Fantômes Caraïbes
Cette exposition d’Hugues HENRI perpétue la recherche par cet artiste d’un retour des Caraïbes, ces « Indiens » génocidés, pour la plupart disparus à l’exception des survivants dans la réserve de la Dominique et des îles Karifugas le long du Belize. Il s’agit d’une fiction artistique, non d’une reconstitution basée sur des recherches scientifiques, historiques, archéologiques et anthropologiques.
Les moyens utilisés par Hugues Henri sont traditionnellement plastiques et picturaux mais aussi composites. « La colle ne fait pas le collage ! » avait l’habitude de dire Max Ernst, par rapport à sa démarche néodadaïste du photomontage. Pour lui, l’idée de montage provocateur et d’assemblage insolite dominait par rapport au « faire » du collage inauguré par les « papiers collés » cubistes de Georges Braque et de Pablo Picasso initié dans leur volonté de dépassement des catégories traditionnelles par le recours aux signes matériels du quotidien, papier journal, papier peint, faux bois, faux marbre, etc.
L’image composite telle qu’Hugues Henri la pratique et la développe depuis quelques années déjà, essaie de renouveler et de dépasser les photomontages surréalistes de Max Ernst et ceux constructivistes d’Alexander Rotchenko, mais aussi les Combine Painting de Robert Rauchenberg. Cela lui est possible car la notion de « composite » permet toutes les associations-manipulations des dimensions et matériaux plastiques, photographiques et numériques.
La finalité n’est pas de fabriquer des images postmodernes vides de sens, mais de permettre ce « retour fictif mais sensible » des Fantômes caraïbes. Dès lors ils émergent autour de nous, dans nos décors quotidiens et lieux de mémoire, avec leur aura, leurs regards et leur présence qui retrouvent leurs places dans notre présent désincarné et consumériste. Ce ne sont pas des « avatars » numériques, ce sont des créations révélant cette quête d’humains disparus et d’esprits évanouis, mais qui sont toujours là, dans des lieux chargés d’histoire, de clameurs et de fureur, visibles et audibles pour qui le veut. C’est à cela que vous invite cette exposition, qui condense les travaux d’une décennie (2008-2018), réalisés par l’artiste autour de cette démarche.
Les photos de base des photomontages numériques sont celles d’Amérindiens du Brésil et de Guyane associées à d’autres prises en Martinique, dans des lieux précis pour leurs couleurs/formes/matières et leurs relations à l’histoire. Le travail de montage et de transformation se fait à l’aide de logiciels de retouches d’images (Painter, Photoshop, Art Rage, Squetch, etc.)
Les peintures reprennent et interprêtent plastiquement les pétroglyphes du Parc des Roches gravées de Trois Rivières en Guadeloupe, libres interprétations et mises en relation de ces pétroglyphes dont les qualités graphiques, dynamiques et symboliques ont séduit l’artiste.