— Par Nicole Duault—
Révolutionnaire en 1976 au Festival d’Avignon, trente huit ans plus tard, Einstein on the beach, opéra de Philip Glass mis en scène par Bob Wilson et en danse par Lucinda Childs, l’est toujours. Il l’est peut-être plus, rétrospectivement, tant il a exploré d’autres formes d’opéra, de musique, de chorégraphie et de mises en scène contemporaines
Un choc : c’est ce que l’on ressent à cette œuvre fleuve (4 h et demi sans entracte), à ce maelstrom onirique d’images et de musique répétitive, d’une force et d’une intensité qui vous pousseraient à la crise de nerfs. Supportable? On est d’abord irrité puis rapidement subjugué. La beauté visuelle confrontée à l’ensorcelant déferlement sonore séduit. Einstein on the beach n’a pas vieilli trente huit ans après sa création.
L’œuvre est d’abord un opéra qui rompt avec toutes les convenions du genre et détourne les lois de l’art lyrique. La musique de Phil Glass paraît assez simpliste. Elle est jouée par un ensemble à cordes, trois saxophones, une clarinette et deux synthétiseurs. Lancinante, voire hypnotique elle est faite de répétitions mais toujours en progression. Elle plonge dans l’art de Monteverdi et de Bach qu’elle transgresse.
Einstein violoniste
Philip Glass, très influencé par la musique française, prend l’exemple d’un baigneur qui nage sur place dans une piscine. S’il cessait de faire des mouvements, il coulerait. La répétition selon Glass s’inscrit dans une combinaison rythmique en déplacement constant. Sa musique relève d’un rituel qui soutient le spectacle avec ses forces telluriques. Elle s’intègre dans l’essentiel, le découpage et la mise en scène de Bob Wilson dont l’art est ici accompli.
Cet opéra prend pour thème Einstein, personnalité scientifique, héros du XXe siècle, pacifiste et père de la théorie de la relativité qui a conduit à la bombe atomique. Einstein est représenté par un violoniste : même tignasse blanche, mêmes moustaches, même regard rêveur et perplexe. Il est situé en surplomb de la fosse d’orchestre. Il revient d’une manière récurrente pendant toute l’œuvre. Il joue de son violon qui était selon la légende le principal divertissement du scientifique. Dans chacun des quatre tableaux Einstein est évoqué par différentes manières de représenter l’espace, par exemple une locomotive stylisée qui avance et recule. C’est en effet avec un train que le savant expliquait la relativité. Autres repères : un tribunal, une soucoupe volante…
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