Crise de confiance en politique : une demande de plus d’autorité et d’efficacité

— Par Jean Samblé —

Le dernier Baromètre de la confiance politique, publié par le CEVIPOF et réalisé par OpinionWay, met en lumière une crise profonde de légitimité au sein de la société française. L’enquête, qui a été menée entre janvier et février 2025, révèle des résultats alarmants quant à la perception de la politique et des institutions démocratiques par les Français.

La défiance est particulièrement marquée à l’égard du gouvernement, avec seulement 23 % des Français lui faisant confiance, un chiffre bien en deçà de celui observé en Allemagne (38 %) et en Italie (35 %). Les figures politiques, à l’instar de François Bayrou, ne suscitent guère plus de soutien, avec seulement 27 % de confiance, contre 43 % pour Georgia Meloni en Italie et 53 % pour Olaf Scholz en Allemagne.

Cette défiance semble avoir atteint son paroxysme, atteignant des niveaux jamais mesurés auparavant. La crise de confiance, qui s’est intensifiée après la dissolution de l’Assemblée nationale et les troubles politiques qui ont suivi, dénonce l’incapacité de la classe politique à résoudre les enjeux du pays. Un sentiment général de découragement est partagé par 45 % des Français, contre seulement 15 % exprimant un sentiment de bien-être.

L’Assemblée nationale, qui atteint un niveau de confiance historiquement bas (24 %), et la question de la démocratie elle-même deviennent des points de tension. La majorité des Français (52 %) considèrent que notre système démocratique ne mérite pas d’être défendu, tandis que seulement 28 % estiment que la démocratie fonctionne correctement, un écart flagrant par rapport à l’Allemagne (51 %) et l’Italie (37 %).

L’enquête révèle aussi une poussée de la demande d’une autorité plus forte. En effet, 48 % des Français jugent qu’il faudrait moins de démocratie et plus d’efficacité, tandis que 41 % soutiennent l’idée d’un « homme fort » n’ayant pas besoin des élections ou du Parlement. Ces chiffres traduisent un désir croissant de stabilité et d’ordre, un phénomène qui dépasse les simples questions de gouvernance pour toucher une frange importante de la population, notamment les plus âgés et ceux issus des classes populaires.

Cette montée de l’aspiration à plus d’autorité se reflète dans la demande croissante pour un chef fort capable de « remettre de l’ordre », une idée soutenue par 73 % des Français, bien plus que dans d’autres pays européens. Cette tendance, alimentée par la déception vis-à-vis des partis politiques traditionnels, suggère une transformation du paysage politique français, qui pourrait laisser place à de nouveaux modes de gouvernance, potentiellement inspirés par des modèles plus autoritaires comme celui incarné par Donald Trump aux États-Unis.

Ainsi, la France semble s’éloigner des idéaux démocratiques classiques, au profit d’une recherche de pragmatisme, d’efficacité, et d’une certaine forme de renouveau politique, au détriment de la participation active et de l’engagement civique. La tendance générale est un rejet de la politique traditionnelle, au profit de la vie personnelle et de l’action locale, un désintérêt qui pourrait renforcer l’isolement des citoyens vis-à-vis des institutions nationales.

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