Conte Dogon : L’orpheline

CONTE 8

Il y avait une fille qui avait perdu sa mère en bas-âge. Elle a été confiée à une marâtre après la mort de sa mère.
Quand elle a eu un certain âge,elle a accompagné sa marâtre aux champs.
Chaque fois qu’ elle  accompagne sa marâtre au champ, quand elles arrivent à un endroit de la brousse où il n’y a personne, la marâtre demande à l’enfant de l’attendre , parce qu’elle va faire un besoin. C’est alors qu’elle se transforme en arbre pour venir effrayer la fillette. Celle-ci appelle au secours en chantant: « Sina! Où est parti Sina? L’arbre veut me manger!» Elle chante et chante, l’arbre se rapproche et se rapproche, elle ferme les yeux et l’arbre recule jusqu’à disparaître de sa vision .
Peu après, la marâtre revient et lui demande:» Qu’est-ce qui s’est passé pour que tu cries mon nom?». La fillette lui raconte sa vision et la marâtre répond :
«  Tu t’es seulement un peu perdue, sinon comment l’arbre a-t-il pu se déplacer ? »
Chaque jour,la même scène se répète jusqu’à ce qu’un chasseur observe la scène par hasard. Alors il décide le lendemain de se cacher près de l’endroit où il a vu ce curieux incident. Ce jour-là, au moment où la marâtre , après s’être transformée en arbre pour effrayer la fillette, a commencé à redevenir une humaine, le chasseur a tiré sur elle. C’est pourquoi, elle est restée à moitié arbre, à moitié humaine.
Les villageois ont alors compris que cette marâtre était une sorcière qui maltraitait l’enfant qui devenait très maigre par manque de nourriture.

Il faut penser chaque jour à ce qui t’arrivera si tu maltraites un enfant orphelin.

 

Commentaire : Je n’ai pas fait d’observation en Pays Dogon concernant la condition orpheline. Il se peut qu’elle soit assez fréquente, étant donné le taux de mortalité d’adultes jeunes ( les épidémies, le manque d’hygiène, les accidents etc…). En cas de décès d’un parent ou des deux, la solidarité familiale joue puisque la structure sociale de base – la « grande famille » réunissant toutes les générations -implique une solidarité. La condition orpheline est donc plus un problème de psychologie individuelle qu’un problème social. La bienveillance de la « marâtre » n’est pas toujours acquise. De plus une bouche de plus à nourrir dans une famille pauvre risque ne n’être pas bien acceptée. Le thème des souffrances de l’orphelin(e) est universel – voir sa fréquence dans les contes de Grimm où la marâtre est souvent comme ici assimilée à une sorcière.
Ce conte est impressionnant par son aspect onirique et magique ( l’arbre qui marche, la marâtre à moitié arbre, à moitié humaine après l’intervention du chasseur). Il marque l’imagination et contribue à la leçon morale de la conclusion.

 

Lire :« Contes Dogon », recueillis par Malick Guindo à Endé (Pays Dogon) Mali