V.O. Madiana le Jeudi 28 Avril à 19h30
— Par Guy Gabriel —
Réalisateur : Faucon Philippe ; avec Zita Hanrot, Soria Zeroual, Kenza Noah Aïche Genre : Drame Nationalité : Français Durée : 1h29mn Festival : Festival de Cannes 2015
Fatima vit seule avec ses deux filles : Souad, 15 ans, adolescente en révolte, et Nesrine, 18 ans, qui commence des études de médecine. Fatima maîtrise mal le français et le vit comme une frustration dans ses rapports quotidiens avec ses filles. Toutes deux sont son moteur, sa fierté, son inquiétude aussi. Afin de leur offrir le meilleur avenir possible, Fatima travaille comme femme de ménage avec des horaires décalés. Un jour, elle chute dans un escalier. En arrêt de travail, Fatima se met à écrire en arabe ce qu’il ne lui a pas été possible de dire jusque-là en français à ses filles.
Inspiré des textes autobiographiques « Prière à la lune » et « Enfin, je peux marcher seule », écrits par la vraie Fatima (Elayouri), le film de Philippe Faucon est un superbe portrait de femme, une femme marocaine, face à la dure réalité de l’intégration, à la violence de la situation, une situation qu’elle tente de gérer au mieux.
Cette ode à une mère courage est un magnifique film, ode interprétée par Zoria Zéroual, comédienne non professionnelle, qui investit le rôle avec un brio de vieux briscard ; ce portrait ultra-réaliste nous montre une femme de ménage attachante, sorte de prototype de ces gens à la limite du transparent, mais sans qui beaucoup de choses ne pourraient se faire.
Fatima n’est jamais idéalisée, mais montrée dans un combat, qui semble perdu d’avance ; d’autant qu’elle doit aussi faire face à une ado rebelle qui manifeste vis-à-vis d’elle une espèce de suffisance déstabilisante ; heureusement, l’ainée promise à un bel avenir (elle entame des études de médecine)est plus proche de sa mère, établissant une espèce d’équilibre salutaire.
Fatima c’est aussi un film sur les bienfaits du hasard, fut-il malheureux, car il va permettre à Fatima de se reprendre en main et renverser un destin qui lui faisait la nique et des patronnes hautaines humiliantes ;
Ce portrait naturaliste symbolise intelligemment la violence de la vie de ces immigrés, pour lesquels le mot intégration ressemble à un non-sens, générant frustration et isolement.
Ce film montre, avec délicatesse, une réelle humanité qui illumine l’ensemble ; la violence de la situation a, pour contrepoint la douceur du personnage et de la mise en scène de Philippe Faucon, mise en scène avec des cadres épurés et une caméra qui souligne la solitude de Fatima, mère courage, mise à l’écart à cause de son foulard.
Pour boucler le tout, on ne saurait oublier la présence des deux jeunes comédiennes qui jouent le rôle des filles de Fatima, Kenza Noah et Zita Hanrot (meilleur espoir féminin aux César 2016), parfaites toutes les deux. Un film sensible et émouvant.
Avec Nahid (de l’iranienne Ida Panahandeh) et Une femme iranienne (de Negar Azarbayjani , les femmes arabes deviennent des icônes positives.
Guy Gabriel