« Après une année 2020 marquée par la pandémie, la fermeture des salles de cinéma et l’arrêt des sorties de films, l’Académie des Lumières, présidée par la journaliste américaine Lisa Nesselson, est heureuse de pouvoir soutenir plus que jamais l’excellence et la diversité du cinéma français ». Heureuse de célébrer toute l’industrie du cinéma, qui a répondu avec courage et détermination au défi imposé.
Les « Prix Lumières du cinéma », également surnommés les “Golden Globes français”, sont décernés depuis un quart de siècle. Ils inaugurent dès le mois de janvier la saison des prix cinématographiques, en récompensant les talents du cinéma français de l’année écoulée ; ils donnent aussi la tendance à venir. Le palmarès est décerné par les 123 correspondants de la presse internationale, issus de 36 pays.
Un « Lumière » est un trophée créé par la Monnaie de Paris, signé Joaquín Jiménez, qui le décrit en ces mots : « Paris, ville lumière, et sa flamme, son phare. Lumière dans le noir, la salle de cinéma. En gravure les lumières existent aussi, elles sont des ouvertures traversantes dans la matière, elles permettent le passage. Le trophée représente donc une bande flamme dont l’âme, le foyer, la mèche, est la tour Eiffel. Cette flamme est ajourée de “lumières”, référence aux iconiques perforations des pellicules et aux fenêtres que sont les toiles de cinéma, que le regard traverse pour entrer dans la lumière d’une œuvre. »
L’édition 2021 des Lumières vient de se tenir. Malgré la crise sanitaire mondiale, la 26e Cérémonie de la presse internationale a tout de même pu avoir lieu, sous la forme d’une émission diffusée en clair et en exclusivité sur Canal+, le mardi 19 janvier 2021 à 20h00. L’émission était présentée par Laurie Cholewa et Laurent Weil, ainsi que par treize des correspondants de l’Académie des Lumières, qui ont remis les treize Lumières : film, mise en scène, actrice, acteur, révélation féminine, révélation masculine, premier film, animation, documentaire, coproduction internationale, image et musique. Sur le plateau, les lauréat·es se sont succédé pour les interviews. Léa Drucker et Alex Lutz, comédienne et comédien-réalisateur, sont intervenus pour rappeler l’importance de la presse internationale dans la défense du cinéma français.
L’an dernier, le film Les Misérables, de Ladj Ly, avait remporté le prix du meilleur film. Cette année, le prestigieux Prix Lumières du meilleur film a été décerné au long métrage d’Emmanuel Mouret, Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait :
« Les histoires manquées que l’on idéalise, celles que l’on vit et que nargue le quotidien, celles que l’on construit sans la passion : Mouret nous entraîne dans une ronde vertigineuse d’amours et d’attirances contrariées entre gens qui se veulent du bien. De leur bravoure et de leurs faiblesses, il tire le suc romanesque de son film, quand ce n’est pas le destin qui s’en mêle. Car l’inconstance est douce, et l’empathie du cœur n’empêche pas la cruauté des actes. Le refrain n’est pas neuf, il sonne comme au premier jour et invite à repenser le couple, revivifié par des acteurs au diapason que l’on n’attendait pas là, dont Camélia Jordana, Vincent Macaigne et Emilie Dequenne en état de grâce. » (nouvelobs.com)
ADN, de Maïwenn, a remporté le prix de la mise en scène :
« Avec « ADN », Maïwenn retrouve son sujet de prédilection : une famille dispersée où l’affection s’est muée depuis longtemps en rancœurs jamais ravalées. Un volcan qui explose lorsque Emir, le grand-père, dernier vecteur de cohésion, vient à mourir. Neige, sa petite-fille, en profite pour tourner le dos à l’hypocrisie qui règne chez les siens et décide de retrouver ses racines. Cette quête identitaire permet à l’actrice-réalisatrice de réaliser son meilleur film. Elle dessine la psychologie de ses personnages grâce à un scénario malicieux (la mère, interprétée par une Fanny Ardant au sommet, passe son temps à jeter les objets qui l’encombrent) et règle ses propres comptes avec un humour ravageur (un dîner chez son père se transforme en cauchemar horrifique). Un film libre et effervescent, parfaitement maîtrisé, où Maïwenn canalise sa rage, qui débouche sur un épilogue plein de paix, totalement bouleversant. » (nouvelobs.com)
La Fille au bracelet, de Stéphane Demoustier, a été récompensé par le prix du scénario.
« Pour son troisième long métrage, Stéphane Demoustier réaffirme son obsession pour le monde de l’enfance, lieu des premiers désirs et des premières blessures, et pour l’amour filial. Il l’interroge, cette fois-ci, sur la scène d’un tribunal. Lise est-elle coupable du meurtre de son amie ? On le sait, le film de procès a toujours recélé un double fond. Il est ce miroir kafkaïen qui grossit les failles d’une administration malveillante et qui prépare les boucs émissaires de demain… Il est aussi celui qui injecte dans la mécanique d’une action essentiellement parlée (l’art de convaincre) une dimension méta sur le cinéma, cet art de l’artifice. Demoustier transforme ces assises en un échiquier géant, mais élude la frénésie des audiences. Dans ce jeu tactique et dangereux, l’accusée refuse le rôle d’éplorée qui lui est assigné. Son visage impavide, son indolence, ses réponses trouées sont autant de preuves accablantes. » (Les Inrockuptibles)
Certains films ont été doublement récompensés, ce fut le cas notamment de Deux, réalisé par Filippo Meneghetti, qui a reçu le prix du meilleur premier film et un prix pour ses deux actrices, Martine Chevallier et Barbara Sukowa. François Ozon est reparti aussi avec deux Lumières pour Été 85 : le prix de la meilleur image, et le prix de la révélation masculine pour Félix Lefebvre et Benjamin Voisin. Le dessinateur et réalisateur Aurel a obtenu quant à lui le prix du meilleur film d’animation pour Josep et sa compositrice, Sílvia Pérez Cruz, celui de la meilleure musique.
Deux grands succès publics sont restés absents de ce palmarès : Adieu les cons, d’Albert Dupontel, et plus surprenant encore, le film de Caroline Vignal, Antoinette dans les Cévennes et sa brillante actrice, Laure Calamy.
L’Académie des Lumières de la presse internationale se félicite d’avoir maintenu dans sa sélection deux films, dont les sorties, prévues fin 2020, ont été reportées pour cause de fermeture des salles. Elle est heureuse de les voir finalement au palmarès. Il s’agit de Slalom et de L’homme qui a vendu sa peau. Espérons que ces prix les aideront au moment de leur sortie !
Le palmarès complet des Prix Lumières 2021
Meilleur film : Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait, d’Emmanuel Mouret
Meilleure mise en scène : ADN, de Maïwen
Meilleur scénario: La fille au bracelet, de Stéphane Demoustier
Meilleur documentaire : Un pays qui se tient sage, de David Dufresne
Meilleur film d’animation : Josep, d’Aurel
Meilleure actrice : Martine Chevalier et Barbara Sukowa dans Deux
Meilleur acteur : Sami Bouajila dans Un Fils
Révélation féminine: Noé Abita dans Slalom
Révélation masculine : Félix Lefebvre et Benjamin Voisin dans Été 85
Meilleur premier film : Deux, de Filippo Meneghetti
Meilleure coproduction internationale : L’homme qui a vendu sa peau, de Kaouther Ben Hania
Meilleure image : Hichame Alaouié pour Été 85
Meilleure musique : Sílvia Pérez Cruz pour Josep
Et pour ceux qui penseraient La Martinique déconnectée des circuits culturels, rappelons qu’à Fort-de-France nous avons déjà pu voir, grâce aux structures de Madiana et de Tropiques-Atrium, quelques-uns de ces beaux et bons films primés, à savoir Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait / ADN / Josep / Un Fils / Slalom.
Fort-de-France, le 20 janvier 2021