Golshifteh Farahani doit-elle cacher ce corps que le régime ne veut plus voir ?

— Par Lara Plougastel —

golshifteh_farahaniEn 2007 l’actrice franco-iranienne qui été apparue non voilée dans Mensonges d’Etat avait déjà suscité les réactions du régime. En faisant la une du magazine Égoïste, dans le plus simple appareil, la communauté iranienne a réagi, entre message politique et provocation.

« Je suis pour la liberté totale de chaque être dans cet univers. C’est une véritable artiste, talentueuse de surcroît ». Alireza Soroush, écrivain, photographe et cinéaste basé à Los Angeles aux États-Unis est très clair : il soutient l’actrice iranienne Golshifteh Farahani, dont la nudité tranquille fait le bonheur des directeurs de magazine. Car la belle a décidé de remettre le couvert : après avoir choisi de dévoiler un sein en 2012 aux Césars, de poser nue dans le Figaro Madame la même année, elle enlève le haut et le bas fin janvier 2015 pour enjoliver la couverture du magazine Égoïste. Mal dans sa peau ? Provocation ? Nudiste invétérée ? Influencée par les journaux ? Tombée dans le « piège des Occidentaux » ? Les réactions fusent.

L’histoire démarre en 2007 lorsque l’actrice tourne non voilée dans le film hollywoodien Mensonges d’État, aux côtés de Leonardo Dicaprio, provoquant immédiatement le grondement orageux du régime iranien. Téhéran décide alors de lui confisquer son passeport, l’empêchant de retourner dans son pays d’origine. Golshifteh Farahani choisit la France comme terre d’accueil et pose ses valises à Paris. Mais les réactions vont de mal en pis : à plus de 5000 kilomètres d’ici, sa famille est harcelée et son père, Behzad Farahani, célèbre metteur en scène, se voit rappelé à l’ordre.

Que nenni, Golshiteh continue sa route, ses combats

Aujourd’hui, ses soutiens sont nombreux. Alireza ajoute qu’il est fier d’elle. « All we need is peace, love, unity » confie-t-il sereinement. Céline, responsable marketing base à Dubaï, a des étoiles plein les yeux lorsque l’on évoque « son actrice préférée ». « Je l’adore. Avec sa simplicité, sa beauté naturelle, elle est la parfaite incarnation de l’innocence, de la pureté. Et elle provoque en vous des milliers d’émotions, juste avec un regard ». Pour elle, comme pour des milliers de jeunes iraniens, Golshifteh incarne aussi la réussite. Avec une question récurrente, indissociable : « à quel prix ? » « Je pense que l’argent et le pouvoir changent les gens. Certains sont prêts à tout pour être écoutés ou pour que leur talent soit reconnu. Quelles causes soutient Golshifteh ? Et pour quelles causes se battent les Femen ? Est-ce du niveau d’une femme décente ? Avec le pouvoir qu’elle a aujourd’hui, elle aurait pu prouver son talent de mille autres façons ! Est-ce que tout cela lui permet de s’affirmer en tant que Française, bien intégrée dans la société ? Est-ce que les femmes en Iran doivent montrer leurs seins pour trouver un travail, faire carrière, étudier… Devenir quelqu’un ? Est-ce qu’une femme doit être associée à sa paire de seins ? ». Des doutes subsistent, cependant Céline est claire : « elle a tout de même fait fortune… Alors bravo Golshifteh ! ».

Ladane, journaliste résidant au Canada, dit aller « à contre-courant » du raisonnement collectif. « Je ne suis pas trop fan de cette actrice, car je na la trouvais pas si tiptop en comparaison d’autres actrices (notamment dans “À propos d’Ely”). Mais la façon dont elle fait parler d’elle et des femmes en général, je trouve cela vraiment bien. Ce n’est pas déplacé d’avoir des actions coups-de-poing, car si les féministes des années 70 n’avaient pas brûlé leurs soutiens-gorge, nous n’aurions pas aujourd’hui les (malheureux) droits qui nous sont parcimonieusement octroyés… Il me semble que ce qu’elle a fait est fort courageux et je ne porte aucun jugement sur son action, si ce n’est de la bienveillance ».

http://bondyblog.liberation.fr/201502210001/golshifteh-farahani-doit-elle-cacher-ce-corps-que-le-regime-ne-veut-plus-voir/

egoiste_farahani