Figure emblématique de la Nouvelle Vague, Raoul Coutard avait travaillé avec Jean-Luc Godard, François Truffaut, Pierre Schoendoerffer et Costa-Gavras. Il est décédé mardi soir à l’âge de 92 ans.
Raoul Coutard avait été le directeur de la photographie de quelques-uns des plus grands films français de la seconde moitié du 20e siècle: A bout de souffle, Le Mépris et Pierrot le Fou de Jean-Luc Godard, Jules et Jim de François Truffaut, La 317e Section et Le Crabe-Tambour de Pierre Schoendoerffer, Lola de Jacques Demy ou encore L’aveu et Z de Costa-Gavras.
Atteint d’une longue maladie, il vivait depuis plusieurs années au Boucau, près de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), et est décédé mardi soir dans une clinique de Labenne (Landes). Né à Paris le 16 septembre 1924, il avait été sergent dans l’infanterie coloniale pendant la Guerre d’Indochine, commandant une section au Laos, avant de devenir photographe aux armées puis, toujours en Indochine, photographe pour Paris-Match et Life. Il y rencontre le cinéaste Pierre Schoendoerffer, avec qui il se lie pour ses premiers pas cinématographiques. « Nous avons très vite conclu un pacte entre nous: le premier qui arriverait à entrouvrir la porte du cinéma y entraînerait l’autre! », racontait le cinéaste dans un livre il y a quelques années.
Chef-opérateur de La Passe du Diable (1958) de Pierre Schoendoerffer, Raoul Coutard suit ensuite le cinéaste pour Ramuntcho (1959) et Pêcheur d’Islande (1959). Puis son expérience de la Guerre d’Indochine sera au coeur de La 317e Section, réalisé en 1965.
Godard, la rencontre ‘décisive’
En 1959, c’est le coup de tonnerre avec A bout de souffle et Jean-Luc Godard, avec Jean-Paul Belmondo et Jean Seberg, le film qui marque la naissance de La Nouvelle Vague. « Pour moi, la rencontre décisive ce fut Godard. A bout de souffle, qui devait être n’importe quoi, fut une entrée dans la vie professionnelle », expliquait-il à Libération au début des années 2000. Le chef-opérateur devient célèbre avec ce film tourné caméra à l’épaule et sa lumière blanche, qui font scandale à l’époque dans la profession. « Les images n’étaient pas léchées, les conditions syndicales n’étaient pas respectées, et je faisais à la fois la lumière et le cadre, ce qui ne se faisait pas du tout à l’époque », se souvenait-il. Suivront avec Godard, 14 films au total, dont Une femme est une femme, Le Mépris, Le Petit soldat, Pierrot le Fou, La Chinoise et Alphaville. Parallèlement, il est aussi l’opérateur de François Truffaut dans Tirez sur le pianiste (1960), Jules et Jim (1961) ou encore de Jacques Demy dans Lola (1960). Viendront ensuite deux grands films avec Costa-Gavras: Z (1969) avec Yves Montand, sur la dictature des colonels en Grèce, et, en parallèle, L’Aveu (1970), sur le stalinisme et les procès de Prague, toujours avec Yves Montand. Il travaillera également avec Philippe Garrel sur La Naissance de l’amour (1993) ou Sauvage innocence »(2001).
Comme metteur en scène, Raoul Coutard avait réalisé Hoa-Binh (1970) sur la Guerre d’Indochine, prix Jean Vigo en 1970, et La Légion saute sur Kolwezi (1980). « J’ai toujours éprouvé une certaine tentation pour la difficulté. Ce qui n’est pas classique, voire impossible, me tente », disait encore ce pionnier.
L’Humanité.fr avec l’AFP