— Par Christian Antourel & Ysa de Saint-Auret —
L’exposition réunit une unité d’œuvres aux temporalités proportionnées, exclusivement dédiées à la dimension fondatrice et manifeste du travail d’Edouard Duval-Carrié : la peinture.
La nouveauté comme alternative à l’histoire et au passé. L’important n’est pas ce qu’on a fait de nous mais ce que nous faisons avec ce qu’on a fait de nous. Ce postulat quelque peu psychanalytique s’illustre ici parfaitement car « cette histoire n’est pas un fardeau mais une mémoire active et une libération qui nous permettent d’affronter le présent » cette exposition interroge en ceci qu’elle nous permet de rattacher l’art à l’actualité par les liens ténus imperceptibles du regard que nous posons sur elle. Le travail de l’artiste s’inscrit dans une démarche à deux pendants, d’une part l’homme caribéen et son histoire , d’autre part l’humain dans sa globalité et son rapport à la nature. Bien sûr l’utilisation du folklore Caribéen a beaucoup à voir dans cela, mais dans l’œuvre d’Edouard Duval-Carrié, elle sert de vecteur à la question plus large de ce qu’est l’homme dans son environnement. Il s’agit d’exorciser le passé tout en expurgeant le présent de toutes ses illusions. Est-ce l’Afrique en lui qui pointe ici sa corne ? C’est Haïti, Afrique bercée en Caraïbes. Il expose aujourd’hui « décolonisons le raffinement » à travers des œuvres, dont le titre suffit à résumer la portée poétique et philosophique.
L’artiste puise dans son imagination, avec Liberté
L’important est de rejeter les dictats d’une intention trop bien-pensante d’une pensée unique souveraine mais d’exprimer une dimension nouvelle la Liberté, comme base créative. Il s’agit là d’une multitude de références liées à une archéologie de la mémoire, à un processus « d’ensevelissement » en rupture totale avec un ailleurs contraignant, des vestiges du temps où le passé et le présent se mêlent intimement. La présence de ces œuvres d’une extraordinaire inventivité, une sorte de joyeuse, folle objectivité, mesure l’être et le temps. Loin d’une représentation formelle, *l’artiste puise dans son imagination, avec liberté, ses magnifiques tableaux en donnent un éclatant témoignage. Ainsi il projette un mouvement de l’art traditionnel Haïtien dans le monde de l’art contemporain. Il nous entraine dans un vertige pictural raffiné ou aucune monotonie ne vient rompre cette œuvre méticuleuse, dans la plus grande fantaisie des métamorphoses, comme il en est de ce qui ressemble à des vitraux en trompe l’œil de la nef d’un lieu de prières ( « Memory » technique mixte 147 cm x147 cm et « Métamorphose» n° 2,série Le royaume de ce monde, gravure sur plexiglas 79cm x79 cm .Il peint sur divers supports comme l’aluminium, la toile, le contreplaqué… maitrisant des techniques mixtes où il utilise des paillettes, des sequins et autres matériaux fixés avec de la résine. Ce qui frappe aussi dans son traitement de la couleur c’est cette luminosité qu’il parvient à diffuser par divers moyens : une palettes de tonalités vives et toniques, des éclairages aux teintes paradoxalement douces qui créent une ambiance intimiste autour des œuvres, un jeu de transparences au travers de cadres aux volutes ouvragées.
On le voit , l’œuvre est un long parcours complexe d’inventions, d’actions sensibles et précises qui font de l’artiste un immense créateur, inventeur d’une grande originalité. C’est tout cela que nous montre cette manifestation de haute qualité.
En pratique :
« Décolonisons le raffinement »
A la Fondation Clément
Le François.
Du 24 août au 17 octobre 2018
Entrée gratuite
Contact :0596. 54.75.51.
Christian Antourel & Ysa de Saint-Auret