Conte Dogon : La mère qui voulait un garçon

CONTE 10
Il était une fois une femme qui n’avait pas eu de garçon. Dieu ne lui a pas donné de garçon et elle est en quête d’un garçon.
Un jour, quand elle partit chercher du bois en brousse, elle vit un petit garçon, elle a alors décidé de prendre l’enfant et de l’adopter .

Chaque fois qu’elle partait en brousse pour chercher du bois, elle laissait sa petite fille et le petit garçon à la maison.
Le petit garçon qu’elle avait amené à sa maison n’était pas un humain comme nous, mais l’enfant des djinns .
Quand la femme partait au champ, le petit garçon se levait et disait à la fille de vite préparer à manger et la fille obéissait.

Un jour une vieille femme observe la scène, puis elle fait une proposition à la mère : quand cette dernière ira aux champs, la vieille femme se cachera pour observer ce que font les enfants..
Alors un jour la mère a dit aux enfants qu’elle allait en brousse mais la vieille dame se cache à proximité et elle voit et entend ce que fait le petit garçon .

A son retour la mère écoute le récit de la vieille femme puis elle lui demande comment se débarrasser de l’enfant. Cette dernière lui dit de faire semblant d’être morte et alors les gens feront croire qu’on va l’inhumer avec le petit garçon, et puis on verra bien la réaction de l’enfant.

Dès que les gens ont dit que la femme est morte et qu’elle sera enterrée avec un petit garçon, le petit dit aux hommes en chantant : « Dans votre village quand une personne meurt, vous enterrez deux personnes.Moi je vais aller faire mon besoin dans la brousse ». C’est ainsi que l’enfant s’est enfui dans la brousse. C’est pour cela que, lorsque tu vois un petit enfant en brousse, il ne faut pas croire que c’est un humain mais il faut savoir que c’est un djinn qui s’est changé en enfant.

 

Commentaire :
Le mot « djinn » est d’origine arabe. Sous l’influence de l’islam, les Dogon se le sont approprié. Il correspond en fait aux esprits de la nature de la tradition dogon qui peuvent être aussi bien bienfaisants que malfaisants. Tout dépend de la relation que l’on établit avec eux. Ici la femme à un désir d’enfant mâle ( on sait combien dans la société dogon le masculin est valorisé). La rencontre avec le petit garçon dans la brousse représente son fantasme, la réalisation de son désir. Sa fille joue le jeu ou bien est englobée, elle aussi, dans le fantasme de sa mère en faisant la cuisine pour le djinn. La mère est alors à demi consciente de sa névrose et en parle à une vieille femme qui représente peut-être la sagesse. Elle joue le rôle de thérapeute. Il faut un simulacre de mort pour délivrer la mère de son fantasme : elle doit mourir à elle-même pour chasser le djinn, c’est-à-dire recouvrer la santé mentale, c’est-à-dire encore accepter la réalité du fait qu’elle doit se résigner à ne pas avoir d’enfant mâle. Autrement dit, elle doit vaincre en elle-même le préjugé que lui impose la société dogon.

 

Lire :« Contes Dogon », recueillis par Malick Guindo à Endé (Pays Dogon) Mali