— Jean-Marie Nol, économiste —
Confrontés à une crise sanitaire sans précédent dans notre histoire, les Guadeloupéens et Martiniquais se sont tournés, naturellement, vers les pouvoirs publics pour chercher la protection nécessaire afin de surmonter le choc provoqué par le Covid-19. Que ce soit l’État ou les collectivités territoriales, tous les acteurs publics sont devenus, au milieu de cette tempête, les points de référence pour l’ensemble des Antilles. Les coûts sociétal, social, sanitaire, économique et budgétaire sont inconnus à ce jour mais on sait qu’ils seront à la mesure du traumatisme collectif que cette crise aura provoqué.
Bien entendu, la vie reprendra ses droits et, en même temps qu’il faudra établir les causes et les responsabilités de chacun dans la gestion de la crise, nous devrons réfléchir collectivement à un nouveau modèle de société tant en Martinique qu’en Guadeloupe .
La récession que va causer la pandémie de Covid-19 n’est pas encore quantifiée que déjà analystes ou cabinets de conseil phosphorent : cette crise plurielle va-t-elle transformer notre économie Antillaise déjà très fragile ? Va-t-elle accélérer des tendances en cours? Du rôle de l’État aux habitudes de consommation, en passant par l’organisation du travail, nous serons confrontés à quelques bouleversements possibles dans les années qui viennent.
La pandémie de Covid-19 risque d’engendrer des dommages économiques dévastateurs, comparables à ceux de la Grande Dépression de 1929, a mis en garde le fonds monétaire international (FMI) . Une vague de chômage de masse est redoutée, alors que plus de la moitié de la population mondiale est soumise à un confinement à domicile. En France, un quart des salariés du privé soit 9 millions est déjà au chômage partiel. Le coût du seul chômage partiel est déjà estimé à 25 milliards d’euros pour les finances de l’Etat.
En. Martinique et Guadeloupe la récession est déjà là, et nul doute qu’elle va s’amplifier !
Seules comptent désormais son ampleur et sa durée, qui détermineront le nombre de faillites, de licenciements et la nécessité ou non d’un soutien massif de l’Etat à l’économie. De nombreux secteurs sont déjà lourdement touchés : tourisme, distribution non alimentaire, hôtellerie-restauration, industrie, artisanat, construction. Le nombre de défaillances d’entreprises sera fonction de la durée de mise à l’arrêt forcée de l’économie, et de la capacité de chaque entreprise à y faire face individuellement.
Et comme en France hexagonale, nous allons subir les conséquences de cette crise plurielle.
En Martinique comme en Guadeloupe, les gens qui se complaisent dans l’émotionnel et qui ne voit que l’écume des choses, ne réfléchissent pas assez sur les enjeux de demain et les prochains dommages collatéraux de cette crise , aussi il faut alerter et tirer le signal d’alarme dès maintenant sur les problèmes économiques, financiers et sociaux qui ne manqueront pas de se manifester à l’avenir. Aucun sujet ne doit être écarté dès à présent et ce sous aucun prétexte ne serait-ce pour des préoccupations d’ordre sanitaires qui dépassent aujourd’hui notre entendement. Aujourd’hui, la vraie question qui se pose désormais est qui au final va bientôt payer la crise du Coronavirus ?
L’état dépense maintenant à tout va, alors qu’il y a encore quelques mois, on disait qu’il n’y avait plus d’argent dans les caisses. Et pourtant aujourd’hui existe un « plan d’urgence » de 110 milliards d’euros pour faire face à une crise économique, qui va durer « des années ». L’épidémie a d’ores et déjà dopé le rôle joué par les Etats et banques centrales, qui déversent milliards après milliards pour essayer d’amortir le choc pour l’économie.
Le gouvernement français versera notamment des aides d’urgence pour les allocataires de minima sociaux, ainsi que pour les soignants et les fonctionnaires. Édouard Philippe promet que ce plan sera « prolongé, une fois la crise sanitaire maîtrisée ». Ce comportement, c’est également comme le veut la fable de Jean de la Fontaine, ne pas penser à l’hiver qui arrive (la crise économique, financière et sociale ) et peut-être compter sur ceux qui comme les épargnants ont pris certaines précautions pour subvenir le cas échéant à leurs besoins.
Et les cigales, comme l’état qui vident leur portefeuille sans compter, se retrouvant étranglées par les dettes.
C’est un peu ce que fait notre gouvernement jusqu’à présent. Distribuer sans contrepartie , dépenser, ne pas penser au lendemain, ( de cette manière, grâce à la dette , l’économie tourne et fonctionne) l’État sera là pour vous.
C’est là une erreur de jugement que tous les citoyens de Martinique et Guadeloupe paieront cher dans un proche avenir.
La seule réponse possible à nos inquiétudes est l’instauration d’un revenu universel de base pour tous. Et cela même pour les retraités car le système des retraites va exploser avant 2025.
En effet, pour notre retraite ce sont les actifs actuels qui payent nos pensions, or le système sera déséquilibré en 2023. Il manquera 17 milliards pour parvenir à l’équilibre. En effet, selon les chiffres du gouvernement, notre système de retraite actuel ne permet de financer qu’un peu plus de 8 pensions de retraites sur 10, ce qui creuse les déficits publics. La crise que notre économie traverse et les difficultés que traversent de nombreux pays, dont le notre, conduisent les gouvernements européens repenser leurs dépenses, en s’arrêtant de vivre au dessus de leurs moyens et de rechercher l’équilibre budgétaire au maximum. Ce qui n’est pas fait à ce jour, alors quand on dit que le système de retraite devrait rester proche de l’équilibre à l’avenir, c’est en supposant que la croissance augmentera plus vite que les pensions. Le non-dit, c’est la dévalorisation des retraites par rapport aux salaires. A l’inverse, si la croissance n’est pas au rendez-vous en 2021 et que le chômage augmente sensiblement comme prévu , le déficit des retraites va exploser. La situation financière déjà très fragile,va se dégrader à la vitesse grand V , aussi il y a un vrai risque de finances publiques sur les retraites….
Si cette idéologie du déni de réalité était tenable par le passé, elle ne l’est plus aujourd’hui. Vous en êtes conscients depuis la parution régulière de nos articles . Les gouvernements n’ont plus les moyens d’une telle politique de redistribution sociale et cela finira pour nous comme pour les grecs ou les argentins. C’est là une mort annoncée de l’État providence. Et n’en doutons pas car la réalité est qu’une crise monétaire se profile à présent à l’horizon.
La dette italienne qui était de135 % du PIB en fin 2019 va bientôt passer à 160% avec la crise du coronavirus. C’est l’explosion assurée de la zone euro et l’apparition d’une crise monétaire cette fois ci. Récapitulons, crise sanitaire, crise économique, crise sociale , crise monétaire, alors quel avenir se dessinera demain avec au surplus la crise sur l’emploi que provoquera la révolution numérique et l’intelligence artificielle ?
Nous ne connaissons ni le jour, ni l’heure. Mais nous ne pouvons plus ignorer le risque d’un tsunami qui va déferler sur nos économies au plus tard à la fin de 2020 sous le coup de l’indiscipline des États-Unis et de la hausse des taux. L’enjeu est redoutable : $ 63.000 milliards de dette souveraine est en circulation. Une crise de la dette souveraine serait donc un vrai tsunami dont nous commencerons à ressentir bientôt les premiers soubresauts. Le Fonds Monétaire International vient de pousser un cri d’alarme accusant les pays de ne pas avoir mis d’ordre dans leurs finances.
La France n’est pas exempt de reproche sur la bonne tenue des comptes publics.
Près de 43 milliards d’euros de recettes fiscales en moins pour l’État français et le manque à gagner pour les collectivités locales de Guadeloupe et Martinique sera également très élevé du fait de la baisse drastique de l’octroi de mer et de la taxe sur l’essence.
La récession liée à la pandémie de Covid-19 va provoquer une baisse des recettes fiscales de 42,7 milliards d’euros cette année en France, selon le texte du deuxième projet de loi de finances rectificative .
Mécaniquement, les conséquences sont une récession historique, avec une contraction de 8% du PIB cette année, un déficit public de 9% et une dette publique de 115% du produit intérieur brut (PIB).
Déficit, dette, dépenses… les finances publiques vont être mises à rude épreuve cette année.
Drôle d’époque qui annonce des lendemains qui déchantent car nous sommes en train d’être coincés entre une crise sanitaire puis économique et sociale et prochainement une crise numérique et de l’intelligence artificielle. Mais qui peut prévoir vraiment ce qui va se passer ? Pour comprendre vraiment ce qui va se produire à l’avenir , il faut savoir que le confinement actuel et les changements qu’il implique, notamment dans le secteur de l’éducation et du travail pourrait amener la France à accélérer la digitalisation de la société et faire changer les usages . L’économiste Daniel Cohen évoque même que la crise actuelle pourrait être “un accélérateur du capitalisme numérique”. Des articles s’appuient sur l’exemple de la Chine et soulignent que le virus pourrait faire “progresser de 50% l’éducation en ligne” au sein de l’Empire du milieu. Il en est de même en France où nous pourrions assister à une restructuration des cours, notamment dans l’enseignement supérieur.
Le confinement, imposant une certaine forme de distanciation physique, pourrait tendre à démocratiser le télétravail dans les années à venir et supprimer certains déplacements professionnels. Le système de santé pourrait continuer l’expérimentation de la télémédecine et démocratiser aussi cette pratique, dont les consultations ont été multiplié par 100 depuis le début de l’épidémie. La communication par visioconférence, également sollicitée au cours de cette période de confinement par les internautes en quête de pallier la distance physique avec leurs proches, pourrait se démocratiser au sein des foyers. Les médias approfondissent eux aussi leur pratique des outils numériques : Le Monde a créé un fil de discussion Whatsapp, où les utilisateurs qui le souhaitent peuvent recevoir informations et articles vérifiés. La vague en cours, qui précédait le Covid, de robotisation et d’intelligence artificielle va forcément accélérer »
Et si l’on considère que l’organisation internationale du travail évalue le nombre d’emplois menacés par la crise du coronavirus à 1,25 milliards , et que plusieurs experts très sérieux estiment que la révolution numérique et l’intelligence artificielle feront disparaître à horizon 2030, le chiffre de 400 millions d’emplois sur la planète , alors notre avenir s’obscurcit considérablement et notre monde est vraiment mal barré, car là encore, le scénario de sortie de crise est soumis à de nombreux aléas régionaux, nationaux et internationaux.
Aussi ayons toujours en mémoire cette citation de William Arthur Word. : » Le pessimiste se plaint du vent, l’optimiste espère qu’il va changer, le réaliste ajuste ses voiles « .
Jean-Marie Nol, économiste