—– par Guy Gabriel—
Réalisé par Pablo Larrain ; avec Nathalie Portman, Peter Sarsgaard, John Hurt, Greta Gerwing, Billy Crudup.
22 Novembre 1963, John Fitzgerald Kennedy, 35è Président des Etats-Unis, vient d’être assassiné à Dallas ; Jackie, son épouse, profondément choquée par ce drame, admirée pour sa culture et son élégance, tente de surmonter son deuil et le traumatisme est décidée à mettre en lumière l’héritage laissé par son mari et, du coup, le célébrer.Pour cela, elle va avoir un entretien avec un journaliste du magazine Life, afin de parler du bref « règne » de son mari, et, surtout de parler de son séjour, à elle, à la Maison Blanche
Nous voilà face à un personnage que l’on croit connaître, du moins le côté glamour et, très rapidement, on se trouve en présence d’un personnage plus complexe qu’il n’y paraît ; le film de Larrain n’a pas la prétention de faire un biopic, mais essaie d’analyser le fonctionnement du personnage à un instant précis de sa vie, afin de comprendre le personnage dans sa totalité ; ici, nous sommes dans la semaine qui suit l’assassinat de son président de mari et Jackie tente, avec un certain sens de l’autorité, d’organiser les funérailles. Par le biais d’une interview accordée au magazine Life , on découvre une Jackie pugnace, qui a le sens de la mise en scène politique.
Sa passe d’armes avec le journaliste (Théodore H. White) est, à ce point très suggestive de la personnalité du personnage, tout en nous livrant une intelligente réflexion sur le rapport de la politique et du spectacle, rapport ambigu s’il en est ; ce n’est donc pas un hasard si, lors de l’entrevue, apparaît le mythe de Camelot et du roi Arthur.
La notion de symbole parcourt le film de part en part, car va apparaître un autre essentiel dans l’histoire politique des Etats-Unis, le personnage de Lincoln, auquel Jackie fait référence à un certain moment.
Ces quelques instants de la vie de Jackie, la déjà ex-First Lady, valent mieux que toute une biographie pour comprendre le personnage, plus complexe et ambigu qu’on pourrait le croire, a priori ; ce, d’autant que la période suit un deuil brutal, double deuil pourrait-on dire, car elle vient de perdre également des jumeaux, période déstabilisante, certes, mais loin d’être innocente. Jackie est donc tout, sauf un biopic, c’est même un anti-biopic, car avec quelques détails, on découvre un tempérament, une organisatrice méthodique, qui sait résister aux entraves (bien souligné par son rapport avec Bob son beau-frère) ; on découvre une vie intérieure intense et constructrice ; un film hanté par un certain sens de la vérité comme essentiel dans tout ce qu’on entreprend.
Le film n’oublie pas d’être conforme à son propos par une mise en scène à la narration fragmentée qui n’oublie pas de mettre en valeur une Nathalie Portman éblouissante (comme Emma Stone dans La la band) ; une mise en forme absolument maitrisée avec des champs-contre-champs extrêmement signifiants.