—Par Yves Perennou —
En posture régalienne, le président rassure le secteur culturel sur l’intermittence et lui fixe une mission d’adaptation à la crise et de refondation, mais sans engagement financier.
Sous la forme d’une vague de lettres ouvertes, la pression est montée avant la rencontre, le 6 mai, entre le président de la République et une douzaine d’artistes dont Catherine Ringer, Sébastien Daucé, Mathilde Monnier, Stanislas Nordey, Abd al Malik, Sabine Devieilhe, Norah Krief… Emmanuel Macron a cherché à transformer un sauvetage en grand chantier de refondation. Il a répondu à l’inquiétude principale du milieu de la culture, accordant la prolongation des droits des intermittents sur une année après l’arrêt de l’activité, posant le terme en août 2021. Comme pour compenser un cadeau, il a redoublé d’injonctions : « réenchanter notre pays », « retrouver l’envie [pour les artistes] d’aller au contact des jeunes », « réinventer un été artistique et culturel ». Impossible de promettre une date de retour aux saisons normales, mais le président demande un programme d’éducation artistique et culturelle (EAC) copieux pendant l’été, notamment pour les enfants de banlieue, et une impulsion collective sur le territoire : « Nous n’aurons pas les festivals, mais rien ne nous interdit de faire autre chose, avec moins de public ». L’invention de cette saison « hors norme » doit être l’opportunité de « renouveler les publics ». Et il donne rendez-vous à la fin août, pour un point de chantier de cette « refondation » du modèle français, encouragée par une promesse de renforcement de la commande publique.
CNM refinancé
Le ministre de la Culture a donné quelques précisions. Sur les conditions de la reprise, appelant à réinventer des formes de spectacle : « Nous nous interrogerons, à la fin mai, si on peut aller plus loin que cette limite de rassemblement de 10 personnes, en faisant usage de créativité, pour remettre les artistes en face du public. » Une dotation de 50 millions d’euros est attribuée au Centre national de la musique pour reconstituer son budget. Un fonds sera créé pour les festivals, avec les collectivités territoriales Les artistes auteurs bénéficieront d’une ’exonération de cotisations sociales pendant 4 mois en plus de l’accès au fonds de solidarité et d’un remboursement des frais de loyer. Le prince et les artistes
Nicolas Dubourg, président du Syndeac, réagit : « Il était temps que le président de la République s’exprime. Nous avons un sentiment partagé. La question de l’intermittence a été entendue, mais l’important sera d’entrer dans le détail car notre proposition était une année blanche à compter de la réouverture des théâtres. » Il émet des réserves sur la forme, point sur lequel il est rejoint par Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT-Spectacle : « Le prince a réuni des artistes de grand talent, mais qui ne sont pas des organisations représentatives ». Il salue la victoire de la mobilisation sur l’intermittence, mais demande des garanties.
Les structures oubliées ?
L’appel d’Emmanuel Macron à investir l’EAC et à renouveler les formes artistiques pourrait être entendu comme un plan de relance, sans engagement financier à la clé. Il est loin de répondre à la demande de refinancement des structures exprimée par un grand nombre d’organisations syndicales. Nicolas Dubourg note : « Il n’y a pas eu d’annonce concernant les employeurs. Les structures culturelles publiques ont été mises à mal depuis des années par une baisse des subventions, un recours accru au mécénat, aux ressources propres. La question, c’est la marge artistique. » Lucie Sorin, au SFA-CGT, observe : « Inventer, aller chercher des public, nous savons faire, mais nous avons besoin d’un cadre sanitaire et que le public n’ait pas peur de venir. » Un cadre qui devra être aussi financier.
—Par Yves Perennou —
Sous la forme d’une vague de lettres ouvertes, la pression est montée avant la rencontre, le 6 mai, entre le président de la République et une douzaine d’artistes dont Catherine Ringer, Sébastien Daucé, Mathilde Monnier, Stanislas Nordey, Abd al Malik, Sabine Devieilhe, Norah Krief… Emmanuel Macron a cherché à transformer un sauvetage en grand chantier de refondation. Il a répondu à l’inquiétude principale du milieu de la culture, accordant la prolongation des droits des intermittents sur une année après l’arrêt de l’activité, posant le terme en août 2021. Comme pour compenser un cadeau, il a redoublé d’injonctions : « réenchanter notre pays », « retrouver l’envie [pour les artistes] d’aller au contact des jeunes », « réinventer un été artistique et culturel ». Impossible de promettre une date de retour aux saisons normales, mais le président demande un programme d’éducation artistique et culturelle (EAC) copieux pendant l’été, notamment pour les enfants de banlieue, et une impulsion collective sur le territoire : « Nous n’aurons pas les festivals, mais rien ne nous interdit de faire autre chose, avec moins de public ». L’invention de cette saison « hors norme » doit être l’opportunité de « renouveler les publics ». Et il donne rendez-vous à la fin août, pour un point de chantier de cette « refondation » du modèle français, encouragée par une promesse de renforcement de la commande publique. CNM refinancé Le ministre de la Culture a donné quelques précisions. Sur les conditions de la reprise, appelant à réinventer des formes de spectacle : « Nous nous interrogerons, à la fin mai, si on peut aller plus loin que cette limite de rassemblement de 10 personnes, en faisant usage de créativité, pour remettre les artistes en face du public. » Une dotation de 50 millions d’euros est attribuée au Centre national de la musique pour reconstituer son budget. Un fonds sera créé pour les festivals, avec les collectivités territoriales Les artistes auteurs bénéficieront d’une ’exonération de cotisations sociales pendant 4 mois en plus de l’accès au fonds de solidarité et d’un remboursement des frais de loyer. Le prince et les artistes Nicolas Dubourg, président du Syndeac, réagit : « Il était temps que le président de la République s’exprime. Nous avons un sentiment partagé. La question de l’intermittence a été entendue, mais l’important sera d’entrer dans le détail car notre proposition était une année blanche à compter de la réouverture des théâtres. » Il émet des réserves sur la forme, point sur lequel il est rejoint par Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT-Spectacle : « Le prince a réuni des artistes de grand talent, mais qui ne sont pas des organisations représentatives ». Il salue la victoire de la mobilisation sur l’intermittence, mais demande des garanties. Les structures oubliées ? L’appel d’Emmanuel Macron à investir l’EAC et à renouveler les formes artistiques pourrait être entendu comme un plan de relance, sans engagement financier à la clé. Il est loin de répondre à la demande de refinancement des structures exprimée par un grand nombre d’organisations syndicales. Nicolas Dubourg note : « Il n’y a pas eu d’annonce concernant les employeurs. Les structures culturelles publiques ont été mises à mal depuis des années par une baisse des subventions, un recours accru au mécénat, aux ressources propres. La question, c’est la marge artistique. » Lucie Sorin, au SFA-CGT, observe : « Inventer, aller chercher des public, nous savons faire, mais nous avons besoin d’un cadre sanitaire et que le public n’ait pas peur de venir. » Un cadre qui devra être aussi financier. z YVES PERENNOU Emmanuel Macron accorde l’année blanche et demande d’inventer la reprise Rapport Bricaire : des pistes pour un déconfinement culturel. PAGE 2En posture régalienne, le président rassure le secteur culturel sur l’intermittence et lui fixe une mission d’adaptation à la crise et de refondation, mais sans engagement financier. Ne pas annuler le début de saison 20/21 Les producteurs et tourneurs privés s’alarment de voir des théâtres suspendre les programmations d’automne. PAGE 3 Musique : « une fragilité d’autant plus grande à la rentrée » Loïc Lachenal, du syndicat Les Forces musicales, évoque les conditions de rentrée des orchestres et opéras. PAGE 4 Pour les danseurs, le retour au studio sera complexe La danse est une discipline particulièrement sensible aux nouvelles règles sanitaires de la reprise du travail. PAGE 5D. R.BIMENSUELLE N°471 bis 7 mai 2020