— Par Dominique Daeschler —
Ce texte coup de poing joué au festival d’Avignon 2019 et repris en tournée arrive à point nommé pour parler Algérie, colonialisme et « indépendances » entendues comme responsabilités sociétales et citoyennes.
Nourri de l’histoires familiale, Ahmed Djouder qui appartient à la génération des « nés en France », a cherché à retrouver sa part algérienne, à tout remettre en place, pour conjuguer le ici et là -bas sur un mode libératoire.
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C’est à cette génération que Djouder donne d’abord la parole, montrant combien son éducation est pleine de référents de là-bas, combien le mode vie familial est différent. Il leur faut assembler les morceaux d’un puzzle. Ils sont comme des arbres qu’on planterait sans racines, confiés, avec la foi du charbonnier à la greffe ou au marcottage. Ils racontent leurs parents avec tendresse, humour et déchirement. Cette conscience d’une « identité flinguée » les conduit à analyser cette peur des désirs ancrée dans la culture des pères et à fustiger les tabous.
Comme logiquement appelée – et c’est talent de mise en scène d’en extraire le sens d’un parcours – surgit la génération qui a participé à la reconstruction de la France. Comprendre plus loin, c’est rappeler l’arrivée en 1830 des français en Algérie, la guerre, la colonisation…Le mot intégration sonne comme un glas, comme une « stratégie sécuritaires déguisée ». Deux comédiens, une comédienne portent le texte avec fougue, utilisant souvent l’adresse face au public (un peu long et trop monté en puissance sur le dernier monologue) ; La mise en scène répond aux critères de Blin : ce qui ne se voit pas, sans doute parce que la direction d’acteurs est musclée. Revers de la médaille d’un théâtre qui rapporte sans entrer dans une psychologie de personnages, le jeu est moins privilégié que la parole. Justement nous restera cette parole terrible qui dit la responsabilité de chacun : « personne ne nous a appris à orienter notre désir vers la connaissance du monde ».
Dominique Daeschler