Manifestation commémorant les 150 ans de l’Insurrection de Septembre 1870
Pour commémorer la grande Insurrection du Sud de septembre 1870, date particulièrement marquante de l’Histoire des Martiniquais, la Collectivité Territoriale de Martinique organise une manifestation solennelle et artistique, le samedi 19 septembre 2020, à partir de 17h.
Cet événement qui célèbre les 150 ans de l’Insurrection de septembre 1870, s’articule autour de 3 idées :
• Marquer nos lieux de mémoire
• Réciter l’Histoire « du dedans »
• Faire appel à nos artistes.
Est donc organisée, au Polygone Desclieux à Fort-de-France, outre un dépôt de gerbe en hommage à tous les Insurgés tombés lors de ce soulèvement, une soirée culturelle dont les temps forts sont les suivants :
• Mot de bienvenue par Marie-Hélène Léotin, Conseillère exécutive en charge du patrimoine et de la culture de la CTM
• Intervention & Discours
Michel Michalon, Comité Gloriyé Septanm 70
Alfred Marie-Jeanne, Président du Conseil Exécutif de la CTM
• Dépôt de Gerbe sur la stèle
• Prestations artistiques :
– Loriane Zacharie
– Mapie (slam)
– AM4.
(Un QR Code est installé sur le site du Polygone pour permettre aux visiteurs d’accéder aux informations disponibles en ligne).
2- L’Insurrection du Sud / 22 – 26 septembre 1870
Le 22 septembre 1870, prolongeant les luttes de nos ancêtres pour la liberté et la dignité, éclatait la grande Insurrection du Sud de la Martinique.
Des milliers d’hommes et de femmes ont brandi l’étendard de la révolte dans un puissant mouvement populaire qui remettait en question l’ordre colonial et la société post-esclavagiste de la deuxième moitié du XIXe siècle.
L’Insurrection de septembre 1870 a illustré avec force, courage, audace, esprit de sacrifice des Insurgés, parmi lesquels les femmes et la jeunesse ont joué un rôle de premier plan.
Elle a rassemblé, dans une même espérance, anciens esclaves, mais aussi Congos et Indiens nouvellement arrivés, préfigurant une première forme d’unité au sein de notre peuple.
Commémorer Septembre 1870 s’impose à nous comme une obligation morale afin de transmettre et de consolider les valeurs de liberté, de dignité, de solidarité et de don de soi portées par les Insurgés, et qui incarnent des valeurs fondamentales pour l’humanité.
3 – Le contexte historique
La Martinique est une colonie française depuis 1635. L’année 1870 marque la transition entre le régime autoritaire du Second Empire et la IIIe République. Sous le Second Empire, le suffrage universel a été supprimé, les libertés fondamentales bafouées.
Après l’abolition de l’esclavage (1848), le système colonial met en place une organisation du travail qui vise à maintenir la main d’oeuvre sur les habitations-sucreries. Ce sont les Lois Gueydon (1855) qui imposent à tout travailleur de présenter son livret ouvrier et son passeport intérieur chaque fois qu’il se déplace d’une commune à une autre, afin de lutter contre ce qu’ils appellent le « vagabondage », dans le but en réalité de fixer la main d’oeuvre au service d’un seul et même patron. Les ouvriers agricoles subissent une dure exploitation chez leurs anciens maîtres, casés sur l’habitation, touchant un maigre salaire (1 F à 1 F 50 par jour). Souvent, le salaire est versé sous forme de bon caïdon qui sert de monnaie sur l’habitation. C’est un morceau de zinc ou de carton qui ne peut être utilisé que dans la boutique de l’habitation.
Les ouvriers agricoles sont aussi des paysans pauvres, petits cultivateurs installés dans les mornes, dans des terrains accidentés, sur des lopins de terre difficiles à travailler ; ils sont particulièrement nombreux dans le sud du pays, sur les hauteurs de Rivière-Salée, Sainte-Luce, Rivière-Pilote, Saint-Esprit, Vauclin, Marin.
Le système colonial se caractérise également par un régime raciste où l’arrogance et le mépris des blancs vis-à-vis des noirs sont des faits quotidiens que la justice ne réprime pas.
4 – L’affaire LUBIN
C’est dans ce contexte qu’a lieu l’affaire Lubin. Léopold Lubin est un jeune noir originaire du Marin, d’une famille bien connue dans la région, et qui a été sauvagement cravaché par un fonctionnaire métropolitain à cheval, Augier de Maintenon ; ce dernier avait estimé que le nègre ne lui avait pas cédé le passage assez vite sur la route entre le Marin et Rivière-Pilote. Nous sommes le 19 février 1870. La plainte de Lubin est restée sans suite et il décide de se faire justice lui-même en infligeant une sévère correction à son agresseur. Le 25 avril, au bourg du Marin, il attend Augier de Maintenon, qui a l’habitude de passer par la rue Dupuy pour se rendre à la messe, le renverse de son cheval et le roue de plusieurs coups de cravache.
Lubin est aussitôt arrêté. Le 19 août 1870, la Cour d’Assises de Fort-de-France le condamne à cinq ans de bagne et 1 500 francs de dommages et intérêts pour « coups et blessures avec préméditation et guet-apens, ayant entraîné plus de vingt jours d’incapacité de travail ».
L’indignation est à son comble au sein de la population ; la colère gronde ; des pétitions et des listes de souscription circulent en faveur de Lubin, en particulier dans la région de Rivière-Pilote, Sainte-Luce, Marin. Des réunions sont organisées avec comme principaux animateurs Louis Telga, Eugène Lacaille, Auguste Villard, Daniel Bolivard, tous originaires de Rivière-Pilote.
5 – L’Insurrection
Le 22 septembre 1870, profitant de la chute du Second Empire et de la proclamation de la République sur la place du bourg de Rivière-Pilote, sous l’Arbre de la Liberté, les dirigeants, en particulier Telga et Lacaille, déclenchent l’Insurrection aux cris de « Mort aux blancs,mort à Codé, Vive la République ». Un millier d’hommes et de femmes se rendent en tout premier lieu sur l’habitation La Mauny, propriété du Sieur Codé qui se vantait partout d’avoir été le principal responsable de la condamnation du «nègre qui avait osé lever la main sur un blanc» !
Codé avait aussi pris l’habitude d’arborer un drapeau blanc (symbole de la monarchie) sur sa propriété. L’habitation de Codé fut incendiée. On le retrouva le 24 septembre, caché au sommet du Morne Vent ; il fut exécuté sur place.
Pendant six jours et six nuits, des milliers d’hommes et de femmes parcourent les campagnes du Sud en réclamant justice. Mais le projet va plus loin. Certains dirigeants parlent de confisquer les grandes propriétés, de distribuer la terre aux paysans pauvres, de débarrasser le pays des blancs racistes. D’autres parlent de République martiniquaise. Un partage des terres a commencé sur plusieurs habitations du Saint-Esprit.
Des dizaines d’habitations-sucreries sont incendiées dans les communes de Rivière-Pilote, Marin, Sainte-Anne, Sainte-Luce, Rivière-Salée, Saint-Esprit et Vauclin. Des milliers d’ouvriers, paysans pauvres, cultivateurs, couturières, artisans, immigrés entrent dans la lutte ; d’autres sont instituteurs, commerçants, petits propriétaires. Ils ont peu de moyens militaires, mais une grande détermination, armés de fusils, coutelas, piques, eau pimentée, torches fabriquées par les femmes surnommées les «pétroleuses». Le combat ne s’engage que la nuit, la cible des Insurgés étant les champs de cannes et les cases à bagasse des grandes propriétés.
6 – Récit extrait de la Revue de la Martinique, avril 1931
«Ce qui rendait cette Insurrection très redoutable, c’était non seulement le petit nombre de troupes dont pouvait disposer le gouverneur, mais encore la configuration topographique de l’île. De vastes habitations construites en bois, à cause des tremblements de terre, et entièrement isolées au milieu des campagnes, d’immenses étendues de terrains sans culture, des forêts presque impénétrables, des cônes volcaniques appelés mornes, couverts d’arbres touffus et d’épaisses lianes, des champs de cannes à sucre, véritables fourrés de cinq à six mètres de hauteur, tout concourait à faciliter pour les Insurgés cette guerre qu’ils ne faisaient que la nuit. Dès le coucher du soleil, les noirs sortaient de leurs cases, ou des bois, se groupaient et se dirigeaient, hommes et femmes, sur la demeure des blancs qui leur avaient été désignés. Ils avaient de la kérosine (pétrole) et ils s’en servaient pour mettre avec facilité le feu en divers endroits à la fois.
Ces feux, alimentés par les cases renfermant les bagasses (tiges desséchées des cannes), avaient promptement dévoré l’habitation, le moulin et l’usine à sucre, et toutes les dépendances.
L’autorité dut d’abord songer à protéger les bourgs et les agglomérations de maisons également menacées, et ce ne fut que lorsque cette oeuvre eut été assurée qu’on put la nuit s’engager dans les plaines et les mornes et y traquer les bandes incendiaires».
7 – La répression
L’état de siège fut proclamé dans quinze communes, bien au-delà des communes concernées : Rivière-Pilote, Marin, Sainte-Anne, Rivière-Salée, Ducos, Lamentin, Saint-Esprit, Sainte-Luce, Diamant, François, Trinité, Robert, Gros-Morne, Trois-Ilets, Vauclin.
Un impressionnant dispositif militaire fut mis en place. A partir de Fort-de-France, soldats et miliciens se dirigèrent par terre vers le Saint-Esprit, par mer vers le Marin. Les Insurgés, mal armés, furent pris en tenailles sur les hauteurs de Rivière-Pilote. Les derniers combats eurent lieu le 26 septembre, dans le camp retranché de la Régale, à Rivière-Pilote. Des centaines d’hommes et de femmes tombèrent au combat,
furent arrêtés, condamnés à mort ou aux travaux forcés aux bagnes de Guyane et de Nouvelle-Calédonie.
8 – L’Histoire a retenu quelques figures historiques
Lumina SOPHIE, dite Surprise, de son vrai nom Marie-Philomène ROPTUS, 22 ans, couturière, est considérée comme la flamme de la révolte.
Figure devenue emblématique, c’est une meneuse d’hommes.
Elle est accusée d’avoir mis le feu, à la tête de sa troupe, dans plusieurs habitations et cases à bagasse, mais elle ne pille pas.
Condamnée aux travaux forcés à perpétuité, elle meurt au bagne de Guyane en 1879
Eugène LACAILLE, 68 ans, mulâtre, propriétaire d’une habitation au quartier La Régale, véritable patriarche, ayant de surcroit une réputation de quimboiseur, est un meneur d’hommes. Il est partisan d’un partage
des terres. C’est sur son habitation qu’ont lieu les derniers combats. Arrêté, évadé, il est repris et condamné à mort. Il est fusillé au Polygone Desclieux en novembre 1871.
Madeleine CLEM, née en 1832 à Rivière-Pilote, d’une famille de libres, elle joue un grand rôle dans l’arrestation de Codé. C’est elle qui le reconnaît, l’empêche de fuir et qui ameute le quartier du Morne Vent. Gravement impliquée dans le meurtre, elle s’évade du fort Desaix, à la veille du procès.
Condamnée à mort. Une correspondance administrative de 1886 précise que, réfugiée à Sainte-Lucie, elle y vivait encore six ans après l’amnistie.
Rosanie SOLEIL, née en 1844 à Sainte-Luce, grandit au Morne Vent à Rivière-Pilote, d’une famille de cultivateurs et ouvriers agricoles sur l’habitation La Mauny. Elle est aussi couturière. Elle est accusée d’avoir «
aidé et assisté avec connaissance de cause les auteurs de l’assassinat de Codé ». Elle est condamnée à cinq années de prison.
Louis TELGA, 45 ans, est une figure légendaire, jamais arrêté, condamné à mort par contumace, probablement réfugié à Sainte-Lucie. Petit propriétaire, éleveur, artisan boucher, il sillonne les campagnes de Sainte-Luce, du Marin, de Rivière-Pilote et fait circuler une liste de souscription en faveur de Lubin. C’est un chef de guerre particulièrement dynamique et actif. Il organise la résistance au camp retranché de La Régale.
9 – Sur les traces des Insurgés
Pour faire vivre, dans l’espace public, cet événement majeur, la CTM a décidé, par arrêté délibéré du 14 mars 2019, de commémorer le 150ème anniversaire de l’Insurrection à travers un projet intitulé : « Sur les traces des Insurgés ».
Ce projet consiste à mettre en place un parcours, dans le sud de la Martinique, en érigeant, sur les sites où des événements significatifs se sont déroulés, une série d’oeuvres – réalisées avec le concours du Campus Caribéen des Arts – marquant les principaux lieux de cette Insurrection. Dix lieux ont été retenus parmi lesquels l’habitation « La Broue » au Vauclin où Lumina Sophie a vu le jour, Croix Codé à Rivière-
Pilote où Codé a été tué ou encore Peter Maillet au Saint-Esprit où un partage des terres au bénéfice des Insurgés a été initié.
L’Insurrection du Sud reste un moment majeur dans l’Histoire de notre peuple en quête de plus de dignité et de justice.
10 – Note artistique de l’œuvre d’art
1870 – 1871 est composée de cinq tubes d’acier de 60 cm de diamètre chacun et de 3 mètres de hauteur, implantés dans une dalle en béton de couleur terre. Ces cinq éléments émergeant de la terre, érigés vers le ciel, représentent les cinq doigts d’une main ouverte qui communique, forge, résiste, se dresse, se soulève, se projette. Le geste est instinctif. C’est un geste de survie, mais aussi un geste d’action et de libération. Le coutelas est placé au coeur de l’oeuvre et traité de différentes manières. Sur quatre tubes, implantés en arcde-cercle et dressés verticalement vers le ciel comme des totems, quatre coutelas sont soudés, peints en noir, érigés en objet d’Art, sacralisés.
D’autres coutelas, de taille normale et implantés de sorte à rendre compte de la force de l’acte de la révolte sont soudés sur les extrémités des tubes à une hauteur hors d’atteinte, respectant les normes de sécurité.
Le fer, matériau porteur de mémoire et d’énergie, fait ici directement référence au ferrement, à tous les outils utilisés sur les champs de cannes à sucre, aux fondements même de la construction du bâtiment et de l’œuvre. Il s’agit de rappeler que les révoltes d’esclaves puis celles des ouvriers agricoles sont les événements fondateurs de l’Histoire de la Martinique. En sacralisant le coutelas, Christian Bertin rend hommage aux luttes passées, mais suggère aussi que l’instrument de travail détourné de son usage premier par les esclaves puis les travailleurs agricoles, qui l’ont transformé en arme de la révolte, lui permet
aujourd’hui, et à son tour, d’inscrire son action et sa pensée artistique dans l’Histoire. Ici, réside l’idée de transformation, évoquée également par les cinq tubes qui peuvent aussi s’apparenter à cinq cuves d’une distillerie ou cinq pipelines de l’industrie pétrochimique. Dans ces cinq tubes, s’est opérée symboliquement une fermentation puis une transformation qui a mené à l’action.
L’œuvre de Christian Bertin veut communiquer au public la force de cette action, de cette main qui impulse un mouvement vertical tel un soulèvement, de cette main qui surgit de la terre dans un élan d’espoir. De plus, la force du geste de la révolte est visible dans la série des petits coutelas placés sur les hauteurs de l’œuvre.
Ils font aussi directement référence à l’œuvre réalisée par Christian Bertin en 1997 Rosalie Soleil, Madeleine Clem et les autres, présentée récemment à la Fondation Clément au sein de l’exposition collective « Picturale ». Cette oeuvre était un premier hommage aux acteurs de l’Insurrection de 1870 et plus précisément aux femmes guerrières. Dans cette pièce, cinq coutelas sont plantés dans cinq planches de l’ancien ponton de Bellefontaine récupérées par l’artiste au moment de son démantèlement.
Pour 1870-1871, Christian Bertin reprend un dispositif similaire, remplaçant les planches du ponton par les tubes rouillés. Or sur l’un des tubes, oblique, positionné au centre de l’oeuvre, le coutelas n’est pas présent. Il a été remplacé par une couronne en métal dont les motifs reprennent ceux de la feuille de ricin, présente dans les cataplasmes qui servaient à diagnostiquer la Blesse.
Ce tube apparaît comme un point d’interrogation.
Il questionne le regardeur : que vont faire les générations futures ? Comment vont-elles s’approprier l’événement historique commémoré par l’oeuvre ? Comment vont-elles prendre en main leur destin ? Vont-elles poursuivre le chemin amorcé par leurs aïeux qui défendaient leur droit à l’accession à la propriété, à la terre ?
Seront-ils en pleine possession de leurs propres moyens de production ? C’est ici une allusion au mot d’ordre lancé par le quimboiseur Eugène Lacaille en 1870 qui revendiquait le partage des terres. Ces revendications ont eu pour effet de souder, d’unir les travailleurs agricoles dans leur lutte.
1870-1871 prend place sur une dalle en béton qui cimente les cinq éléments soudés en une unité. Cette dalle qui unie représente la paume de la main, celle-ci qui rend possible les articulations et les actions de l’homme en prolongement de sa pensée. L’oeuvre propose implicitement au visiteur de s’interroger sur ses propres actions, inscription et positionnement dans l’Histoire. Le public se situe exactement dans un axe vertical entre la terre et le ciel, au centre de l’oeuvre et de la création, dans une continuité. Deux bancs de couleur bleu indigo sont mis à sa disposition pour se recueillir, contempler l’oeuvre, se souvenir et penser les blessures de cette terre gorgée de sang, une terre porteuse de mémoire, où huit Insurgés ont été fusillés pour avoir mené un combat pour la Justice. Ces deux bancs font allusion, pour Christian Bertin, aux bancs d’oiseaux migrateurs qui traversent miraculeusement les frontières politiques, économiques et culturelles, pour trouver des zones de repos.
Laurence Henry, Commissaire d’exposition Extrait de la note d’Intention, mai 2019
11- Installation d’une œuvre d’art dans l’espace public
Pourquoi une œuvre d’art dédiée aux Insurgés de 1870 ?
L’Insurrection du Sud qui démarre en 1870, après l’Abolition de l’esclavage, est l’un des grands événements ayant marqué l’Histoire de la Martinique. Cette révolte populaire, à l’initiative de femmes et d’hommes du monde agricole, qui a été réprimée de manière brutale et inique, est ancrée dans la mémoire collective du peuple martiniquais.
Cette page d’Histoire a déjà fait l’objet d’ouvrages.
Elle a inspiré nombre d’artistes, mais force est de constater qu’elle demeure encore peu et mal connue du grand public.
Il nous appartient donc de mieux faire connaître ces événements et de mettre en lumière leur portée sur le devenir de la société martiniquaise, dans ses idéaux et ses fondements.
C’est ainsi que lors du Conseil Exécutif du 12 avril 2018, a été validé le lancement d’un appel à projets invitant les plasticiens de Martinique à concevoir une oeuvre d’art portant sur cet événement et rendant hommage à celles et ceux qui en sont les initiateurs et les héros.
A travers cette opération, la Collectivité Territoriale de Martinique poursuit l’un des axes forts de sa politique culturelle dédiée à la commémoration des temps forts de notre Histoire.
La consultation a été lancée le 19 mars 2019.
Un comité technique de sélection, composé des membres suivants, a été mis en place en vue de la sélection des candidats :
• Madame Marie-Hélène Léotin, Conseillère exécutive en charge du patrimoine et de la culture,
• Madame Christiane Emmanuel, Présidente de la Commission culture, identité et patrimoine,
• La DGA Culture, Jeunesse et Sports,
• La DGA infrastructure et équipement,
• Audry Liseron-Monfils, artiste et directeur du Campus Caribéen des Arts,
• Bertin Nivor, artiste.
Le projet qui a été retenu est porté par l’artiste martiniquais Christian Bertin, associé au Cabinet d’architecture de Christian Sainrimat. Le résultat est aujourd’hui visible sur le site du « Polygone Desclieux », à Fort-de-France, à proximité de l’école Emilie Fordant.
Polygone Desclieux » où 8 Insurgés ont été fusillés, dont Eugène Lacaille, l’un des leaders de l’Insurrection.
Cette oeuvre monumentale a été imaginée, pensée et conçue par un artiste qui de tout temps s’est intéressé à l’Insurrection du sud et aux Insurgés, notamment Lumina Sophie dite « Surprise » condamnée aux travaux forcés à perpétuité, le 8 juin 1871.
L’inauguration de l’oeuvre a eu lieu le 23 novembre 2019, en présence de l’artiste et du Président du Conseil Exécutif, M. Alfred Marie-Jeanne. Elle permettra de diffuser cette mémoire et de la partager avec les générations actuelles et futures.
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Chronologie des événements
• 19 Février 1870
Début de l’Affaire Lubin, jeune entrepreneur martiniquais originaire du Marin, roué de coups par Augier de Maintenon, fonctionnaire métropolitain. Cela se passe sur la route de Grands-Fonds, entre le Marin et Rivière-Pilote. La plainte déposée par Lubin reste sans suites.
• 25 avril 1870
Règlement de comptes entre Lubin et de Maintenon.
• 19 Août 1870
Condamnation de Léopold Lubin : 5 ans de bagne, 1500 francs de dommages et intérêts. Parmi les jurés, le béké Codé, propriétaire de La Mauny, qui se vante partout d’avoir été celui qui a fait condamner « le nègre qui a osé lever la main sur un blanc ».
• 22 septembre 1870
Proclamation de la République sur la place de la mairie de Rivière-Pilote. Début de l’Insurrection aux cris de « Mort aux blancs ! », « Mort à Codé ! », « Vive la République ! ». Principaux dirigeants : Louis Telga
(Telgard) et Eugène Lacaille. Incendie de l’Habitation La Mauny.
• 24 septembre 1870
Exécution de Cléo Codé au Morne Vent. 27 habitations incendiées : Rivière-Pilote (14), à Rivière-Salée (3), à Sainte-Luce (3), au Saint-Esprit (7).
• 25 septembre 1870
La révolte et les incendies d’habitations s’étendent au Marin, au Vauclin, à Sainte-Anne. Un millier d’Insurgés au total.
• 25 Septembre 1870
Proclamation de l’état de siège dans 15 communes de Martinique.
• 26 septembre 1870
Les troupes d’infanterie de marine et les volontaires de la milice attaquent l’habitation d’Aubermesnil (Saint-Esprit) où avait lieu un début de partage des terres.
Lourdes pertes pour les Insurgés.
• 26 septembre 1870
Derniers combats à Régale (Morne Honoré), dans le camp retranché établi sur la propriété d’Eugène Lacaille. Plus de 500 arrestations.
• Septembre-Octobre 1870
Agitation et incendies sur des habitations de Sainte-Marie, Basse-Pointe et Grande-Anse du Lorrain.
• Mars à mai 1871
Ouverture des procès devant le Conseil de Guerre.
• 10 juin 1871
Condamnation de Lumina Sophie aux travaux forcés à perpétuité pour incendie et pillage.
• 25 novembre 1871
Exécution d’Eugène Lacaille au Polygone Desclieux à Fort-de-France.
• 22 décembre 1871
Déportation de Lumina Sophie au bagne de Guyane.
• 15 décembre 1879
Décès de Lumina Sophie à Saint-Laurent du Maroni.
• Octobre 1880 : Amnistie pour les Insurgés.