La Fabric’A : un lieu de répétitions et de résidence pour les artistes du Festival d’Avignon
Défendue par Hortense Archambault et Vincent Baudriller dès leur premier mandat de directeurs, la construction d’un lieu de répétitions et de résidence, destiné aux artistes invités à créer des spectacles pour le Festival d’Avignon, est un élément clé du développement de ce dernier. Ce projet devient aujourd’hui réalité sur une parcelle de terrain située à l’intersection des quartiers de Monclar et de Champfleury, mise à disposition par la Ville d’Avignon.
Ce lieu, destiné à fabriquer des spectacles pour le Festival d’Avignon, a été baptisé la . Il a été dessiné par l’architecte Maria Godlewska, désignée en septembre 2011 par un jury présidé par Louis Schweitzer. Le Festival d’Avignon en assure la maîtrise d’ouvrage, assisté de Citadis. Les travaux débuteront en mai 2012 pour une livraison en juin 2013
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Un feu d’artifice lancera la 67e édition du Festival d’Avignon, qui aura lieu du 5 au 26 juillet. Il sera tiré par le Groupe F, qui embrasera la FabricA, la nouvelle salle voulue par les co-directeurs, Hortense Archambault et Vincent Baudriller. Située hors des remparts, à la croisée de quartiers sensibles, cette salle permettra à des artistes de travailler tout au long de l’année, et de répéter sur un plateau aux dimensions de la Cour d’honneur du Palais des papes. Pour Hortense Archambault et Vincent Baudriller, la FabricA représente le point d’orgue de l’action qu’ils ont menée pendant dix ans, et qui prendra fin cette année. En 2014, Olivier Py leur succèdera, ouvrant une nouvelle page dans l’histoire du festival créé en 1947 par Jean Vilar.
L’avant-programme de cette 67e édition est en ligne, sur le site du festival. Le programme définitif sera communiqué en mai, et la location ouvrira le 17 juin. Il ne devrait pas apporter de changements majeurs, mais des compléments d’information. Comme ils l’ont toujours fait, Hortense Archambault et Vincent Baudriller ont bâti leur programmation en travaillant avec des artistes associés. Cette année, ce sont Dieudonné Niangouna et Stanislas Nordey. L’auteur, metteur en scène et comédien de Brazzaville (Congo) créera une pièce qu’il a écrite, Shéda, à la Carrière de Boulbon. Le Français mettra en scène Par les villages, de Peter Handke, dans la Cour d’honneur. Tous les deux seront aussi présents comme acteurs : Stanislas Nordey dans L’Argent, de Christophe Tarkos, monté par Anne Théron ; Dieudonné Niangouna dans Sans doute, un choix de textes contemporains mis en scène par Jean-Paul Delore.
Dans son sillon, Dieudonné Niangouna entraîne une forte présence de l’Afrique, ce qui est une bonne nouvelle. De nombreux artistes du continent, dont beaucoup sont invités pour la première fois, seront présents à Avignon : DeLaVallet Bidiefono (de Brazzaville), Faustin Linyekula (de Kinsangani), Qudus Onikeku (de Lagos), Aristide Tarnagda (de Ouagadougou), Brett Bailey (du Cap), Kiripi Katembo Siku (de Kinshasa)… Par ailleurs, des artistes européens présenteront des spectacles liés à l’Afrique. Signalons en particulier le théâtre-documentaire du Rimini Protokoll (Lagos Business Angels, sur les hommes d’affaires du Nigéria) et de Milo Rau (Hate Radio, consacré au Rwanda).
Dans un tout autre registre, Hortense Archambault et Vincent Baudriller, à qui il a été reproché de négliger les grandes œuvres du répertoire, mettent cette année la barre haut, avec le Faust de Goethe mis en scène par l’Allemand Nicolas Stemann. Ils proposent également un Roi Lear, de Shakespeare, revisité par Frédéric Boyer, Olivier Cadiot et Ludovic Lagarde, et la création, par Jean-François Peyret, de Walden ou la vie dans les bois, de l’essayiste Henry David Thoreau, adepte de la non-violence.
Il y aura ainsi beaucoup à méditer, et à découvrir, dans cette 67e édition, qui réunit de nouveaux venus (Ginterdorfer/Klassen, Jean Gosselin, Sandra Iché, Lazare…) et des artistes déjà invités au festival : Angélica Liddell, Jan Lauwers, Krzysztof Warlikowski, Anne Tismer, Katie Mitchell ou Sophie Calle.
En danse, un principe semble avoir dicté les choix d’Hortense Archambault et Vincent Baudriller : peu, mais en grand… et en décalé. Le chorégraphe Jérôme Bel aura ainsi les honneurs de la Cour, où il créera un spectacle très proche d’une forme théâtrale, en faisant témoigner seize spectateurs. Et c’est dans la Cour que s’achèvera la 67e édition, avec une création d’Anne Teresa de Keersmaeker et Boris Charmatz sur la Partita n°2 pour violon seul, de Jean-Sébastien Bach. Avec une seule interprète : Amandine Beye
Par Brigitte Salino
Le Monde.fr | 19.03.2013 à 14h07 • Mis à jour le 19.03.2013 à 15h18
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Artistes associés : Dieudonné Niangouna & Stanislas Nordey
Chaque année, avant de composer le programme, Hortense Archambault et Vincent Baudriller, directeurs du Festival, associent un ou deux artistes à la préparation de l’édition à venir. Ensemble, ils dialoguent pour se nourrir d’une sensibilité, d’un regard différent sur les arts de la scène et la création. En 2013, c’est avec l’auteur, acteur et metteur en scène Dieudonné Niangouna et l’acteur et metteur en scène Stanislas Nordey que le Festival se prépare.
> DIEUDONNÉ NIANGOUNA
Auteur, comédien et metteur en scène, Dieudonné Niangouna est l’une des figures du renouveau théâtral du continent noir africain. Directeur artistique de la compagnie Les Bruits de la rue, créée en 1997 à Brazzaville avec son frère Criss, il est également le fondateur du festival Mantsina sur scène, qui se tient en décembre dans la capitale congolaise. Création après création, Dieudonné Niangouna a construit un parcours singulier qui l’a vu débuter, peu de temps avant les guerres civiles des années 1990, comme acteur sur les marchés de Brazzaville et qui le voit, aujourd’hui, présenter ses pièces sur les scènes internationales. À ses compatriotes, comme à tous les spectateurs qu’il rencontre bien au-delà des frontières de la République du Congo, Dieudonné Niangouna propose un théâtre de l’urgence, nourri de la réalité de son pays marqué par des années de conflits intérieurs et par les séquelles de la colonisation française. Éruptive et charnelle, son écriture fait appel à la langue française la plus classique comme à une langue plus populaire, plus orale mais tout aussi poétique, qui n’est pas sans rappeler celle du grand écrivain congolais Sony Labou Tansi. Si le théâtre de Dieudonné Niangouna repose sur un verbe vif, acéré et réinventé, sur une «langue vivante pour les vivants , ses mises en scène sont également d’une rare expressivité, donnant à voir les dérives de l’homme et de la société à travers d’obsédantes images scéniques.
Le Festival d’Avignon a accueilli à deux reprises Dieudonné Niangouna : en 2007, avec son monologue Attitude Clando et en 2009 avec Les Inepties volantes, un duo où ses paroles se mêlaient aux notes de l’accordéoniste Pascal Contet et nous plongeaient dans la guerre civile du Congo. Après l’écriture et la mise en scène du Socle des vertiges, créé en 2011 au festival international Les Francophonies en Limousin et repris notamment au Théâtre Nanterre-Amandiers puis au Wiener Festwochen, il travaille aujourd’hui à l’écriture et la mise en scène d’un nouveau spectacle pour l’édition 2013 du Festival d’Avignon : Shéda.
> STANISLAS NORDEY
Metteur en scène de théâtre et d’opéra, acteur, Stanislas Nordey est un homme des plateaux. Partisan du travail en troupe, il a été, avec sa compagnie, artiste associé au Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis de 1991 à 1995, avant de rejoindre, avec ses douze comédiens, le Théâtre Nanterre-Amandiers à la demande de Jean-Pierre Vincent qui l’associe à la direction artistique. De 1998 à 2001, il codirige avec Valérie Lang le Théâtre Gérard-Philipe. En 2001, il rejoint le Théâtre national de Bretagne comme responsable pédagogique de l’École (il le restera pendant dix ans), puis comme artiste associé. Chacune de ses facettes lui permet de trouver un équilibre : le metteur en scène fait découvrir des textes au public, le comédien se donne physiquement à la pièce, le pédagogue assure le devoir de transmission. Parce que Stanislas Nordey se reconnaît dans l’expression «directeur d’acteurs», ses mises en scène témoignent de la place essentielle qu’a, selon lui, le comédien. Dépouillées, elles se concentrent sur le geste et la parole pour ne pas imposer au spectateur une lecture unique, mais lui laisser la liberté de construire sa propre vision de la pièce.
Stanislas Nordey est venu au Festival d’Avignon avec Vole mon dragon d’Hervé Guibert en 1994, Contention-La Dispute de Didier-Georges Gabily et Marivaux en 1997, Das System de Falk Richter créé en 2008 et My Secret Garden cosigné en 2010 avec Falk Richter. En tant qu’acteur, on a également pu le voir dans Ciels de Wajdi Mouawad (2009) et dans Clôture de l’amour de Pascal Rambert (2011). Il a récemment mis en scène Se trouver de Luigi Pirandello, Living! d’après des écrits du Living Theatre et montera le texte Tristesse animal noir d’Anja Hilling pour le début de l’année 2013.
LP, novembre 2012
http://www.festival-avignon.com/fr/Artiste/Asso