— Par Anne-Marie Claverie(*) —
Culture Égalité accueillait, à l’hôtel l’Impératrice, vendredi 10 mai, pour une conférence sur le thème des violences faites aux femmes, Anita Warmel, psychanalyste qui accompagne les personnes en souffrance, notamment les femmes victimes de violences, et est l’auteure d’un roman : Je ne dirai plus son prénom, paru dans la collection A mots Ouverts.
Est-il besoin de rappeler que depuis le 1er janvier de cette année, 52 femmes sont décédées, en France, sous les coups d’un homme qu’elles ont eu le malheur d’aimer ? C’est de cet amour-là qu’Anita Warmel nous a entretenu.es, cet « amour de travers » comme elle le nomme, et comme elle a intitulé sa conférence.
L’auditoire a été un peu déstabilisé dans un premier temps par cette approche, mais celle-ci a finalement conduit à un débat riche, émouvant et sensible. L’amour qui isole, qui nous perd. Beaucoup de témoignages et d’interventions venant d’une assistance hétérogène : femmes et hommes de tous âges avec une majorité de jeunes femmes, mères de famille, institutionnel.les… ont permis de confirmer encore une fois l’ampleur du combat à mener pour faire cesser ces injustices ancestrales qui font tant de dégâts.
Des témoignages saisissants : «Dans une relation sexuelle même si ça fait mal on ne dit rien, parce qu’il ne faut pas déplaire au partenaire » « Nous sommes éduquées par le porno ». « Je faisais tout pour toujours plaire à l’Autre, toujours. Je ne voyais pas que ces petits riens étaient de la violence ». « De très nombreuses jeunes femmes sont dans cette situation » « Nous ne disons rien, nous ne parlons pas : Nous sommes amoureuses ». « Il faut faire beaucoup de prévention en direction des jeunes ». « Une dépendance affective dans laquelle je n’étais rien. Là j’ai une autre estime de moi. Je me bats »
Le chantier est considérable. Des moyens doivent être donnés aux associations pour cet énorme travail de prévention.
Mais il y a aussi une lutte à poursuivre pour en finir avec une éducation machiste qui bafoue la dignité de la femme, car aucun argument, ni scientifique, ni religieux, ni moral, ni social n’est recevable pour accepter cette abnégation féminine, insidieusement inculquée depuis des siècles, au point de ne même plus être consciente. Des « petits riens » à l’inacceptable, rien ne justifie ces blessures et sûrement pas l’amour !
Une lutte pour, aujourd’hui, réparer l’immédiat, aider les femmes à se reconstruire, à relever la tête, à s’aimer ; les soutenir dans leur chemin vers l’autonomie tant psychologiquement qu’administrativement ; répondre décemment au besoin d’écoute ; faire respecter leurs droits, que justice soit faite… La liste est tellement longue…
Faire évoluer, voire changer les mentalités et les pratiques n’est pas acquis, mais les femmes avancent, à petits ou grands pas, ensemble, groupées, unies, pour résister, ne rien lâcher. C’est vraiment un combat qu’il nous revient de mener pour trouver notre juste place dans cette société d’inégalités.
Culture Égalité trouve toute sa légitimité dans ce combat, et les échanges issus de rencontres comme celles de ce vendredi 10 mai ne font que renforcer nos convictions. Mettre en place des actions de sensibilisation, de formation, ouvrir des espaces de parole, recevoir, écouter, échanger, être présente pour prêter sa voix aux plus démunies, mettre en valeur l’action des femmes d’hier et d’aujourd’hui, ce sont déjà les engagements de Culture Égalité.
Soyons imaginatives pour porter ces actions, en inventer d’autres… pour avancer, toujours avancer, ensemble, vers notre émancipation.
Anne-Marie Claverie, membre de Culture Égalité
Le 15 mai 2019