— Par Jérôme Skalski —
Cent ans après sa disparition, le romancier américain entre à la « Bibliothèque de la Pléiade ». Une consécration pour l’écrivain prolétaire, le journaliste et l’aventurier devenu l’un des auteurs les plus populaires de l’histoire de la littérature.
L’enfance de Jack London se déroule autour de la baie de San Francisco, sous le soleil d’une Californie, qui, dans ces parages, est tempérée par les avalanches et les vagues de brume de l’océan Pacifique. Sa mère, Flora Wellman, abandonnée par le géniteur du futur écrivain, se marie après sa naissance avec John London, un vétéran de la guerre de Sécession. Jack prendra son nom et son surnom, mais ne connaîtra la vérité sur son ascendance véritable qu’à l’âge de vingt ans. Fermier, ouvrier, petit commerçant ou employé, John London entraîne sa famille de part et d’autre de la baie dans ses pérégrination à la recherche d’un travail souvent précaire, avant de s’installer à Oakland, où Jack découvre la bibliothèque publique de la ville et fait la connaissance d’Ina Coolbrith, bibliothécaire et poétesse, qui le guidera dans sa frénésie de lecture et dans sa vocation naissante.
Des bas-fonds au sommet de la fortune
« J’ai vécu partout ! » s’exclame Arthur Rimbaud dans sa Saison en enfer. L’année 1889 est celle d’un tournant pour Jack, qui connaîtra bientôt « mille vies » – son père, marqué par un accident, ne pouvant plus subvenir aux besoins de sa famille. Jack cumule donc les petits boulots. Les événements de son existence s’enchaînent alors avec un rythme frénétique et le conduiront des bas-fonds au sommet de la fortune.
« Bête de somme en usine à quatorze ans, pilleurs d’huîtres dans la baie de San Francisco à quinze, trimardeur et taulard à dix-huit, jeune socialiste à Oakland à dix-neuf, chercheur d’or dans le Klondike à vingt et un, Kipling américain à vingt-quatre, connu comme auteur dans le monde entier, champion des causes sociales, journaliste et correspondant de guerre à vingt-huit, voyageur et aventurier sans frontières à trente et un, éleveur de bétail primé et propriétaire d’une ferme expérimentale à trente-cinq, légende du self-made-man millionnaire à sa mort, à quarante ans », résume Earle Labor, le grand spécialiste américain de Jack London (1).
Une faim insatiable de lectures scientifiques, sociales…
Cette vie est également vouée à l’écriture, au rythme de mille mots par jour jetés sur le papier sans repentir et quelles que soient ses autres activités. À l’écriture, s’associent chez lui une soif et une faim insatiables de lectures scientifiques, sociales, historiques et théoriques pour cet autodidacte qui reprend ses études à dix-neuf ans et intègre l’université de Berkeley pour six mois après avoir absorbé, en quatre, les deux années de programme de l’académie d’Alameda préparant à l’examen d’entrée de la prestigieuse institution. Faute d’argent pour pousser plus avant ses études, il part pour le Klondike avec, dans ses bagages, au propre ou au figuré, le Capital de Marx, l’Origine des espèces de Charles Darwin et la Philosophie du style, d’Herbert Spencer.
Une vie de légende, donc,…
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