— Par Jean Samblé —
Dans le tumulte chaotique d’une Haïti déchirée par la violence et l’instabilité politique, les mots « cataclysmique » résonnent comme un sombre avertissement. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) rapporte un exode massif de la capitale Port-au-Prince, une fuite désespérée loin des griffes des gangs dévastateurs.
Entre le 8 et le 27 mars, plus de 50 000 âmes ont abandonné la métropole, se frayant un chemin périlleux à travers des routes infestées de gangs pour trouver refuge dans les provinces. Ces chiffres alarmants révèlent une réalité cruelle : la terreur gangrenant les rues, les attaques incessantes et l’insécurité généralisée ont poussé des milliers de familles à fuir pour sauver leurs vies.
Parmi eux, près de 116 000 personnes se sont déjà réfugiées dans les départements du Grand Sud, cherchant désespérément un havre de paix loin des rues ensanglantées de la capitale. Huit sur dix ont fui en raison des violences gangsters, et près de six sur dix envisagent de rester loin de la région de la capitale aussi longtemps que nécessaire, tel est le constat glaçant dressé par l’OIM.
Dans cette vague de déplacements, la solidarité familiale joue un rôle crucial. Plus de la moitié des réfugiés ont choisi leur destination finale en raison de leurs racines profondément ancrées, tandis que la quasi-totalité mentionne une famille prête à les accueillir avec amour et compassion.
Ce qui surprend peut-être le plus, c’est la volonté obstinée de rester en Haïti. Alors que les autorités des pays voisins redoutent une vague de réfugiés, 96 % des personnes interrogées refusent de quitter leur patrie déchirée. Seulement une infime minorité envisage l’exil vers la République dominicaine, les États-Unis ou le Brésil.
Pourtant, derrière ces chiffres alarmants se cache un pays en déroute. Depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse en 2021, suivi de l’absence d’un Parlement en exercice, l’État haïtien vacille au bord du précipice. Les élections lointaines de 2016 semblent n’être qu’un souvenir lointain, tandis que les gangs puissants s’acharnent à déstabiliser davantage le fragile équilibre politique.
Le Premier ministre Ariel Henry, confronté à une contestation féroce, a annoncé sa démission en mars. Cependant, les espoirs d’une transition pacifique s’effritent dans les querelles partisanes et les doutes quant à la légitimité d’un tel conseil de transition. Trois semaines plus tard, le vide du pouvoir persiste, laissant le peuple haïtien dans un état d’incertitude angoissant, naufragé dans les flots tumultueux d’une crise sans fin.
Avec Agences de Presse