— Par Jean-Marie Nol, économiste —
Le porte-monnaie des guadeloupéens est en surchauffe, car l’inflation atteint 9,1%, au mois de juillet, c’est le prix du poisson qui a le plus augmenté, de 18,16% entre février et août 2022. Au cours de cette période, le prix d’un panier alimentaire a augmenté de près de 21%, d’après les calculs réalisés chaque semaine par l’INSEE. Un plein d’essence qui coûtera nettement plus cher à la rentrée de septembre, des paquets de pâtes mais aussi de la viande surgelée plus onéreux… La montée des prix de notre quotidien n’a échappé à personne, ne serait-ce qu’en lisant la presse pour laquelle l’inflation est un des sujets phares de cette année 2022. Avec des tarifs de l’énergie en hausse de 28,5% en juillet sur un an, mais aussi une alimentation plus coûteuse de 6,8% ainsi qu’une augmentation du coût des matériaux de construction de 37,4%, les guadeloupéens font face à une situation atypique. Le problème est historique : la Guadeloupe et aussi la Martinique sont fortement dépendantes des marchés extérieurs pour garantir l’approvisionnement en produits de consommation courante nécessaires à leur consommation intérieure. En plus, la parité de l’euro en baisse face au dollar aggravé la spirale inflationniste.
Dans les grandes surfaces en Guadeloupe et Martinique, les prévisions quant à la montée des prix de l’alimentaire font trembler : +15% pour ces vacances, +20% en début d’année 2023. Selon les calculs de l’INSEE, entre la mi-avril et la mi-juillet, les prix du beurre ont flambé de 20,3%, de 17,8% pour le lait, de 13% pour la viande.
Enfin, ajoutons qu’au-delà des frontières, on n’échappe pas à la tendance inflationniste. En Guyane et au Brésil, les prix des aliments ont flambé de 17,5% en juillet sur un an. Le journal brésilien Hora Do Povo rapporte de fortes augmentations sur des produits de base comme la papaye (99,39%), la pastèque (81,60%), l’oignon (75,15%), la fraise (73,86%) ou encore le café moulu (58,12 %).
Mais le plus grave est que les responsables politiques guadeloupéens et martiniquais se payent de mots sur la problématique de l’autosuffisance alimentaire. En effet, il s’agit d’une chimère brandie régulièrement à des fins démagogiques par notre personnel politique. Nous avons déjà alerté sur cette supercherie de l’autosuffisance alimentaire dans plusieurs articles de presse. Nullement de perspectives d’atteindre l’autosuffisance alimentaire pour la Guadeloupe et la Martinique. C’est tout le contraire auquel l’on va assister dans les prochains mois avec une forte dégradation de notre balance commerciale. L’agriculture antillaise déjà au plus mal sera bientôt totalement sinistrée du fait d’une importante baisse de la production agricole en Guadeloupe et en Martinique. Pourquoi ?
Tout simplement parce que les intrants nécessaire à la production agricole ont augmenté en Guadeloupe de 73% depuis le début de l’année 2022.
Le prix des intrants atteint un nouveau record.
Le prix des engrais et des amendements s’est fortement redressé, doublant par rapport à mars 2021.
En août 2022, le coût des intrants bat un nouveau record. Depuis plusieurs mois, il ne cesse d’augmenter, porté par la forte progression des prix des engrais et de l’énergie. Dans ce contexte d’accélération des prix, les livraisons d’engrais et la production d’aliments destinés à l’alimentation animale sont, quant à elles, en nette baisse.
Les mois passent et la hausse du prix d’achat des intrants s’amplifie.
Les prix des engrais et de l’énergie sont ceux qui accusent la plus forte augmentation sur un an, avec respectivement +100,1 % et +68,0 %, rapporte Agreste, le service de la statistique du ministère de l’Agriculture, dans une note publiée le 12 août 2022.
Le prix des engrais et des produits type plastique utilisés entre autres par la profession bannière et autres meloniers , a plus que doublé en un an. Il en est de même pour les prix de l’alimentation animale qui sont en forte hausse
En juillet 2022, le prix des aliments pour animaux grimpe de 25,8 % par rapport à février 2022 et reste nettement supérieur à celui de mars 2021 (+17,7), « en lien avec la hausse du prix des céréales et des oléagineux », détaille la direction de l’agriculture..
Dans le détail, le prix des aliments porcins progresse de 29,2 % sur un an, celui des aliments pour volailles de 25,2 % et celui des aliments pour vaches et caprins de 37,2 %.
Cela s’explique par la poursuite des tensions sur le marché mondial, influencées par la guerre en Ukraine et des disponibilités limitées chez les principaux exportateurs du fait de la hausse du gaz et des coûts du fret.
Avec cette très forte augmentation des prix des intrants, les produits locaux des deux îles des Antilles deviennent encore plus non compétitifs par rapport aux produits importés et le marché local déjà chancelant dans les fondations , risque fort de bientôt s’écrouler et l’agriculture antillaise connaîtra une descente aux enfers.
La situation est plus que préoccupante pour l’avenir de l’agriculture en Guadeloupe et Martinique , deux pays déjà en mal développement…Pa konet mové…. Et pire l’on assistera au même scénario pour l’artisanat aux Antilles. Bois, métaux, plastique, verre… Aucune matière première n’est épargnée par la crise globale de l’énergie et du fret qui va entraîner selon toute vraisemblance de nombreuses pénuries de certaines marchandises en Guadeloupe et Martinique De plus en plus l’inflation devient galopante et l’Insee relève une accélération des prix des services, de l’alimentation, et des produits manufacturés. Les entreprises et les ménages en souffrent déjà , et bientôt s’ajoutera un autre type d’inflation à savoir l’inflation salariale qui va induire une spirale inflationniste hors de tout contrôle , et personne ne semble voir la lumière au bout du tunnel…. L’inflation des salaires est un type d’inflation des coûts, qui survient précisément lorsqu’il y a des augmentations du salaire des facteurs de production et que ces augmentations sont directement transférées au prix de ce qui est produit.
Rappelons que le coût de production est composé des matières premières, de la main-d’œuvre et des coûts indirects de fabrication. Il s’avère que l’inflation des coûts est causée par l’un de ces éléments de coût. Précisément, cette situation d’inflation est fondamentalement causée par la hausse de la composante salariale. C’est la raison pour laquelle cette inflation est appelée inflation des salaires.
Cette forme d’inflation ayant pour origine l’élévation d’une des composantes des facteurs de production, est aggravée par l’augmentation du coût du crédit. c’est-à-dire l’inflation des coûts financiers. Par conséquent, cette forme d’inflation vient du côté de l’offre, contrairement aux autres types d’inflation qui viennent du côté de la demande. À titre d’exemple, nous avons déjà en Guadeloupe ce qu’on appelle l’inflation de la demande, qui est une forme d’inflation causée par une demande excédentaire.
Pourquoi l’augmentation des salaires augmentera durablement l’inflation ?
Plus concrètement, les entreprises revalorisent la rémunération de leurs employés ce qui augmente leurs coûts de production. Une charge supplémentaire qu’elles sont ensuite contraintes de répercuter sur leurs prix de vente pour ne pas réduire leurs marges de manière trop importante. Et là réside le danger d’une crise majeure de trésorerie pour les entreprises Guadeloupéennes et martiniquaises déjà pour beaucoup d’entre elles en insuffisance de fonds propres, et donc dans une totale incapacité à rembourser les PGE et autres emprunts. En effet, comme nous l’annoncions dès le début 2022, un peu seuls contre tous, la flambée de l’inflation et son corollaire la chute du pouvoir d’achat des ménages et sa conséquence prévisible à savoir mécaniquement les faillites d’entreprises sont bien devenues les principaux dangers économiques des derniers mois et des mois à venir. De plus, le danger pour les ménages et entreprises viendra aussi et surtout de l’attitude restrictive à venir des banques. A relire nos articles sur le sujet…. Crise passagère ? Mutation de fond ?
Ce qu’il faut bien comprendre c’est que le monde est confronté non à une crise transitoire, mais plus profondément, à une grande transformation, une mutation profonde, allant dans le sens d’un changement de modèle et d’organisation économique et géopolitique. Le tout s’accompagnant de conséquences inéluctables sur le maintien en l’état de notre modèle de société découlant de la départementalisation. A notre avis aucun processus d’adaptation ne semble à mes yeux être possible en l’état actuel de mes réflexions Socio économique.
Jean Marie Nol, économiste