À 8h30, à l’amphithéâtre Michel-Louis, sur le campus de Schœlcher
— Par Sarha Fauré —
Jean Bernabé, né le 31 juillet 1942 au Lorrain en Martinique et décédé le 12 avril 2017 à Schœlcher, est une figure incontournable de la linguistique et de la pensée créole. Sa vie et son œuvre témoignent d’un engagement profond envers la langue et la culture créoles, ainsi que d’une contribution majeure au développement des études dans ce domaine.
Dès ses débuts, Jean Bernabé s’est distingué par sa passion pour la linguistique et sa volonté de valoriser le créole. Agrégé de grammaire, il a consacré de nombreuses années à l’étude approfondie des langues créoles, en particulier celles de la Guadeloupe et de la Martinique. Sa thèse de doctorat d’État en linguistique, intitulée « Fondal Natal : Grammaire basilecticale approchée des Créoles guadeloupéen et martiniquais », publiée en 1983 chez l’Harmattan, marque un tournant important dans la recherche sur les langues créoles.
En tant que cofondateur du Groupe de recherches et d’études en espace créole et francophone (GEREC-F) à l’université des Antilles et de la Guyane, Jean Bernabé a joué un rôle central dans le développement d’une approche académique dynamique et novatrice des études créoles. Son travail a ouvert de nouvelles perspectives dans des domaines variés tels que la linguistique générative, la sociolinguistique et l’anthropologie linguistique, contribuant ainsi à enrichir notre compréhension des langues et des cultures créoles.
Mais Jean Bernabé ne se limitait pas à son rôle d’universitaire. Il était également un fervent défenseur de la langue et de la culture créoles, militant pour leur reconnaissance et leur valorisation. En collaboration avec des intellectuels de renom tels que Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant, il a été l’un des principaux architectes du mouvement de la « créolité », cherchant à promouvoir une vision positive et affirmée de l’identité créole dans un contexte postcolonial complexe.
En tant qu’administrateur, Jean Bernabé a joué un rôle crucial dans le développement des études créoles à l’université des Antilles et de la Guyane. En tant que doyen de la Faculté des lettres et sciences humaines, il a œuvré pour la création de programmes académiques dédiés à la langue et à la culture créoles, contribuant ainsi à leur institutionnalisation et à leur reconnaissance au sein de l’institution universitaire.
Au-delà de son engagement académique, Jean Bernabé était aussi un écrivain prolifique, explorant les thèmes de la créolité, de l’identité et de la mémoire collective dans ses œuvres littéraires. Son roman « Partage des ancêtres » (2004), par exemple, offre une réflexion profonde sur la pluralité des héritages culturels dans les sociétés créoles et sur les défis de la construction d’une identité plurielle et inclusive.
L’inauguration de la faculté Jean-Bernabé est l’occasion de rendre hommage à un intellectuel dont l’œuvre continue d’inspirer et de nourrir la réflexion sur les langues, les cultures et les identités dans les sociétés créoles et au-delà. Son héritage intellectuel et académique reste aujourd’hui une source d’inspiration et de référence pour les générations présentes et pour celles qui viennent.