Les femmes, éti yo ?
— Par les miltantes de Culture Égalité —
Pas besoin d’être un.e expert.e en statistiques pour constater que les femmes ne sont pas à la veille d’être têtes de liste dans nos élections.
Regardons, constatons : pour ces élections territoriales de 2021, on ne compte que 2 femmes têtes de listes sur 14 en compétition. Au niveau des têtes de section, aucune liste n’a quatre femmes sur quatre, ni même trois ; cinq listes présentent deux femmes et deux listes nous ignorent totalement ! Comment expliquer ces chiffres ?
La sous-représentation des femmes aux élections est due à de multiples facteurs. D’abord, les hommes rechignent à laisser leur place et les partis, particulièrement les grands partis, manquent de volonté politique pour les y contraindre. Ils sont en effet conduits par des hommes qui ne semblent pas avoir accepté l’idée que, dans une démocratie, les femmes ont la capacité et le droit de participer à la chose publique.
Comparons les listes d’aujourd’hui avec celles des dernières élections. En 2015, il y avait 2 femmes pour 9 listes, soit à peu près ¼ (au lieu de 1/7 aujourd’hui). Comment s’explique cette apparente régression ? Les femmes qui se sont présentées en 2015 ont peut-être été été déçues, découragées par cette aventure de 2015. Les campagnes électorales donnent souvent encore lieu à des attaques auxquelles il est difficile de s’exposer en première ligne. (Notons que ces 2 femmes têtes de liste en 2015 sont quand même encore candidates aujourd’hui, mais à des places plus effacées). Et puis, la situation sanitaire actuelle a sans doute pesé dans le retrait des femmes, puisque, d’après les enquêtes, ce sont elles qui ont dû faire face aux tâches parentales et ménagères accrues par le confinement.
En effet, pour se lancer dans la gestion des affaires publiques, il faut avoir du temps et de la disponibilité. D’abord pour faire campagne, ensuite pour remplir un mandat (défendre des projets, les mettre en œuvre etc.). Or en Martinique, la majorité des familles sont des familles monoparentales avec à leur tête une femme qui assume souvent seule la charge parentale. Et si cette femme est mariée, la répartition des tâches ménagères et parentales est inégalement assumée… par les femmes. Ce sont les femmes aussi qui s’occupent des enfants ou parents malades.
La vie politique organisée par et pour les hommes ne tient pas compte de cette inégale répartition des soins liées à la gestion d’une famille. Pour les femmes, participer aux réunions, aux plénières et à toutes autres obligations de la fonction d’élu.e responsable est un casse-tête. A-t-on pensé à un système de garde pour leur permettre de s’occuper de la chose publique en toute quiétude ? (Cette mesure serait tout aussi importante pour les hommes élus.) Le développement de transports en commun dignes de ce nom serait aussi un atout important pour un investissement total des personnes, et des femmes en particulier. La démocratisation de la politique exige que tout soit mis en place pour que les femmes, quelle que soit leur condition sociale ou leur âge, puisse s’investir.
L’observation des listes (en dehors des têtes de liste) nous prouve aussi que là où l’Etat français a légiféré, la parité s’est imposée. Nous faut-il donc attendre sur la France pour mener la gestion de notre pays vers la modernité, la démocratie véritable ? La participation à égalité des femmes, c’est-à-dire de la moitié de la population, enrichirait le débat et raviverait notre exercice de la démocratie.
Mais c’est aux femmes, surtout, de réagir. Elles doivent vaincre leur penchant pour l’autodénigrement, leur tendance à s’effacer, à se sacrifier (comportements qui arrangent bien le patriarcat !). Elles doivent s’investir en politique pour contribuer à changer les lois qui leur sont défavorables.
Bref, il est temps que les femmes participent pleinement au développement de la Martinique, qu’elles puissent investir l’espace public, jouir des aménagements qui y existent – loisirs, centres culturels… En un mot, qu’elles soient des individus libres vivant pleinement.
Les militantes de Culture Egalité
Le 17 juin 2021