Dans un rapport consacré à « l’impact disproportionné de l’état d’urgence« , Amnesty demande au gouvernement de prouver l’efficacité de ces mesures, en cas contraire de renoncer à sa prolongation. L’ONG a rassemblé de nombreux témoignages montrant les violations des droits humains commises au nom de ce régime d’exception.
« Ce qui m’a surpris le plus, c’est le motif de l’ordre de perquisition… il y aurait eu dans mon restaurant des personnes qui étaient une menace publique. Mais ils n’ont même pas vérifié les pièces d’identité des 60 clients qui y étaient » raconte par exemple le patron d’un restaurant.
Amnesty International relève ainsi toute une série d’exemples illustrant les « violations des droits humains » constatées depuis l’instauration de l’Etat d’urgence dans la nuit du 13 au 14 novembre.
En deux mois, plus de 3200 perquisitions ont été conduites, 400 personnes interpellées et 400 assignées à résidence, mais une seule personne a été mise en examen pour terrorisme. Quatre enquêtes préliminaires sont menées pour des infractions liées au terrorisme et 21 enquêtes pour le motif d’ « apologie du terrorisme ».
« Des pouvoirs exécutifs étendus, assortis de très peu de contrôles sur leur application, ont causé toute une série de violations des droits humains », juge John Dalhuisen, directeur du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International, cité dans un communiqué. « Nous ne voyons pas comment les autorités françaises pourraient prétendre qu’il s’agit là d’une réponse proportionnée aux menaces qui pèsent sur elles ».
Nadia, dont le père de 80 ans a fait l’objet d’une perquisition à son domicile dans la région de Strasbourg le 21 novembre 2015. « Mon père souffre de problèmes cardiaques […]. Les policiers ont forcé la porte d’entrée, sans sonner, ils ont fait irruption dans l’appartement, ont commencé à crier et ont menotté mon père et ma soeur. Mon père ne se sentait pas bien et au bout de quelques minutes, il a perdu connaissance. Ils ont dû appeler une ambulance. Il était terrifié et pleurait beaucoup lorsque nous lui rendions visite à l’hôpital les premiers jours.»
L’organisation en conclut que l’état d’urgence ne doit pas être prolongé au-delà du 26 février, sauf si l’exécutif prouve que ses mesures sont indispensables. « Amnesty International demande au gouvernement français de s’abstenir de proposer une prolongation de l’état d’urgence à moins qu’il ne puisse réellement démontrer que la situation à laquelle il est confronté constitue un danger public exceptionnel si élevé qu’il menace l’existence de la nation », peut-on lire dans le rapport.