— Communiqué de presse du BINUH(*) —
Port-au-Prince, le 19 avril 2024 : Au cours du premier trimestre de l’année 2024, le BINUH a enregistré 2.505 personnes de meurtres et de blessures à la suite de violences liées aux gangs, une augmentation de plus de 53 % par rapport à la période précédente (octobre-décembre 2023), faisant des trois premiers mois de 2024 la période la plus violentedepuis au moins le début de 2022.Parallèlement, au moins 438 personnes ont été enlevées contre rançon, dans les départements de l’Ouest et de l’Artibonite.
Le plus grand nombre de victimes de meurtres et de blessures a continué d’être documenté dans la capitaleoù, dans la continuité des violences documentées à la fin de l’’année 2023, des affrontements extrêmement violents entre gangs se sont multipliés en janvier et février, motivés principalement par l’expansion territoriale.
Cependant, à partir du 29 février, avec l’intention autoproclamée d’expulser le gouvernement en place, la plupart des gangs ont changé de tactique et coordonné des attaques d’envergure contre des institutions publiques et les infrastructures stratégiques.Plus de 4.600 détenus se sont évadés des deux principales prisons de la capitale, au moins 22 commissariats et sous-commissariats et bâtiments de police ont été saccagés ou incendiés, et 19 officiers de police ont été tués ou blessés.
Le département de l’Artibonite a continué d’être fortement affecté par la violence. Les gangs se sont attaqués aux populations locales, soit en attaquant leurs habitations, soit en exécutant les personnes qui contestaient leur « autorité ». Ils ont également été impliqués dans des enlèvements visant les passagers des transports publics.
Le rapport souligne que l’impact de la violence des gangs sur les droits des enfants demeure extrêmement alarmant. Au moins 82 enfants, dont certains n’avaient que six ans, ont été tués ou blessés au cours du premier trimestre 2024. Poussés principalement par le manque d’opportunités socio-économiques, de nombreux enfants ont aussi été recrutés dans les rangs de gangs pour participer aux activités criminelles.
« Les activités des gangs ont fortement limité l’accès aux services essentiels, notamment les soins de santé et l’éducation, et ont exacerbé l’insécurité alimentaire », a souligné María Isabel Salvador, Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU et cheffe du BINUH.
Les gangs ont continué à recourir à la violence sexuelle pour attaquer les habitants des quartiers « rivaux ». Dans certains endroits de la capitale, les femmes et les jeunes filles ont été interceptées par des membres des gangs, alors qu’elle se rendaient au travail ou à l’école, et ont été soumises à des viols collectifs. Certaines d’entre elles ont été tuées après avoir été agressées sexuellement. D’autres ont été violées dans des sites pour personnes déplacées, où elles s’étaient réfugiées.
Les menaces envers les défenseurs des droits de la personne, les journalistes et les membres du secteur judicaire ont considérablement augmenté, ce qui a conduit beaucoup d’entre eux à laisser leurs habitations, à limiter leurs déplacements et à réduire leurs activités professionnelles.
Le contrôle des routes par les gangs, les tirs répétés contre l’aéroport international, Toussaint Louverture et ses environs, ainsi que les attaques contre l’Autorité portuaire nationale (APN) -le principal port de la capitale – ont fortement entravé l’acheminement des produits de première nécessité, y compris les médicaments et les biens alimentaires.Les institutions de santé et d’éducation n’ont pas été épargnées non plus.
Dans le même temps, le premier trimestre 2024 a vu une augmentation du nombre de personnes tuées ou blessées lors d’opérations et de patrouilles de police, avec 590 victimes. Plusieurs d’entre elles n’étaient apparemment pas été impliquées dans la violence des gangs et certaines étaient des personnes à mobilité réduite.
Malgré quelques évolutions positives en matière de lutte contre la corruption et tentative de réduction de la détention préventive prolongée dans les juridictions de Jacmel et des Cayes, le système judiciaire est resté largement dysfonctionnel. Les grèves, les retards dans la nomination des magistrats et les attaques de gangs contre les infrastructures ont continué de compromettre le fonctionnement du système judiciaire à travers tout le pays.
Face à cette situation d’insécurité et de violence, le rapport recommande à la communauté internationale de maintenir Haïti sur son agenda et d’accélérer le déploiement de la Mission multinationale de soutien à la sécurité conformément aux normes et standards en matière des droits de la personne.
(*)BUREAU INTÉGRÉ DES NATIONS UNIES EN HAÏTI