DISPARITION – L’auteure notamment du Rempart des béguines est morte à l’âge de 86 ans.
Romancière populaire et exigeante, Françoise Mallet-Joris, auteure notamment du Rempart des béguines, est morte à l’âge de 86 ans, laissant derrière elle une oeuvre féministe et engagée où elle a peint son époque avec réalisme et subtilité. L’écrivain franco-belge est décédée samedi matin dans un hôpital de la région parisienne, a précisé à l’AFP son fils Daniel Amadou.
Jurée du prix Femina de 1969 à 1971, la romancière avait ensuite siégé de 1971 à 2011 à l’Académie Goncourt, qui décerne chaque année le célèbre prix littéraire éponyme.
«Françoise avait vraiment une sensibilité» qui a incité «les académiciens (du Goncourt) à lire des livres vers lesquels ils ne seraient pas allés spontanément», a expliqué l’écrivain et journaliste Pierre Assouline, qui lui avait succédé chez les Goncourt.
Née à Anvers le 6 juillet 1930, fille de la première femme avocate de Belgique, Suzanne Lilar, et d’un ancien ministre belge de la Justice, Albert Lilar, Françoise publie ses premiers textes (Les poèmes du dimanche) à Bruxelles à tout juste 15 ans. Mais c’est en 1951 qu’elle fait une entrée fracassante dans le monde des lettres en publiant chez Julliard Le rempart des béguines, sous son nom de plume: Mallet-Joris.
Le livre sensible, nuancé et émouvant est néanmoins auréolé d’un parfum de scandale car il décrit la passion amoureuse entre une adolescente et la maîtresse de son père.
Près d’une trentaine d’autres livres suivront. Elle publie dans des maisons prestigieuses (Julliard, Grasset, Gallimard, Flammarion…), elle accumule les prix et les honneurs.
En 1956, elle reçoit le prix des Libraires pour Les mensonges, en 1958, le Femina pour L’Empire céleste, en 1963, le prix René-Julliard pour Lettre à moi-même, en 1964, le prix de Monaco pour une biographie, Marie Mancini, le premier amour de Louis XIV.
Elue au jury Femina en 1969, elle n’y fait qu’une apparition, car elle devient membre de l’Académie Goncourt en 1971. Elle s’opposera notamment à l’attribution du prix à Michel Houellebecq.
Ses lecteurs, surtout des femmes, se comptent par centaines de milliers.
Son oeuvre est le reflet de son époque. A l’affût des faits-divers, aimant écrire dans les cafés, elle disait avoir une curiosité intacte. Elle s’est ainsi intéressée au rock (Dickie Roi, 1980), aux problèmes de drogue (Le rire de Laura, 1985), de l’anormalité (Allegra, 1976) ou des régimes alimentaires (Divine, 1991). Une oeuvre foisonnante, sans cesse renouvelée.
«Engagée dans bien des combats pour la cause des femmes, Françoise Mallet-Joris était une romancière qui témoignait de son temps, en renouvelant sans cesse son regard plein d’humanité sur ses contemporains», a estimé la ministre française de la Culture, Audrey Azoulay.
Mariée trois fois, cette grande fumeuse aux yeux bleus et aux cheveux blonds a eu quatre enfants. Elle avait bousculé le milieu littéraire en se passionnant pour la variété et le show-business, écrivant notamment des textes comme La parisienne (1976) pour la chanteuse Marie-Paule Belle, avec laquelle elle a longtemps vécu.
«Je lui dois tout… Je suis née une deuxième fois grâce à elle. Je ressens une peine immense», a confié, en sanglots, son ancienne compagne à l’AFP.
Engagée à gauche sans être encartée, Françoise Mallet-Joris fit partie des quelques intellectuels qui poussèrent en 1987 le président François Mitterrand à se présenter pour un nouveau mandat.
Grâce à sa double nationalité, elle avait intégré en 1993 l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, prestigieuse institution littéraire du royaume. Elle fut élue au fauteuil, qu’avant elle, avait occupé sa mère.
Son dernier roman, Ni vous sans moi, ni moi sans vous avait été publié en 2007 chez Grasset. Elle vivait ces dernières années en Belgique, mais elle était revenue en France en début d’année pour des raisons de santé.
Source : AFP