— Par Sophie Elizéon, déléguée interministérielle pour l’égalité des chances des Français d’Outre-mer —
A quelques jours du 20 novembre, journée internationale des droits de l’enfant, il me parait opportun de rappeler les valeurs qui ont poussé la France à ratifier la convention internationale des droits de l’enfant moins d’un an après son adoption par l’ONU en 1989.
Ces valeurs humanistes se retrouvent dans les droits fondamentaux qui sont reconnus aux enfants du fait de leur manque de maturité physique et intellectuelle, et que les adultes se doivent de garantir. Dès lors, le rôle des adultes et des autorités est de protéger les enfants tant sur le plan sanitaire que social et juridique afin de préserver leurs droits à : la survie ; un développement dans toute la mesure du possible ; être protégé contre les influences nocives, les mauvais traitements et l’exploitation ; participer à part entière à la vie familiale, culturelle et sociale. Comment alors ne pas être scandalisé et alarmé par le triste spectacle d’enfants mis sur le devant de la scène par leurs parents pour insulter une ministre ?
En ces temps de parole décomplexée (et peu m’importe que les réseaux sociaux en soient à l’origine ou non) où d’anciens hauts fonctionnaires de l’Etat sont nommés au cabinet du Front National et où, comme le dit si bien Harry Roselmack dans sa tribune du 4 novembre 2013 dans Le Monde « les vielles affiches Y’a bon Banania » décorent encore nos murs, il est de notre devoir de réfléchir à ce que nous appelons des influences nocives.
Quel avenir ces parents préparent-ils à leurs enfants?
Dans notre pays, dont la devise et les fondements sont « liberté, égalité, fraternité » , nous apprenons que notre liberté s’arrête où commence celle de nos concitoyennes et de nos concitoyens, que nous naissons et demeurerons libres et égaux en droits et que la fraternité trouve sa source dans le respect que nous nous devons les un-es les autres. C’est sur ces bases que nous faisons société.
Dès lors, mettre dans les mains et les bouches de nos enfants des gestes et propos racistes, donc contraires aux fondements de la République, relève selon moi de l’influence nocive, définie comme l’ascendant nuisible d’une personne sur une autre personne.
Lorsque cet ascendant est exercé par une personne ayant autorité (les parents) l’acte est encore plus grave et condamnable.
Quel avenir en effet ces parents préparent-ils à leurs enfants en leur transmettant l’intolérance, l’agressivité, le mépris et le rejet de l’altérité ? N’est-ce pas les mettre en danger que de les laisser croire que l’on peut, à l’heure de l’espace européen et des échanges mondiaux, se replier sur soi, refuser la différence, reprendre les idées archaïques et obscurantistes qui ont jadis conduit la France à perpétrer ce qu’elle reconnait désormais comme crime contre l’humanité ?
N’est-ce pas les mettre en danger que de les inciter à bafouer la République en insultant une de ses Ministres, par ailleurs garante de l’Etat de droit ?
N’est-ce pas les mettre en danger que de les encourager à remettre en cause une loi votée dans le respect de la démocratie et des fondements de notre société ? Je dis que si.
Ces enfants sont mis en danger par leurs parents qui les instrumentalisent et par là même nient leurs droits fondamentaux.
Ces enfants sont mis en danger par leurs parents qui se servent d’eux comme boucliers en leur faisant tenir des propos pour lesquels des adultes peuvent être poursuivi pénalement.
Ces enfants sont mis en danger par leurs parents qui leur transmettent des idées qui les rendront demain inaptes à faire société autrement que dans l’entre-soi. Au nom de cette mise en danger, ces parents pourraient être auditionné(e)s.
Sophie Elizéon, déléguée interministérielle pour l’égalité des chances des Français d’Outre-mer
Mercredi 13 novembre 2013