— Par Michaël Mélinard —
20 ans après la mort de son créateur Hugo Pratt, Corto Maltese revient pour une nouvelle aventure concoctée par Juan Diaz Canales et Ruben Pellejero. Retour sur la vie du plus célèbre marin de bande dessinée que ses voyages ont confronté aux soubresauts du siècle.
Les héros sont éternels. Ainsi, Corto Maltese dont on ignore s’il est bel et bien mort, ressuscite, 20 ans après la disparition de son créateur Hugo Pratt, sous la houlette de deux auteurs espagnols, le scénariste Juan Diaz Canales et le dessinateur Ruben Pellejero dans « Sous le soleil de minuit ».
Ce personnage de marin solitaire, instantanément identifiable, dépasse largement le cadre de la bande dessinée. Il est devenu un mythe littéraire qui lui vaut nombre d’ouvrages, d’adaptations cinématographiques et même quelques chansons. Visage anguleux, créole à l’oreille gauche, redingote bleu nuit, casquette de marin, Corto Maltese cultive certes sa liberté et son indépendance. Mais il ne s’interdit pas, au gré de ses nombreuses rencontres, de s’engager pour des causes.
Pratt lui a fait vivre 29 aventures (dont une partie fut publiée dans « Pif » entre 1970 et 1973), réunies en 12 albums depuis sa création en 1967. Il lui a concocté une véritable biographie, fixant sa naissance au 10 juillet 1887 à La Valette (Malte). Son père est un marin anglais, sa mère une gitane de Séville, ancien modèle d’Ingres. Ses parents se rencontrent à Gibraltar. Il passe une partie de son enfance dans cette enclave britannique avant d’arriver dans le quartier juif de Cordoue. En 1904, Corto Maltese embarque à bord du « Golden Vanity ».
Il visite l’Égypte, la péninsule Arabique, les Indes britanniques, l’Asie du Sud-Est et la Chine. C’est le début d’une incroyable vie de voyages où il explore les cinq continents. Il croise les écrivains Jack London et James Joyce, un gardien d’hôtel révolutionnaire russe nommé Djougachvili, rebaptisé plus tard Staline, les hors-la-loi Butch Cassidy, Sundance Kid et son épouse Etta Place. Il se retrouve au coeur de conflits telles la guerre russo-japonaise en Mandchourie ou la Première Guerre mondiale.
en 29 aventures, où il cultive sa liberté, corto est devenu un mythe littéraire.
Jusqu’en 1926, les albums ou les déclarations d’Hugo Pratt permettent d’avoir une idée assez précise des pérégrinations du marin de papier. La suite semble plus sujette à caution. Tout juste sait-on que Maltese séjourne, entre 1928 et 1929, en Éthiopie à Harar, là où vécut Rimbaud. Le mystère plane également sur sa disparition. On perd sa trace après son engagement dans les brigades internationales pendant la guerre civile espagnole. Quoiqu’il advienne, l’engouement suscité par les rééditions et les expositions consacrées au travail de Pratt prouvent que Corto Maltese est toujours vivant, symbole inamovible d’une bande dessinée qui flirte avec la peinture, la poésie et le roman d’aventures.
« Sous le soleil de minuit », tome 13, Casterman, dessin de Ruben Pellejero, scénario de Juan Diaz Canales.
82 p. 16 euros en couleurs, 25 euros en noir et blanc. Le 30 septembre en librairie.