— par Jean Durosier DESRIVIERES —
Ces rencontres organisées en ce mois de novembre, ayant pour thème ou problématique : « Marcher sur nos morts », coïncident harmonieusement au mois des Guédés, en Haïti. Pour ceux qui l’ignorent, je dirai succinctement que les guédés sont des loas, des génies ou des esprits du Vaudou : ce sont des loas de la mort, mais aussi de la vie, car de la putréfaction renaît la vie immortelle. Ce sont les loas les plus étranges du panthéon vaudou, dit-on : leur rituel dévoile le tragique le plus macabre et l’érotisme le plus débridé. Barron Samedi, aussi dénommé Barron Cimetière ou Barron Lacroix, serait la figure la plus représentative des guédés. En effet la croix de Barron, symbole des guédés, indique la croisée des chemins qui guette tout un chacun. Et on y parvient tous, chacun à son heure. La croix de Barron, c’est ce pieu vertical qui renvoie au phallus (éros, la vie) et cette bande horizontale qui renvoie au tombeau (thanatos, la mort).
Notons que le Vaudou, qui est plus une vision cosmique qu’une religion, conçoit le monde comme un éternel cycle, contrairement à la conception judéo-chrétienne qui porte foi à l’alpha et l’oméga, au commencement et à la fin. Il n’y a donc ni commencement ni fin dans la théologie vaudoue : la mort n’est point cessation totale de vie, mais une étape d’une tradition circulaire ; il y a de la mort dans la vie, vice-versa. Ainsi, chez les guédés, on dirait qu’on se moque de la mort, puisque de toute façon il n’y a que la vie en fin de compte, la vie ici et au-delà.
Ces données culturelles, mystiques et transcendantes, qui en toute apparence constituent un pan de l’identité haïtienne, semble ne point influencer (idéologiquement), de près ou de loin, un poète comme Georges Castera dont l’écriture est pourtant fortement ancrée dans sa terre natale, son lieu de vie et d’expérience artistique :
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Georges Castera |
j’ai enterré mon poème
dans ma terre
pour qu’il grandisse avec les mots
de ma terre (« Chant de fracture », Le trou du souffleur)
Je vous entraîne mesdames, mesdemoiselles et messieurs dans deux univers quasi parallèles : l’univers populaire de ce poète, peuplé de réalités magiques et de croyances étonnantes ; et son univers personnel et poétique nourri à la fois du réel (du concret, du quotidien) et de l’imaginaire (du symbolique, du ludique et de l’onirique). Dans ces deux univers, surgissent diverses postures, voire impostures, face à la mort. Je m’attarderai donc davantage dans celui du lyrisme qui dévoile, comme l’indique une partie de mon intitulé, « un langage à double canon ». Je dis « double canon », comme j’aurais pu dire double engagement (politique et poétique), double expression (créole et française) ; canon aussi, pour dire les critères qui conditionnent la parole du poète (je vous signale que le poète écrit dans deux codes (créole et français) : pour la commodité de la communication je m’astreins à n’évoquer que son œuvre de langue française). Il y a double expression dans une même langue (le français), dans un même langage (la poésie) : un langage qui transcende le tragique singulier (propre au lieu de vie du poète), parce qu’« aucune douleur n’est neutre / toute douleur est nôtre » (Joubert Satire, Coup de poing au soleil, éd. Mémoire d’encrier 2004).
« Un langage à double canon pour dire l’indifférence », l’indifférence face à la mort, l’indifférence face à la mise à mort, face à l’arrachement de la vie. Dire l’indifférence, c’est autrement dit, dénoncer la banalisation de l’horreur et du barbarisme, aussi moderne soit-il, dénoncer la banalisation de l’extinction de l’homme. Voilà donc affiché mon parti-pris, vis-à-vis de la compréhension du thème et de son traitement à la lumière de l’œuvre du poète. Œuvre oh combien paradoxale, comme on le verra !
Ainsi, j’entends le syntagme « marcher sur », comme piétiner, mépriser, oublier, nier, dénier ; j’entends « marcher sur », comme passer son chemin, passer outre, se taire, laisser faire, être un « n’y voit rien », insensible aux traces, aux empreintes, aux preuves du tragique de l’Histoire. Je saisis le syntagme « nos morts », d’une part, comme des corps réels, devenus éternellement froids, éternellement muet, des cadavres pleins de violences dedans lesquels cagoule le vent (« Autour », Voix de tête) ; je saisis « nos morts », comme des anonymes, des êtres qui furent, des portraits sans noms, sans identité, sans visage (clin d’œil à l’exposition du plasticien Ernest Breleur, Portraits sans visage), sans souffle ; je saisis « nos morts », d’autre part, comme des êtres vivants, pétris de silence et de surdité entêtés, des zombis, des ombres tranquilles, des spectateurs immobiles ; je saisis enfin « nos morts », comme des légendes poudreuses, des blessures miaulantes, inopérantes, sur lesquelles misent des hommes qui n’ont plus de couilles pour relever les défis de leur temps.
Cette saisie de la thématique fait écho au discours essentiel de Castera chez qui il y a constat et combat de la mort. L’idée de combat me renvoie brusquement à un sens tout autre, tout à fait créole, que suggère « marcher sur nos morts » : « mache sou mò nou yo, koresponn ak mò nou yo », affronter nos morts, aller vers eux, faire face à eux, les interroger (au sens intellectuel) une fois pour toutes. Vous comprendrez qu’ici, le discours ou la voix que je compte explorer, qui se pose comme solitaire et solidaire, ne s’accommode d’aucun mysticisme, d’aucune métaphysique. Le « Vodou » n’est évoqué dans cet univers que pour subir l’épreuve critique de la conscience lucide du poète, pour être dépouillé de certaines puissances hallucinatoires :
Au Bois Merci
il fait nuit noire sur Port-au-Prince
de la trappe invisible des mots de passe
passe une tête
une tête de cabri nous sert à boire (« Vodou », Le trou du souffleur)
C’est quand même drôle ! Comment fait-on pour percevoir une « tête de cabri » dans la « nuit noire » ? Nous sommes en plein dans la prise en compte de la matière, ici, la prise en compte du matérialisme (au sens de Marx – un matérialisme loin d’être moribond), prise en compte du monde physique, objectif : un univers où pour rebondir plus haut, on préfère l’élasticité des branches de goyavier au subjectivisme des dieux (« A la criée publique », Ratures d’un miroir). Les seules énigmes valables sont des images qui créent le mystère et le miracle inhérents à toute œuvre de beauté comme à la vie, à la poésie.
Mon voyage avec vous dans cet univers tiendra compte de trois poèmes-balises ; et je commencerai par « La lettre sur mer », tiré de la composition : Les cinq lettres.
Le temps menace la ville
d’un canon de rides
Tu m’écris que les arbres
étranglent les oiseaux
et que la mort fait mouche
sans jeu de mots
le bilinguisme entre les cuisses
Je ne sais plus si dehors
ma passion atterrit en catastrophe
ou si…
trois points suspensif
La lumière s’est changée en cris
le vent blessé est introuvable
J’ai pris tous les risques
sans drapeau blanc
jusqu’à la cime des mots
Ville absolue dans l’éphémère
ville abrutie dans le mal-vivre du poème
ville pour l’anecdotique vie
sans importance
sans porte de secours
sans porte de sortie
vie portée à vue par la mer
sous poids de barbelés
« La mort fait mouche ». Cette métaphore apparemment banale recèle en puissance un paradoxe qu’apprécierait un Gilles Deleuze, parce qu’il y a bien en ce lieu « différence et répétition ». Le poète exige de nous une grande perspicacité pour déceler ici, une perversion singulière, un effet de langue sous la langue dans la langue. Le français laisse subtilement entendre le créole : dans le premier code (français), la mort atteint sa cible, puisqu’elle frappe l’un des plus petits parmi les êtres vivants : l’oiseau qui égaye la vie. La mort nous atteint en plein cœur, en plein champ / chant.
Dans l’œuvre originelle (Les cinq lettres) le texte se met en résonance avec un dessin du poète (vous devinez que le poète est aussi dessinateur) : l’image symbolique d’un oiseau traversé par un trou que l’on suppose être la trajectoire d’une balle. Ce trou se trouve lui-même traversé par des cordes cassées, symbolisant l’interruption du chant de la bête innocente. Ainsi, « la mort fait mouche » (imagé, abstrait). Dans l’autre code (le créole), on discerne littéralement, « lanmò fè mouch, lanmò kreye mouch, lanmò atire mouch », les cadavres attirent des mouches (réel, concret). Ceci se dit entre les lignes : « le bilinguisme entre les cuisses », l’angle des langues parallèles, l’interstice et le point de fuite de la jouissance sexuelle, de la jouissance textuelle.
Nous nous aventurons dans un univers où le tragique côtoie curieusement l’érotique, un espace où se joue le drame de la souffrance et de la jouissance. Nous nous aventurons dans un lieu (le poème) qui porte, en même temps, la voix subjective d’un créateur, endossant fréquemment celle d’un collectif, et la voix objective d’un penseur dont le langage prend souvent un caractère sentencieux. Le sujet qui dit « je » joue le « je », il joue le « moi » aminci de subjectivité, aminci de l’émoi central. Le travail de réflexion assidue, sur le texte dans le texte, présuppose une conscience alerte, une relation de réflexivité (« sans jeu de mots ») et une exigence esthétique. L’engagement (politique) n’est point subordonné à la médiocrité : « j’ai pris tous les risques / sans drapeau blanc / jusqu’à la cime des mots », pour constater, dénoncer et résister aux forces ténébreuses. Le poème lève le voile sur la « vie portée à vue par la mer / sous poids de barbelés », la vie telle un fleuve d’êtres humains désespérés qui se jette dans la mer, « la mer qu’est la mort », dirait le poète argentin Manrique.
Deuxième poème-balise : « Litige », Voix de tête.
Ce matin
les fleurs ont joué aux dés
sur le trottoir
A côté il y avait du sang
les passants n’ont rien dit
Une poule folle
est allée pondre sur l’oreiller
il s’en est suivi alors un débat
public à la radio
sur l’avenir des enfants
la montée des prix
la guérilla en Amérique Latine
Les jours passent
Tous les actes délictueux
insolites
troublent ma phrase d’intempérie
et
le poème devient un instrument
de percussion du quotidien
un instrument de répercussion
des jours sans festin ni destin
la pièce à conviction
de procès à venir
J’ai parlé des fleurs comme on parle des morts
avec la gravité
d’une voix chauve
Si vous croyez que je parle des fleurs
pourquoi
frapper d’interdit
l’aube cérébrale qui se lève
la poésie qui vous parle du bout des ongles ?
La parole du poète part d’un temps historique présent – perçu comme répétition persistante et agaçante du passé – pour se projeter dans l’absolu, « ce qui manque le plus / aux mots inaccessibles / du quotidien » (« Stridence », Brûler). L’articulation du poétique et du politique s’impose, parce que l’écriture est « un acte de solidarité historique […], le rapport entre la création et la société » (Roland Barthes). La voix s’élève dans le poème et pose « pour constat » ce que la tête appréhende des dures réalités, des scènes intolérables du quotidien : on ne dit rien du sang qui coule, on ne dit plus rien du sang qui coule, peu importe où il se coule, on se tait – or « même le silence est puni de mort / ici » (« Au souffle des marées basses », Voix de tête). On se tait, on en a l’habitude, l’habitude nous prend sur mesure, on a le sens de l’habitude et elle pousse notre bon sens à se frayer un chemin entre « le beau parler des prétoires » (débat public à la radio, etc.) et « le néant quotidien » ; nous nous frayons un chemin entre « barbares et barbelés », entre phrases publicitaires et peurs domestiquées. On se tait, on fait des fuites en avant, on nous fait ainsi un destin sur mesure.
Aussi notre présent se regorge de fantômes, d’illustres défunts, de merveilleux ancêtres souvent convoqués pour se mêler de nos affaires, des affaires des vivants, pour attester leur impuissance et leurs lâchetés au regard des délits. Le poète, lui, regarde ces aïeux du haut de leur passé glorieux et leur accorde honneur et respect qui leur sont dus, et passe vite à autre chose : « Même quand mon ombre est penchée / je garde la tête droite / Il ne faut pas laisser aux morts / l’initiative de la lumière / Debout partisans » (« La station de bout », Voix de tête). Le poète prend donc acte en dissimulant ses preuves aux dos des métaphores. La poésie met tout à nue en prenant tous les risques de la lucidité (« Exploration », Le trou du souffleur) pour colporter le tragique et les tragédies du lieu de vie personnel de l’artiste, associées à tous les tragiques et tragédies du monde (clin d’œil à Ernest Breleur). Le « je » du poète se veut personnel et impersonnel à la fois ; et je préciserais en citant Jean-Michel Maulpoix : « Si personnel soit-il, le sujet lyrique se voit contraint, sinon de se dépersonnaliser, du moins de traduire sa propre expérience en traits généraux et universels ».
Troisième poème-balise : « Télégramme », Le trou du souffleur.
arbre à pain
recherche boulangeries
éphémères STOP
prière de s’adresser préférablement
aux heures de fermentation STOP
punaise des bois
parodie de sang frais STOP
recherche parfumerie
là où l’eau a jeté ses morts STOP
en Haïti STOP
mourir est une fin de semaine
comme une autre STOP
Ce poème ne m’est que prétexte pour creuser davantage les sens qui se dégagent du Trou, d’où il est tiré. Le titre de cette dernière composition, que dis-je, de cette dernière représentation poétique est riche à plus d’un titre. Le trou du souffleur se décline à mes yeux en trois « S » qui font écho au contenu de l’œuvre. Trois « S » comme : scène, sexe (féminin) et sépulture.
Il y a chez le poète une manière de mettre en scène l’écriture, une manière de mettre en scène le poème. Cette manière confère logiquement au créateur qu’il est un statut de metteur en scène, de « mèt pyès ». Or le voici qui semble se reléguer au statut d’un simple souffleur. Le créateur n’a point de regard ou d’emprise absolue sur l’ensemble de la scène instaurée par lui-même, puisqu’il se retrouve dans une cavité en tant que souffleur, en avant-scène.
Or, qu’est ce qu’un souffleur, sinon qu’un personnage effacé, invisible, terré dans un trou, quasi inexistant : un mort. On découvre dans cette métaphore le poète marginal et marginalisé qu’a été Castera pendant presque tout son parcours, un poète dont l’œuvre continue à voyager presqu’au noir. Mais aussi, qu’est-ce qu’un souffleur, sinon celui qui de son trou pue considéré redonne souffle, redonne vie au drame humain, redonne vie à la comédie humaine qui se joue par des acteurs souvent piégés par des trous de mémoire. Le poète est ce souffleur, ce mort-là qu’on ignore, mais qui « refuse d’être ce mort-là ». Le poète est cet être vigilant, ange ou démon, qui comble par l’imaginaire de nombreux trous de mémoire, celui qui transmet par les mots le souffle qui manque aux hommes, le supplément d’âme qui nous arrive par questionnement :
je questionne les rendez-vous
de la mer avec l’Histoire
les rendez-vous de l’homme
avec les tombes d’eau salée
je parle dans mon silence
à mon silence
je parle par effraction de vocabulaire (« Chant de fracture », Le trou du souffleur)
En avant-scène du théâtre du quotidien poignant, ce théâtre qui se ressource des scènes les plus immédiates et d’actualités lugubres, le poète, rempli de désirs, transmet la parole essentielle à la foule des hommes qui bafouillent : « le baiser pour nous n’est pas une / langue morte / l’amour construit des espérances / qui font vibrer la chair » (« Parcours insoluble », Le trou du souffleur). Le trou du souffleur, c’est aussi le trou de la chair, le sexe de la femme, l’espace utérin, l’origine du monde, source de vie, de jouissance et de plaisir : entre tes jambes, je nais et meurs. Le trou du souffleur, c’est aussi le texte dans lequel se réfugie le poète, le texte tissé d’excès de mots essentiels, des mots frondeurs qui brûlent les pages de l’écriture comme on brûle les planches de la scène.
Avec la femme et les mots, grâce à la femme et les mots, on peut « marcher sur la mort », l’affronter, l’interroger sans crainte. « A chaque question que tu poses à la vie / notre amour est la bonne réponse », voilà la seule « Ethique » qui vaille dans Le trou du souffleur. Il y a la poésie et l’amour pour résister aux jours et aux nuits de malheur, la poésie et l’amour pour dire le bonheur à inventer dans une ville en lignes de murs :
contre murs et rumeurs
de la ville
la pointe de tes seins
nourrissant mon vertige
comme la blessure d’un fruit
rendue à l’espace éternel (« L’ovation des sens », Le trou du souffleur)
La ville : synecdoque d’un pays tout entier ; « en Haïti STOP » : cet espace nous conduit au point culminant de la métaphore, Le trou du souffleur. Le trou du souffleur, c’est donc d’abord le pays, le lieu de vie, le lieu de création du poète, un sépulcre à ciel ouvert, un vaste nécropole dévasté, un théâtre macabre où se joue le drame de la vie : ici, « mourir est une fin de semaine comme une autre » ; ici, la mort n’est qu’une ritournelle ; ici, le tombeau guette constamment le poète ; ici, le poète se tient déjà au tombeau ; ici, surgit l’œuvre ultime du poète, Le trou du souffleur. L’œuvre expose un lieu de vie et de création travaillé par la mort, l’obsession de la mort. Mais au-delà de ce néant quotidien, subsiste l’œuvre que nous livre le poète comme porteuse de vie, opportunité de poésie, occasion de beauté.
Voici que le livre déjà n’est que feuilles mortes, risquant l’indifférence, quand j’aurai tourné la dernière page, pour oublier sans doute, et les premiers, et les derniers mots. En attendant d’autres occasions éventuelles de la ressusciter, écoutons les « Mots d’enfant pour saluer le mouvement » de la dernière marche :
Chaque nuit dans l’essoufflement
les mots s’éteignent
dans la gueule des rats
l’enfant poète dit à sa mère :
dans le bois aux métaphores mère
il y a des roses qui dorment debout
est-ce cela la mort ?
dormir est une débâcle
vers d’autres jours qui se lèveront
sans moi
les fenêtres tireront au sort
des papillons de nuit
pour allaiter l’infini
mère j’ai si souvent voyagé
sans métaphores
dans la mort
dit l’enfant poète
« j’ai la profonde lassitude
de qui a vu le soleil
se coucher sur le dos
dans son urine
les tombes ouvertes tonsurent
les croyances ostentatoires
les squelettes embossés rendront les
cœurs telles des embarcations
comment faire taire la mort ?
on ne guérit pas de la mort
Merci !
Esquisse biobibliographique
Georges Castera fils est né à Port-au-Prince, le 27 décembre 1936, d’un père médecin et syndicaliste. Sa scolarité s’est déroulée en Haïti, principalement, et au lycée de Montpellier (France). Jeune, il a fréquenté Jacques-Stéphen Alexis, Hervé Télémaque et d’autres grands écrivains et peintres haïtiens. En 1956, quand il part en Espagne pour des études de médecine, il est déjà poète et dessinateur, très prometteur. L’établissement de la dictature de François Duvalier le contraint à l’exil. Il renoncera à l’art d’Hippocrate au profit de la littérature.
Après avoir vécu plus de dix ans en Europe, le poète passera aux Etats-Unis où il mènera une vie de militant politique intense. Dans les années 1970, il travaille au théâtre avec deux grands metteurs en scène haïtiens, Syto Cavé et Hervé Denis. En 1974, il publie son premier livre de poésie de langue française, Le retour à l’(ar)bre, en collaboration avec le peintre Bernard Wah. Aussi, dans son exil, on discerne sous sa plume l’intelligence d’un critique intraitable (il a collaboré à différentes revues internationales, notamment Europe). Créateur tout à fait engagé, il publie divers recueils en créole, notamment Konbèlann (1976) : un recueil de recueils.
Il retournera au pays natal après la chute de Jean-Claude Duvalier en 1986. Paraîtront sous sa plume, en français, Ratures d’un miroir (1992), Les cinq lettres (1992), Quasi parlando (1993), Voix de tête (1996), Brûler (1999) et Le trou du souffleur (Prix Carbet 2006) ; en créole, Gate priyè (1990), A wòd pòte (1993), Rèl (1995, mention spéciale du jury du prix Carbet), Jòf (2001), entre autres recueils. Presque toutes ces compositions ont été publiées à compte d’auteur.
Georges Castera est actuellement secrétaire adjoint de l’Association des écrivains haïtiens et codirecteur de Boutures, revue d’art et de littérature publiée par les Éditions Mémoire (Haïti). Il collabore aux revues Conjonction, Chemins Critiques, Notre Librairie… Certains de ses poèmes ont été mis en musique par d’excellents musiciens haïtiens.
Jean Durosier DESRIVIERES
Profil de Jean Durosier DESRIVIERES
Né en Haïti, Jean Durosier DESRIVIERES vit depuis 1999 en Martinique. Certifié de lettres modernes de L’Ecole Normale Supérieure d’Haïti et lauréat de sa promotion, il a consacré des travaux de recherche à l’UAG sur la poésie en langue française de Georges Castera. Il est aussi le préfacier du dernier recueil du poète, Le trou du souffleur, prix carbet 2006. Il prépare actuellement un doctorat en littérature francophone générale et comparée.
Auteur de poèmes et d’articles littéraires et critiques publiés dans Conjonction (Revue franco-haïtienne), Orphéus (Revue internationale de poésie), Le Nouvelliste et Le Matin (deux quotidiens haïtiens). Vice-président de l’Atelier de Création, de Recherches et d’études en Littérature Comparée, il enseigne les lettres en Martinique et s’intéresse de plus en plus à l’art de la scène.