Le 14 avril à 19 h Médiathèque du Saint-Esprit
— Par Faubert Bolivar, Rencontres pour le lendemain —
…Comment a-t-il fait pour réussir à vivre pleinement plusieurs vies en une seule et en à peine un demi-siècle ? Metteur en scène, conteur, musicien, danseur, comédien et enseignant, Hassane Kassi Kouyaté est tout un monde. L’homme qui s’est confié à nous ce matin du 23 mars dans son bureau, a à son actif 56 mises en scène professionnelles, qui ont fait le tour du monde. De toute évidence, après seulement un an et demi à la direction de Tropiques Atrium Scène nationale, il nous a démontré ce dont il était capable. Les faits sont là, parlons de l’homme. Monsieur Kouyaté est pétri de la grande tradition orale africaine. Tradition dont, par ailleurs, il est un digne porteur, un passeur, attitré. En effet, Hassane est un griot. Il est, dit-il fièrement, « dans une mission de griot ». Il faut savoir qu’au Burkina Faso où il a ses racines, les Kouyaté sont une caste de griots. Hassane est l’héritier de son père, feu Sotigui Kouyaté, qui était maitre des griots et griot des maitres. Le comédien de renommée internationale que Peter Brook admirait n’était, au pays, qu’un maitre de la parole, dans le sens le plus pur de la tradition. Aujourd’hui, le fils a pris la place du père. C’est fort de cet héritage, qu’il a créé de multiples espaces de promotion de la culture orale, et c’est également pour cela que nous affirmons qu’il est riche de vie. Hassane Kassi Kouyaté, c’est : le Centre Djéyila, dédié à la philosophie du griot ; le Festival Yeleen, autour du conte ; le Salon du livre jeunesse et de la tradition orale ; la Maison de la parole ; Waga hip-hop, Festival panafricain et international des cultures urbaines… Et, j’en passe. Hassane Kassi Kouyaté c’est aussi la Fondation Wamdé, qu’il dirige avec sa mère – plutôt, l’une de ses mamans, car Hassane, issu d’une famille polygame, n’a pas qu’une mère, mais trois, dont une suisse allemande -. La Fondation Wamdé accueille sur trois hectares 130 enfants à partir de deux ans. Grâce à son action, des petits orphelins et des enfants de rue ont la chance de recevoir une solide éducation artistique et scolaire. Aujourd’hui, l’homme est fier de dire – qui ne le serait pas ? – que sa fondation a donné au Burkina Faso trois professeurs d’université. Riche d’Afrique, l’homme a un attachement viscéral au Burkina Faso, qu’il exprime en une phrase simple : « le pays où je souhaite mourir »… Il faut écouter Hassane parler de la maison de son grand-père, de la chambre où celui-ci s’enfermait avec le grand Amadou Hampâté Bâ pour discuter de choses savantes et sacrées, chambre aujourd’hui restée en l’état ; du théâtre qu’il a créé dans la susdite maison, théâtre où ses pièces tiennent parfois l’affiche durant un mois à raison de mille spectateurs par représentation…Il faut entendre Hassane Kassi Kouyaté parler de ces choses-là pour comprendre combien cet homme porte le témoignage de la grandeur, de la lumière, de la magnificence d’un grand continent : l’Afrique. Enfin, Hassane revendique son éducation mandingue et ses croyances animistes, mais Hassane se définit comme « un zèbre », capable de « convoquer le blanc ou le noir » quand il veut. Monsieur Kouyaté s’enracine dans l’Afrique profonde pour parler de haute humanité. « Tout ce qui a dicté ma vie, c’est : qu’est-ce que je peux faire pour l’autre ? », dit-il. C’est dans cette démarche que s’inscrivent ses actions à travers le monde. Oui, l’homme mène des actions un peu partout sur la planète, histoire « d’ouvrir, avec force, par-delà les frontières ». Ainsi, nous parle-t-il du Canada, d’Allemagne, de Chavez, de Lula, de Cuba, de Gilberto Gil, du Japon, de la Colombie, de…du… de ses rencontres quotidiennes avec les acteurs de la culture martiniquaise pour « se rapprocher le mieux possible du battement de cœur des gens d’ici ». Quand on dit à Monsieur Hassane Kassi kouyaté que c’est une chance de l’avoir en Martinique, l’homme, qui sait rester humble, rétorque avec conviction et avec le sourire qui ne quitte pas ses yeux : « non, c’est d’abord une chance pour moi d’être ici. » En le quittant, nous avons déjà hâte de le rencontrer à nouveau, à l’invitation des Rencontres pour le lendemain, pour qu’il nous en dise plus, car il a beaucoup à dire ce Monsieur. « Je dirai un ou deux contes », promet-il avec l’enthousiasme des amants de la parole. Normal, c’est un griot !
Faubert BOLIVAR
Après Monchoachi, Ernest Breleur et Jocelyne Béroard, Hassane Kouyaté sera l’invité de la quatrième édition des Rencontres pour le lendemain, qui aura lieu le jeudi 14 avril 2016 à la Médiathèque du Saint-Esprit, sous le coup de 19 heures.