— Par Collectif —
Venant d’horizons divers, nous sommes profondément attachés aux langues et cultures du monde, dont la langue française et les cultures qui lui sont associées. Cet attachement nous amène, aujourd’hui, à nous engager pour l’avenir de la francophonie. « Ma patrie, c’est la langue dans laquelle j’écris », disait le pamphlétaire royaliste Antoine de Rivarol (1753-1801).
Ecrivains, artistes ou penseurs, nous exprimons ici notre volonté de voir la francophonie défendre toujours davantage les valeurs humanistes de la diversité culturelle, de la libre création, de l’échange entre les individus et, à travers eux, entre les cultures⋅
Nous sommes convaincus que la francophonie, pour être exemplaire vis-à-vis des nations et des peuples qui luttent pour préserver le droit à la diversité culturelle et linguistique et au respect des identités, doit rompre le cercle de la realpolitik et des rapports de force, qu’ils viennent du Nord comme du Sud.
UNE ÎLE MODERNE
Nous ne sommes pas des donneurs de leçons. Nous avons, en revanche, la conviction que c’est à l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) que se joue, pour une bonne part, le combat pour le respect de la pluralité des cultures. Cette lutte est au cœur de notre engagement, au cœur de cette « francosphère », espace rêvé d’échanges linguistiques et culturels respectueux de l’histoire et de l’exceptionnelle richesse créatrice du genre humain.
C’est avec cette idée que nous faisons aujourd’hui confiance à la candidature de l’île Maurice pour conduire le futur de l’OIF. En moins d’un demi-siècle, cette île-carrefour a donné naissance à un laboratoire à la fois du vivre-ensemble de multiples groupes sociaux et de préservation de la diversité culturelle dans le cadre d’un Etat démocratique, respectueux des droits de l’homme et des croyances de chacun. C’est le pays qui fait cependant de l’idéal interculturel une quête constante.
Moderne parce que plurielle, l’île Maurice, par sa fidélité au français et sa pratique de l’anglais et des langues asiatiques, bâtit un pont entre l’Afrique, l’Europe, l’Inde et la Chine. Elle apporte au XXIe siècle l’image d’une francophonie originale et décomplexée, résolument ouverte et heureuse d’exister, dépouillée des pesanteurs coloniales.
Nous croyons donc que cette candidature mauricienne, incarnée par une personnalité aux multiples talents, exprime la synthèse positive du monde en mouvement. Elle est la promesse d’un projet mobilisateur pour les femmes et les hommes de nos pays qui attendent beaucoup d’une mondialisation respectueuse de ce qu’ils sont.
Enfin, nous appuyons cette candidature parce qu’à l’image d’un David luttant contre les Goliath du monde moderne, elle rassemble, par sa force symbolique, les millions de femmes et d’hommes qui ont le français en partage. Celles et ceux – hispanophones et lusophones notamment – qui apportent au monde la force et l’enthousiasme des langues redessinées par la rencontre des cultures peuvent aussi y retrouver une part d’eux-mêmes.
C’est dans cet esprit que nous apportons aujourd’hui notre soutien à la République de Maurice et à Jean-Claude de l’Estrac, son candidat.
L’Organisation internationale de la francophonie compte 77 Etats membres. Elle désignera son nouveau secrétaire général en novembre.
Collectif
Laure Adler, journaliste et écrivain, Issa Asgarally, linguiste et essayiste, Tahar Ben Jelloun, poète et écrivain, Ananda Devi, écrivain, Axel Gauvin, écrivain, Jean-Claude Guillebaud, journaliste et essayiste, Jean-Marie Gustave Le Clézio, écrivain, prix Nobel de littérature 2008, Amadou Mahtar Ba, journaliste, Edouard Maunick, poète, Patrice Nganang, écrivain, Ngo Bao Chau, professeur de mathématiques, médaille Fields 2010 Nguyen Quang Thieu, poète et écrivain, Jean Orizet, critique et poète, Jean-Robert Pitte, président de la Société de géographie et ancien président de la Sorbonne, Johary Ravaloson, écrivain, Philippe Rey, éditeur, Joël de Rosnay, scientifique et écrivain, Daniel Vaxelaire, historien et romancier, Abdourahman Waberi, écrivain, Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS, Federico Mayor Zaragoza, scientifique et ancien directeur général de l’Unesco.
http://www.lemonde.fr/idees/article/2014/07/21/designons-un-mauricien-a-la-tete-de-la-francophonie_4460577_3232.html