— Par Pierre Alex Marie-Anne —
Après la débâcle des élections européennes , transformées en referendum anti Macron ,qui se sont soldées par l’effondrement de la liste conduite par Mme Valerie Hayer pour le camp présidentiel avec seulement 14,60% des voix contre 31;37% pour le RN de Jordan Bardella, tout semblait perdu pour la macronie sur laquelle se mit à souffler un vent de panique. C’était faire peu de cas de l’habileté manœuvrière de l’hôte de l’Élysée, qui en deux temps trois mouvements s’employa à rétablir la situation à son avantage.
-Premier temps :le coup de tonnerre de la dissolution -surprise qui laissa ses adversaires comme sidérés et les poussa à la faute; ce fut l’épisode rocambolesque de la constitution à la hâte du Nouveau Front Populaire, autour d’un programme bâclé qui n’a pas fini de faire sentir ses effets délétères. -Second temps : le tocsin sonne aux oreilles des formations politiques , suite au résultats du premier tour plaçant en tête le Rassemblement National conduit par Jordan Bardella avec 300 duels de ses candidats en position éligible ; celles-ci réagissent par la constitution d’un Front Républicain verrouillé par un pacte de désistement réciproque entre tous les autres candidats ( c’est le fameux cordon sanitaire , sous couvert de ni-ni :«Tous contre un même ,en se bouchant le nez» !),fortement encouragé par le Président de la République qui retrouve à cette occasion une manière de virginité en cédant volontiers sa place de cible principale à Bardella .Le résultat dépasse les espérances communes des coalisés : le RN qui caracolait en tête des législatives ,avec près de 30% des suffrages et 300 candidats , potentiellement éligibles voit au second tour ses effectifs fondre comme neige au soleil pour ne plus compter que143 élus .Adieu les espérances folles de majorité absolue , ou même relative ,permettant d’ ouvrir la porte de Matignon ! -Troisième temps ,c’est là où Macron se surpasse en ingéniosité: débarrassé de l’hypothèque RN , il s’emploie à instiller dans l’opinion avec le concours des médias qui lui sont dévoués , la petite musique décrivant Melenchon en« anti-sémite ,fauteur de troubles en puissance”, autrement dit un vrai pestiféré ; celle-ci ne tarde pas à être reprise en chœur par les propres membres composant le Front Populaire qui scient avec allégresse la branche sur laquelle ils sont assis . La dislocation de cette union bancale de circonstance, dont les membres se détestent cordialement, est désormais en marche,ouvrant les perspectives les plus prometteuses , quant au RN,il reste bloqué à son étiage actuel ,faute de possibilité d’alliances.Résultat final inespéré ,” le bloc central “ qui dispose de168 députés est en mesure de retrouver un rôle majeur dans la confection d’une nouvelle majorité ( du grand art,salut l’artiste!). -Quatrième et dernier temps : l’élection à la présidence de l’Assemblée nationale fournira au Président de la République l’occasion de tendre un piège mortel à ce qui reste de LR; celui-ci se voit contraint et forcé, sous peine d’encourir les foudres rédhibitoires de ses électeurs, de voter pour la présidente sortante de la famille macroniste, Mme yaël Braun-Pivet ; ceux-ci n’auraient pas admis en effet et encore moins pardonné l’élection au “perchoir “d’un candidat de la gauche, rassemblée en trompe l’œil pour l’occasion, Mais leur supplice ne va pas s’arrêter là: Ils devront boire le calice jusqu’à la lie car, nolens ,volens ils sont désormais ,en dépit de leurs dénégations alambiquées ,irrémédiablement associés au pouvoir en place. Au bout du compte et qu’on le veuille ou non c’est Macron qui sort gagnant de ces péripéties électorales à rebondissements : d’assiégé qu’il était avant la dissolution, il voit s’ouvrir devant lui des perspectives nouvelles ,nettement plus favorables ; misant sur la naïveté et la débilité de ses adversaires pressés de «vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué » il a réussi à transformer ce qui s’apparentait à une Bérézina en un resplendissant soleil d’Austerlitz ;Il est désormais en position de force pour réaliser son rêve de toujours : une grande coalition allant de la gauche modérée jusqu’aux limites de la droite républicaine , la quintessence de sa doctrine de «l’entre-deux». Pour concrétiser cette perspective , il lui reste néanmoins à obtenir le ralliement, au moins partiel ,des socialistes et écologistes déçus par les turpitudes des dirigeants du Nouveau Front populaire ;y parviendra-t-il? Ce n’est pas acquis d’avance car pour l’heure ,ils sont censés toujours émarger du côté de la Nupes qui les tient sous ses fourches caudines , mais pourront-ils résister longtemps encore aux sirènes présidentielles ? De la réponse qui sera apporter à cette question dépendra la suite des évènements. Dans cette conjoncture incertaine , le plus grand danger qu’encourt le Président Macron réside en lui-même : aura-t-il la sagesse de comprendre le message sans ambiguîté que lui a envoyé le corps électoral: «changer radicalement de politique ,dans les actes et pas seulement dans les discours ». Il lui appartient s’il ne veut pas compromettre cette deuxième chance que lui offre le destin de répondre positivement à cette attente angoissé montant des profondeurs de la nation ; à défaut , s’il reste décidément sourd à cette interpellation , les dés seront irrémédiablement jetés , il n’aura obtenu qu’un simple répit ,une demi-victoire : rien ni personne ,quels que soient les subterfuges échafaudés , ne pourra empêcher le Rassemblement National de s’installer triomphalement sous les ors de l’Élysée.
Pierre Alex MARIE-ANNE