— Par Audrey Loussouarn —
Les Dessous de la mondialisation :
« Bénin, poulet morgue ».[Vu sur Public Sénat] Nadia Blétry s’est rendue au Bénin pour comprendre l’impact des importations de poulets congelés venus de l’Occident. Le désarroi de cette population impuissante face aux grands producteurs est patent.
C’est court, trente minutes. Pour un documentaire, il n’en faut parfois pas plus pour faire passer une idée. Nadia Blétry a focalisé son attention sur ce qui mine aujourd’hui le Bénin, un des plus pauvres pays du monde, et surtout ses 10 millions d’habitants. Sa filière avicole ? Quasiment réduite à néant, elle lutte contre une concurrence déloyale des exportateurs étrangers. Car, chaque année, ce sont 150 000 tonnes de poulets « morgues », comme les appellent les locaux, qui sont importés congelés. Une aubaine pour vendeurs et acheteurs qui accèdent à la première source de viande du pays à un prix dérisoire, le poulet frais local étant vendu deux fois plus cher. Cette volaille, surtout de la poule de réforme à la chair dure (donnée chez nous principalement à nos animaux de compagnie !), attire mais ne rend pas forcément « fiers » les grossistes.
Cette poule aux œufs d’or profite aussi à l’État béninois, qui s’en met plein les poches : entre 15 et 22 millions d’euros grâce à ces seules importations. Ferme-t-il les yeux sur le quotidien des exploitants qui jalonnent son pays ? La bonne volonté du jeune Gédéon, par exemple, ne suffit pas à nourrir sa famille. Damala, lui, n’a pas eu le courage de continuer. Formé dans l’un des deux lycées agricoles du pays, qui en compte aujourd’hui, paradoxalement, une dizaine, il a préféré se reconvertir dans la vente d’outils. « Ce poulet de chair n’est pas très difficile à produire. Il est très demandé et normalement la jeunesse qui est là, sans emploi, si vraiment elle pouvait se l’offrir, le produire et le vendre facilement, ça diminuerait le taux de chômage. Donc en réalité, l’importation de poulets congelés tue la jeunesse », souligne-t-il très justement. La question n’est pas anodine : 70 % des jeunes Béninois sont actuellement au chômage. Nadia Blétry prend donc clairement le parti pris d’une régulation des douanes axée sur un certain protectionnisme. Histoire de limiter le « dumping » qui met littéralement en péril toute la chaîne du secteur.
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