— Par Jean Samblé —
Dans un récent rapport, la Cour des comptes a dénoncé la gestion défaillante de la Caisse Générale de Sécurité Sociale (CGSS) de la Martinique, pointant un fonctionnement inefficace et une qualité de service largement insuffisante pour les assurés. Ce constat accablant, fondé sur des évaluations précises de la gestion des prestations de santé et de retraite, révèle une série de dysfonctionnements administratifs, financiers et humains. La Cour insiste sur l’urgence d’une réforme structurelle pour garantir un service de qualité aux Martiniquais.
Des délais de traitement démesurés et des préjudices pour les assurés
La Cour des comptes révèle que les Martiniquais font face à des délais de traitement bien au-dessus de la moyenne nationale. En effet, le temps nécessaire pour examiner une demande de retraite atteint 183 jours, soit 60 % de plus que les standards nationaux. Ces retards ne se limitent pas aux pensions, la branche maladie étant également touchée. Les feuilles de soins non remboursées représentent un montant de 300 000 euros, laissant de nombreux assurés dans une situation de précarité. La juridiction relève que ces dysfonctionnements, bien que légèrement atténués en 2024, restent préoccupants.
Des pratiques de gouvernance dénoncées
La gestion interne de la CGSS est sévèrement critiquée. Selon le rapport, la gouvernance de la caisse est entachée de dérives majeures, avec des manquements notables aux règles en vigueur. Par exemple, les administrateurs ont bénéficié de dépenses non conformes, allant de l’achat de cadeaux, dont des parapluies et draps de bain, à des frais somptuaires pour des montres et un véhicule pour le président du conseil d’administration. La Cour déplore l’absence de pilotage rigoureux, notant que les conseils d’administration successifs ont négligé les principes d’intégrité et d’efficacité essentiels à la gestion d’un organisme de cette importance.
Une gestion des ressources humaines en décalage
Les défaillances ne s’arrêtent pas là : la gestion des ressources humaines souffre également de failles importantes. La Cour relève que 20 % des heures de travail n’ont pas été réalisées en 2023, conséquence d’une instabilité managériale marquée par plusieurs changements de direction. De plus, le recours accru à des prestataires externes a grevé les finances de la caisse sans pour autant améliorer le service rendu. L’institution est ainsi jugée incapable d’assurer un suivi approprié des missions confiées, nuisant aux usagers qui pâtissent de cette inefficacité.
Un appel à la réforme ou à l’administration provisoire
Face à l’ensemble de ces constats, la Cour des comptes recommande un projet de redressement profond et immédiat, basé sur la refonte de l’organigramme, des processus et de la gouvernance. En l’absence de progrès rapides, la Cour envisage de placer la CGSS sous administration provisoire pour restaurer l’efficacité et l’intégrité de cette institution centrale du système de protection sociale de la Martinique.
Le directeur général de la CGSS, Maclou Rigobert, reconnaît ces défis et assure que des efforts ont été engagés pour redresser la situation. Toutefois, la Cour rappelle que seule une réforme structurelle ambitieuse pourra garantir des services adaptés aux besoins des Martiniquais.