« Illettrisme, en parler pour avancer »

La 11e édition des Journées nationales d’action contre l’illettrisme (JNAI), organisée sous l’égide de l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI), se tiendra du 8 au 15 septembre. Cet événement annuel, désormais incontournable, vise à sensibiliser le grand public, les institutions et les professionnels à la problématique persistante de l’illettrisme en France. En dépit des progrès réalisés, l’illettrisme demeure un enjeu crucial, touchant encore 2,5 millions de personnes, c’est-à-dire près de 7 % de la population adulte, qui ont été scolarisées mais n’ont pas acquis une maîtrise suffisante des compétences de base comme la lecture, l’écriture et le calcul.

En Martinique, la situation est particulièrement préoccupante. En 2014, près de 19 % des personnes âgées de 16 à 65 ans étaient en difficulté face à l’écrit, peinant à lire, écrire ou comprendre un texte simple. Ce chiffre est corroboré par une autre statistique inquiétante : en 2015, 20 % des jeunes participants à la Journée Défense et Citoyenneté (JDC) ont été identifiés comme étant en situation d’illettrisme. De plus, des données récentes montrent que 30 % des jeunes Martiniquais âgés de 18 ans sont toujours en grande difficulté face à la lecture et à la compréhension en français, un constat alarmant qui met en lumière l’urgence de la situation.

Face à ce défi, la Martinique, à l’instar des autres régions françaises, s’est mobilisée pour intensifier ses efforts dans la lutte contre l’illettrisme. Cette année, plusieurs organismes de l’île ont été labellisés par l’ANLCI pour la qualité et la pertinence de leurs actions sur le terrain. Ces organismes, par la diversité de leurs approches, jouent un rôle essentiel dans le combat contre l’illettrisme et l’exclusion sociale qu’il entraîne.

L’Agefma (Association de gestion de la formation professionnelle en Martinique) figure parmi les acteurs principaux de cette lutte. En 2024, elle propose un programme riche et varié avec, entre autres, un livret de sensibilisation, deux webinaires dédiés au repérage des personnes en situation d’illettrisme et à leur accompagnement vers la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE). L’accent est mis sur la formation des professionnels afin de mieux identifier et soutenir les personnes concernées.

L’Iedom (Institut d’émission des départements d’outre-mer), autre organisme labellisé, se concentre sur la gestion budgétaire et l’inclusion bancaire, domaines où l’illettrisme peut avoir des conséquences particulièrement graves. En sensibilisant le public à ces enjeux, l’Iedom contribue à renforcer l’autonomie financière des personnes en difficulté.

L’académie de Martinique, quant à elle, invite les établissements scolaires à valoriser les dispositifs académiques développés pour lutter contre l’illettrisme, en permettant aux élèves de présenter leurs projets et initiatives. Cette démarche vise à renforcer la prise de conscience dès le plus jeune âge et à intégrer la lutte contre l’illettrisme au cœur du parcours éducatif.

Les Opco (Opérateurs de compétences) tels qu’EP, Uniformation et Akto, s’investissent également en mettant l’accent sur la formation professionnelle. Ils organisent des événements pour récompenser les apprenants ayant validé leur certificat Cléa, un diplôme qui atteste des compétences de base indispensables dans le monde du travail. Cette reconnaissance vise à encourager la persévérance des personnes en situation d’illettrisme et à valoriser leurs efforts.

Le CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale) s’engage de son côté en organisant des formations pour ses agents, notamment avec la présentation de l’outil d’évaluation EVA, qui permet de mesurer les compétences de base des personnes accompagnées. Cette initiative vise à renforcer les capacités des agents publics à repérer et accompagner les personnes en difficulté.

Deux associations locales, la Maison ducossaise du savoir et Hop !, apportent leur contribution en proposant des ateliers créatifs et des travaux sur l’estime de soi. La première lance un « explorateur de mots », tandis que la seconde se concentre sur des activités visant à renforcer la confiance en soi des participants, un aspect souvent négligé mais crucial pour surmonter les obstacles liés à l’illettrisme.

Enfin, le CCAS (Centre communal d’action sociale) de la ville de Sainte-Marie met en place une campagne de sensibilisation destinée à ses conseillers pour mieux repérer les situations d’illettrisme parmi la population qu’ils accompagnent. Cette action témoigne de l’importance de la lutte contre l’illettrisme à tous les niveaux de la société, y compris au sein des services publics locaux.

L’édition 2024 des JNAI, placée sous le thème « En parler pour avancer », souligne l’importance de briser le silence autour de l’illettrisme. Trop souvent, les personnes concernées préfèrent cacher leurs difficultés par crainte de stigmatisation. Cette semaine d’action est l’occasion de lever ce tabou, de libérer la parole et de montrer que des solutions existent pour chacun.

Un numéro vert gratuit, le 0 800 11 10 35, est disponible pour toutes les personnes souhaitant obtenir des informations ou de l’aide concernant l’illettrisme. Pour en savoir plus sur les initiatives locales, n’hésitez pas à contacter l’Agefma au 0596 71 11 02.

Ces Journées nationales d’action contre l’illettrisme sont une opportunité précieuse pour renforcer la visibilité des actions menées en Martinique et ailleurs, pour sensibiliser le public à l’ampleur du problème et pour mobiliser encore davantage de ressources humaines et financières afin d’éradiquer ce fléau. Parce que l’illettrisme n’est pas une fatalité, mais un défi que nous pouvons relever ensemble.

M’A