment difficiles, pas seulement aux États-Unis, mais dans le monde entier. C’était un moment où je me suis dit qu’il était important d’être honnête. Je voulais utiliser ma voix pour aider les gens.
Pourquoi avez-vous décidé de faire de la politique ?
Je voulais changer les choses, faire une différence dans le monde. J’ai étudié au départ pour devenir médecin. Beaucoup de parents et de familles d’immigrés pensent que c’est ce qui permet de réussir, et c’est ce que je pensais aussi. Puis j’ai réalisé que ce n’était pas pour moi. Et quand j’ai été à l’université [Columbia à New York, NDLR], j’ai été entourée de gens merveilleux, de mentors extraordinaires, qui m’ont dit « si tu veux faire une différence, pourquoi ne fais-tu pas de la politique ? » J’ai compris que…
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