Le dernier baromètre du CSA montre que les hommes blancs, diplômés et résidant en ville sont toujours surreprésentés à la télévision. Pour Carole Bienaimé-Besse, la désertion du jeune public pourrait pousser les chaînes à agir.
La télévision ne reflète pas la diversité de la société française et elle le fait même de moins en moins. C’est le bilan peu reluisant du baromètre annuel réalisé par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). À la télévision, les populations très diplômées, urbaines, blanches, masculines et sans handicap sont toujours surreprésentées. « On n’est pas du tout en phase avec la réalité », déplore sur franceinfo Carole Bienaimé-Besse, en charge des questions de diversité au CSA.
franceinfo : Entre le monde tel qu’il est présenté dans l’audiovisuel et la réalité de la société, on a deux mondes qui n’ont rien à voir ?
Carole Bienaimé-Besse : Non, effectivement, on a beaucoup, beaucoup de CSP+ à l’antenne. On est à peu près 73% de CSP+ alors que dans la vraie vie, nous sommes seulement à 28%. Donc, on voit bien qu’on est pas du tout en phase avec la réalité, ce qui fait qu’on a une sous-représentation des personnes en situation de précarité et des personnes CSP moins.
Quand on entend diversité, on n’entend pas seulement la couleur de peau. On a l’impression que sur tous les critères il y a un problème.
Il y en a un qui est un peu plus performant, avec depuis 2014 la loi sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Ça nous a permis de demander aux chaînes et aux radios des données chiffrées sur ce qu’elles diffusaient. Ça nous a donné un pouvoir de sanction et on a pu voir une progression. Mais nous n’y sommes pas encore puisqu’on est seulement à 39% de femmes à l’antenne. Le mot-valise « diversité » on ne l’apprécie pas vraiment puisque nous préférons la diversité sociale.
Des ouvriers, on n’en voit jamais aujourd’hui à la télévision, par exemple.
On les voit très peu et c’est pour ça que le mouvement des « gilets jaunes », lorsqu’il est apparu, était très intéressant de ce point de vue là puisqu’effectivement c’était une population qui était vraiment sous représentée à l’écran.
Une fois qu’on a fait ce constat, qu’est-ce qu’on fait ?
On va continuer à faire ces études chaque année. On reviendra avec nos chiffres comme on le fait depuis dix ans. On fait un contrôle continu. Nous publions des études, des rapports, on accompagne les chaînes.
À quel moment on « tape » sur les chaînes ?
On le fait, on le fait, on va toutes les convoquer avec les producteurs, les auteurs, les directeurs de casting pour comprendre là où ça coince.
Il n’y a que ça qui marche, la contrainte ?
Il y a aussi une contrainte qui est faite par le téléspectateur ou l’auditeur puisqu’à un moment donné, il se détourne de la télévision s’il n’est pas représenté. On le voit bien avec les jeunes qui ne sont représentés finalement qu’à hauteur de 11%, alors que l’Insee les comptabilise à hauteur de plus de 24%. On voit bien qu’ils se sont détournés des médias classiques. Donc, il y a là aussi une prise de conscience des chaînes de se dire que finalement, si elles veulent garder leurs auditeurs, leurs téléspectateurs et en recruter de plus jeunes, il va vraiment falloir changer. Donc, il y a une sanction économique à l’arrivée.
Source : franceinfo – Radio France