— Par Sarha Fauré —
Le 28 mai, le Conseil présidentiel de transition en Haïti a unanimement désigné Garry Conille comme nouveau Premier ministre intérimaire, remplaçant Ariel Henry après sa démission en mars due à l’escalade de la violence des gangs. Âgé de 58 ans, Conille, qui a déjà dirigé le gouvernement haïtien pendant six mois entre 2011 et 2012, occupe actuellement le poste de directeur régional du Fonds des Nations unies pour l’enfance pour l’Amérique latine et les Caraïbes depuis janvier 2023.
Sa nomination intervient dans un contexte de crise profonde. Haïti est en proie à des troubles politiques, sécuritaires et humanitaires sans précédent. Port-au-Prince, la capitale, est contrôlée à 80 % par des bandes criminelles accusées de multiples exactions, incluant meurtres, viols, pillages et enlèvements contre rançon. La situation sécuritaire déplorable a conduit à une grave crise humanitaire, exacerbée par des pénuries de nourriture, de médicaments et d’autres produits essentiels. Le système de santé, déjà au bord de l’effondrement, est maintenant menacé par l’étranglement de la chaîne d’approvisionnement, selon l’Unicef.
Les violences ont culminé fin février avec des attaques coordonnées des gangs sur des sites stratégiques de la capitale, visant à renverser le gouvernement de Henry. La détérioration rapide de la situation a suscité des appels internationaux à l’intervention, notamment de la part des États-Unis, qui ont soutenu le déploiement imminent d’une force multinationale dirigée par le Kenya pour aider à stabiliser le pays. Cette force, dont l’arrivée a été retardée, est destinée à épauler la police haïtienne dans sa lutte contre les gangs.
Garry Conille, en tant que Premier ministre, fait face à la tâche herculéenne de former un gouvernement de transition capable de naviguer à travers ces crises. Son expérience au sein des Nations unies et sa collaboration avec des figures internationales comme l’ancien président américain Bill Clinton après le séisme de 2010 sont des atouts indéniables. Cependant, sa nomination est aussi vue comme le résultat d’une influence américaine et potentiellement de l’ancien président Michel Martelly, accusé par l’ONU d’avoir financé les gangs.
La formation du nouveau gouvernement sera délicate, compte tenu des tensions internes au sein du Conseil présidentiel de transition et des intérêts divergents des différents secteurs représentés. Conille devra équilibrer ces forces tout en cherchant à intégrer des figures de la société civile capables de mener une transition honnête et compétente. La réussite de cette mission est cruciale pour l’avenir d’Haïti, alors que le pays tente de se relever des ravages causés par la violence et l’instabilité politique.
Ainsi, la nomination de Garry Conille marque un tournant potentiel pour Haïti, mais le chemin vers la stabilité reste semé d’embûches. Les défis sont immenses, et le soutien international, bien que prometteur, doit être rapidement et efficacement mis en œuvre pour apporter des changements tangibles dans la vie quotidienne des Haïtiens.