Le Centre national du cinéma a mis en place des formations pour lutter contre le harcèlement sexuel, qu’il impose aux dirigeants d’entreprises en échange de ses aides. Reportage au coeur d’une session.
— Par Marina Alcaraz —
« Les femmes n’ont qu’à parler… », « Pourquoi cette agitation ? Une femme est libre de dire non, quand même ! », « J’ignorais que des pratiques admises il y a dix ans étaient à ce point condamnables… ». Dans l’assemblée et en coulisse fusent les questions et les réflexions parfois naïves – voire inquiétantes – qui montrent le chemin à accomplir pour éradiquer les violences sexistes et sexuelles dans le monde du cinéma.
Dans la grande salle de projection du CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée), dans le 14e arrondissement de Paris, une soixantaine de professionnels du cinéma et de l’audiovisuel écoutent avec attention Marilyn Baldeck, déléguée générale de l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT). Pendant une demi-journée, elle répond à leurs questions, leur donne des exemples mais, surtout, rappelle les principes du Code du travail.
Certains professionnels y sont venus contraints, d’autres avec l’envie d’être formés sur ce sujet délicat. « Au départ, un petit nombre voulait nous envoyer un proche collaborateur », se souvient Evelyne Laquit, en charge des questions d’égalité au CNC dont elle est directrice de la communication. Or, il faut que ce soit les dirigeants des structures – ceux qui demandent les aides qui y assistent.
Car depuis le début d’année, l’inscription à cette formation du CNC est obligatoire pour recevoir les soutiens de l’institution, quasi indispensables à la production des films et séries. Ainsi, depuis le lancement de cette initiative il y a un an, environ 1.000 professionnels dans la production, la distribution et les jeux vidéo ont été formés. L’objectif est de toucher 9.000 personnes d’ici trois ans.
Changement d’état d’esprit
C’est un véritable changement d’état d’esprit qu’espère le CNC. Dans le petit milieu du 7e Art et des médias, beaucoup de choses se taisent ou, du moins, se sont tus durant des années.
L’idée de cette formation est venue au lendemain des révélations d’Adèle Haenel et de la vague #MeToo. L’actrice a accusé le réalisateur Christophe Ruggia d’attouchements et de harcèlement quand elle était adolescente. Ses propos créent un électrochoc : « Tout le monde a alors pris conscience qu’il était nécessaire de rappeler à l’employeur qu’il était directement responsable », se souvient Evelyne Laquit.
Si quelques affaires sont médiatisées comme celle de…
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