La Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, le livre célèbre de l’économiste britannique, est rééditée, quatre-vingt ans après sa première publication.
«La révolution keynésienne est l’événement le plus important de la science économique au XXe siècle », assurait en 1988 Paul Samuelson, l’un des trop nombreux Prix Nobel d’économie états-uniens, reprenant à son compte le propos d’un autre Prix Nobel, Lawrence Klein. Il devait certainement avoir à l’esprit l’apport de l’œuvre majeure de l’économiste anglais John Maynard Keynes, que les éditions Payot viennent de rééditer.
Keynes est effectivement apparu comme un homme de rupture avec l’économie libérale, d’autant qu’il était lui-même imprégné de cette tradition. Une rupture qu’annonce le titre même de l’ouvrage paru pour la première fois en 1936. En effet, il n’est pas libellé par hasard, les trois mots constituant la matière première de l’ouvrage. « L’emploi » : les économistes classiques sont incapables d’expliquer le chômage de masse. Le marché s’équilibrant par lui-même, le chômage ne peut être que « volontaire ». Un point de vue difficile à défendre après la grande crise des années 1930. Keynes, lui, lie la question du chômage aux difficultés de la demande.Il ouvre ainsi des perspectives pour le combattre.
La question d’un dépassement de sa pensée se pose
« L’intérêt » : Keynes s’attelle à comprendre les crises qui secouent le capitalisme et, à cette fin, il lie leur irruption à une baisse de « l’efficacité marginale du capital », du taux de profit, sans pour autant qu’il parvienne à mettre à nu les ressorts profonds de cette baisse. « La monnaie » : elle n’a pas de rôle propre pour l’économie néoclassique. Pour Keynes, elle peut être un facteur de crise dans sa forme financière, mais aussi une clé de la sortie de crise en permettant d’engager une relance. En ces années qui suivent la crise d’avant-guerre, Keynes n’est pas le premier économiste à prôner une telle relance grâce au concours de l’État, mais assurément il est le premier à la théoriser. La Théorie générale va d’ailleurs inspirer les politiques publiques de la plupart des pays européens après la Libération.
Au-delà de ses ambivalences, la Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie va inspirer nombre d’économistes, certains essayant de tirer ses idées bien en avant, d’autres tout en arrière. C’est dire qu’il y a différentes façons de se réclamer de Keynes…
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